Aller au contenu principal

L'antibiorésistance expliquée par une vétérinaire de l'Ifip

Au forum technique Cooperl 2014, Anne Hémonic, vétérinaire Ifip, a expliqué aux éleveurs les mécanismes de l'antibiorésistance.

Anne Hémonic, vétérinaire à l'Ifip :  « L'homme et l'animal partagent les mêmes bactéries, donc les mêmes gènes de résistance aux antibiotiques. »
Anne Hémonic, vétérinaire à l'Ifip : « L'homme et l'animal partagent les mêmes bactéries, donc les mêmes gènes de résistance aux antibiotiques. »
© C. Gérard

Première idée reçue à combattre : l'antibiorésistance n'a rien à voir avec de possibles résidus d'antibiotiques dans la viande. Cette probabilité est extrêmement rare puisque le délai d'attente suffit à garantir l'absence de traces d'antibiotiques dans les produits carnés.
Deuxième fausse idée : ce ne sont pas les hommes ou les animaux qui deviennent résistants aux antibiotiques, mais les bactéries qu'ils hébergent.
Troisième fausse idée : le phénomène n'est pas nouveau. On a même pu retrouver des bactéries résistantes à des antibiotiques dans les sarcophages égyptiens... Car la nature - et en particulier les champignons - produit des antibiotiques « naturels ». Mais en quantité effectivement minuscule. Et c'est bien l'usage des antibiotiques qui a créé la résistance ces dernières décennies.


Transmission horizontale et verticale


Alors comment cette résistance aux antibiotiques apparaît-elle ? Il faut d'abord savoir que, dans toute population bactérienne, une certaine proportion possède cette résistance « naturelle » à un antibiotique donné. Lorsque l'on administre l'antibiotique à l'animal, cette proportion devient évidemment prépondérante chez l'animal ou l'homme, puisque les bactéries « sensibles » ont été détruites par la molécule. Normalement, après l'arrêt de la distribution de l'antibiotique, les bactéries sensibles recolonisent le milieu et redeviennent majoritaires. Car les bactéries résistantes se multiplient moins vite que les sensibles en raison de protéines spécifiques qui les « alourdissent ». C'est la cohabitation de ces bactéries sensibles et résistantes qui peut poser problème. En effet, les deux types de bactéries peuvent relativement facilement s'échanger des gènes, dont celui de la résistance à l'antibiotique. Résultat : une bactérie sensible va devenir résistante - c'est la transmission horizontale - et donner naissance à des bactéries qui porteront toutes ce même gène de résistance, c'est la transmission verticale. Environ 90 % de la transmission de la résistance aux antibiotiques dans l'organisme fonctionne selon ce schéma. Pour les 10 % restant, l'acquisition de la résistance intervient suite à une mutation chromosomique « spontanée » de la bactérie qui la transmet à sa descendance.

Un monde, une santé


Si cette résistance acquise par les bactéries d'un animal inquiète le corps médical, c'est que nous, humains, hébergeons les mêmes bactéries. Le passage de l'animal à l'homme (et inversement) se fait via différents vecteurs : les contacts directs, l'air, l'eau, l'environnement... C'est la notion de « une seule santé ». D'où le risque d'acquisition par l'homme de bactéries résistantes à un ou plusieurs antibiotiques, avec pour conséquence l'inefficacité des antibiotiques disponibles. Un phénomène qui serait responsable de 25 000 décès par an en France.
Par ailleurs, les bactéries ne connaissent pas de frontières.
C'est la notion de « un seul monde ». Or, Anne Hémonic rappelle que plus de 120 pays sur la planète n'ont aucun contrôle de l'usage des antibiotiques... Et que, contrairement à ces dernières décennies, les nouvelles molécules se font extrêmement rares. L'arsenal thérapeutique n'évoluant pas, il est donc urgent de préserver son efficacité.


Le panel Inaporc


D'où le suivi qu'a mis en place l'Ifip pour Inaporc. 170 élevages sont régulièrement enquêtés pour récupérer des données concrètes relatives à l'usage des antibiotiques : le nombre de jours de traitement par animal, les motifs, les modes d'administration... Les résultats sont régulièrement rendus publics. Une nouvelle vague d'enquêtes en élevage va démarrer. Elle confirmera très probablement la tendance des précédentes enquêtes : une réduction significative du recours aux antibiotiques qui restent majoritairement utilisés en post-sevrage pour faire face à des problèmes digestifs, avec toujours 50 % des usages réalisés par seulement 25 % des éleveurs. C'est donc vers ceux-ci que les efforts doivent porter en priorité pour que le plan EcoAntibio parvienne bien à l'objectif d'une réduction de 25 % de l'usage des antibiotiques entre 2012 et 2017.

Les plus lus

<em class="placeholder">Tous les matins, Dominique et Philippe Gautier prennent leur petit déjeuner avec leurs salariés dans une ambiance conviviale.</em>
Comment ces éleveurs de porcs bretons ont fait évoluer leur exploitation pour fidéliser leurs salariés
Dans leur exploitation porcine, Dominique et Philippe Gautier ont fait évoluer leurs pratiques managériales : vestiaires…
<em class="placeholder">David Le Lay éleveur dans le Finistère</em>
« J’investis dans l’élevage de porc de demain »

David Le Lay en est persuadé. C’est maintenant qu’il faut construire l’élevage de demain. Un élevage décarboné, doté d’un…

<em class="placeholder">L&#039;étude de la chambre d&#039;agriculture et d&#039;Evel&#039;up démontre qu&#039;une augmentation de 37% de la taille moyenne des cheptels permettrait de compenser la baisse des installations ...</em>
Maintenir la production porcine bretonne par une augmentation de la production par éleveur : utopie ou réalisme ?
La baisse de la production porcine bretonne constatée depuis 2008 n’est pas inéluctable. Une étude réalisée par la Chambre d’…
<em class="placeholder">Le jumeau numérique de l&#039;élevage est capable de collecter toutes les informations numériques pour ensuite apporter un service de conseil à l&#039;éleveur.</em>
La Cooperl veut créer un jumeau numérique pour les élevages de porcs grâce à l'IA

Grâce à l’IA, Cooperl veut créer un "jumeau numérique" des élevages porcins, une copie virtuelle en temps réel capable d’…

<em class="placeholder">L&#039;objectif du Défi employeur organisé par les chambres d&#039;agriculture est de développer les compétences de manager des agriculteurs employeurs.</em>
Employeur agricole : et si le vrai défi, c’était le management ?
À partir de novembre 2025 et jusqu’en mars 2026, les chambres d’agriculture organisent le Défi Employeur, un…
<em class="placeholder">robot de lavage CleanBubby 4.0</em>
Cleanbuddy 4.0, un robot de lavage conçu par des éleveurs de porc

Calipro a présenté au Space un robot de lavage équipé de radars et détectant automatiquement les obstacles dans les salles d'…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 96€/an
Liste à puce
Version numérique de la revue Réussir Porc
2 ans d'archives numériques
Accès à l’intégralité du site
Newsletter Filière Porcine
Newsletter COT’Hebdo Porc (tendances et cotations de la semaine)