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Des avancées sur le bien-être des porcs, éprouvées en élevage

Lors du forum Recherche et Développement d’Evel’up, éleveurs et techniciens ont témoigné de solutions concrètes pour s’adapter, sans subir, aux nouvelles attentes sociétales, en particulier de bien-être animal.

Les essais sur l'arrêt de la caudectomie confirment que l'apport de matériaux manipulables n'est pas suffisant à lui seul pour enrayer les morsures de queues. © A. Puybasset
Les essais sur l'arrêt de la caudectomie confirment que l'apport de matériaux manipulables n'est pas suffisant à lui seul pour enrayer les morsures de queues.
© A. Puybasset

En développant en 2018 un service de recherche et développement doté de moyens importants, le groupement Evel’up s’était donné comme objectif d’apporter des solutions concrètes et testées sur le terrain, avec toujours une approche technico-économique pour l’éleveur. Le premier forum R & D qui s’est tenu en décembre 2020 en a été l’illustration. Axé sur les défis de demain, son objectif était de répondre aux préoccupations des éleveurs que ce soit sur des sujets de court terme pour répondre à des obligations réglementaires (enrichissement avec des objets manipulables, systèmes d’abreuvement) ou sur des problématiques de plus long terme comme l’autonomie protéique.

« L’objectif est de donner les clés aux éleveurs pour trouver le meilleur moyen d’y répondre, en étant plus proactif », explique Philippe Bizien, le président du groupement. Réalisé dans des conditions techniques inédites conjuguant visioconférences et réunions sur quatre sites, contexte Covid-19 oblige, le forum a alterné des résultats d’essais et des témoignages d’élevages, en particulier sur la thématique du bien-être animal et dont voici une sélection.

Un surcoût conséquent de la caudophagie

Evel’up a évalué l’impact financier de la caudophagie suite à deux essais d’arrêt de la coupe des queues réalisés en élevage. Rapporté à un élevage type de 250 truies sevrant 6 325 porcelets par an et ne pratiquant plus la caudectomie, il s’élève à près de 54 000 euros par an, soit 8,40 euros par porc.

 

 

 

Dans son calcul, Maëliss Brunon, responsable du service R & D, a intégré l’ensemble des surcoûts liés à la caudophagie : l’impact sur les performances (-10 g de GMQ, + 1 % de pertes sevrage-vente), le coût des enrichissements supplémentaires à ceux réglementaires (jouets et sacs de jute en post-sevrage, blocs de mélasse et bouchons de maïs en engraissement…), les frais de santé, l’impact sur les saisies mais aussi le temps de main-d’œuvre liée à une surveillance accrue. « Les deux élevages choisis présentaient initialement très peu de facteurs de risques susceptibles de favoriser l’apparition de cannibalisme », précise-t-elle.

 

 
Maéliss Brunon, responsable R&D d'Evel'up © A. Puybasset
Maëliss Brunon, responsable du service R&D d'Evel'up
Maéliss Brunon, responsable R&D d'Evel'up © A. Puybasset
Ces essais confirment la complexité de l’arrêt de la caudectomie. « Il doit se faire progressivement en limitant le nombre d’animaux en essai dans un premier temps, pour des raisons de bien-être animal et d’impact financier. Ces travaux confirment que l’apport de matériaux manipulables n’est pas suffisant à lui seul pour enrayer les morsures de queue, qui ont concerné 63 % des animaux en test. » Ils montrent aussi que la gestion de l’ambiance est un facteur clé à maîtriser, des départs de cannibalismes étant régulièrement survenus à la suite d’un défaut d’ambiance.

 

Un meilleur GMQ en post-sevrage avec une mezzanine

 

 
La fréquentation de la zone de mezzanine augmente fortement après un mois de présence en post-sevrage.  © Evel'up
La fréquentation de la zone de mezzanine augmente fortement après un mois de présence en post-sevrage. © Evel'up
En augmentant de 30 % la surface disponible au sol, l’aménagement d’une mezzanine en post-sevrage a permis une augmentation du GMQ de 12,5 grammes par jour, soit 531 grammes contre 518 grammes pour le lot témoin. C’est ce qu’a montré un essai réalisé dans une salle de post-sevrage sur trois bandes consécutives. « La longueur d’accès au nourrisseur n’a pas été modifiée. L’accès limité au nourrisseur a probablement bridé le gain de GMQ », estime Mélanie Ropars, du service R & D d’Evel’up. L’observation des animaux a montré que le taux d’occupation de la zone de la mezzanine augmentait un mois après le sevrage. Le dispositif n’a pas eu d’influence sur la température et la teneur en ammoniac.

 

En revanche, l’éleveur chez qui a été réalisé le test souligne que le suivi sanitaire est plus compliqué tout comme l’accès pour le lavage. « Il compte un temps supplémentaire de 30 minutes pour laver quatre cases. L’éleveur suggère aussi de rehausser la cloison latérale pour éviter tout passage de porcs d’une case à l’autre. » Le coût de la mezzanine est d’environ 850 euros HT pour une case de 40 porcelets.

 

L’analyse d’images pour mieux détecter les signes de grippe

Les services vétérinaires et de R & D d’Evel’up ont mis au point un modèle expérimental pour détecter les signes de pathologies respiratoires en ayant recours au « machine learning », basé sur l’automatisation de l’analyse d’images via des algorithmes. « Ce modèle a été utilisé avec succès au Gaec de Keravel pour détecter précocement les signes de pathologie respiratoire récurrente en post-sevrage. Cela a permis de cibler le bon moment pour réaliser les analyses et identifier le pathogène en cause, à savoir un virus influenza A responsable de la grippe récurrente », explique Claudio Trombani, vétérinaire Breizhpig-Evel’up. Les éleveurs Yannick et Gwénola Le Morvan ont expliqué le contexte : « des problèmes respiratoires sont apparus en post-sevrage au printemps, marqués par une toux récurrente, de l’hétérogénéité et un taux de pertes important.

 

 
Yannick et Gwénola Le Morvan. «L’utilisation de la caméra a aidé à cibler le moment le plus opportun pour réaliser les analyses et identifier le pathogène responsable des problèmes respiratoires récurrents. » © Evel'up
Yannick et Gwénola Le Morvan. «L’utilisation de la caméra a aidé à cibler le moment le plus opportun pour réaliser les analyses et identifier le pathogène responsable des problèmes respiratoires récurrents. » © Evel'up
Les analyses réalisées jusqu’à présent n’avaient pas permis de mettre en évidence de virus grippal, probablement parce que les prélèvements n’étaient pas réalisés au bon moment ». Pour cela, une caméra associée à un boîtier connecté de la société Copeeks a été installée en juillet en début de post-sevrage pour observer un changement de comportement des cochons. Lors d’un tour d’élevage, vers 50 jours d’âge, Gwénola repère des cochons apathiques. En parallèle, l’analyse des images suivies à distance par le vétérinaire montre une augmentation forte d’animaux couchés près des cloisons à la recherche d’endroits frais. Le ratio entre les animaux couchés et ceux debout a été multiplié par trois en une journée (voir graphique). Le diagnostic et les analyses réalisés ce jour-là ont permis d’identifier le pathogène. Un programme de vaccination a été mis en place depuis. « À terme, l’objectif est de transformer ce modèle en un vrai outil de décision, avec un seuil d’alerte et une plateforme d’accès aux données par internet », ajoute le vétérinaire. Yannick Le Morvan voit aussi dans la caméra connectée un outil d’avenir à exploiter pour mieux anticiper les problèmes de cannibalisme, en associant par exemple une sonde d’ammoniac dont la présence indiquerait un défaut de ventilation.

 

 

 
Évolution du nombre d’animaux couchés et debout Vers 50 jours d’âge, la part d’animaux couchés dans la zone d’intérêt de la case de post-sevrage augmente subitement. © Evel'up
 

 

95 % des portées sans meulage des dents

 

 
Dominique Gautier, éleveuse à Trévérec. « La grille de suivi aide à mieux juger de la nécessité ou pas de meuler les dents d’une portée. » © Evel'up
Dominique Gautier, éleveuse à Trévérec. « La grille de suivi aide à mieux juger de la nécessité ou pas de meuler les dents d’une portée. » © Evel'up
La SCEA de Kermerrien a réussi à arrêter le meulage systématique des dents des porcelets en s’appuyant sur une grille de suivi servant d’outil d’aide à la décision. « Il permet un suivi plus rigoureux des portées à la mise bas et sert à déterminer si l’une d’elles nécessite ou pas un meulage », explique Dominique Gautier, de l’élevage de 620 truies. La décision de meuler se fait sur deux jours, suite aux observations réalisées par les salariés en charge de la maternité, 24, 48 et 72 heures après la mise bas. Sur la grille de suivi, faite maison, ils renseignent quatre types d’observations : l’état des groins des porcelets, celui de la mamelle de la truie, une truie sur le ventre qui ne donne pas à boire ou une truie qui écrase des porcelets. « Dans ce dernier cas, on décide immédiatement de meuler la portée. Pour les autres critères, on attend le deuxième jour pour décider selon l’aggravation. Il ne faut pas s’affoler en cas de groins abîmés, parfois cela se règle tout seul. Si deux porcelets se bagarrent pour la même tétine, on met l’un des deux sous une truie adoptive. » L’arrêt du meulage s’est fait progressivement à partir de 2018 en commençant par les cochettes. En parallèle, un travail a été fait sur l’alimentation des truies pour favoriser le démarrage de la lactation et ainsi réduire le risque de bagarres entre les porcelets. Seuls 5 % des portées sont désormais meulées. « Les salariés ne voudraient pas revenir en arrière. On a réussi à transformer une tâche physique, chronophage et répétitive, en un temps d’observation des portées bien plus intéressant et instructif. » La GTTT montre que l’absence du meulage n’a pas eu d’impact sur le taux de perte sur nés vifs. Le nombre de sevrés a continué de progresser. Les salariés ont aussi remarqué qu’il y avait beaucoup moins de problèmes d’arthrites en post-sevrage.

 

Quel coût des matériaux manipulables ?

Suite à une série d’essais sur les matériaux manipulables en fonction des différents stades physiologiques et à partir de retours d’éleveurs, l’équipe R & D a calculé le coût par animal des matériaux d’enrichissement qui se sont révélés les plus efficaces, en termes de praticité et de réponse aux attentes réglementaires. Ces coûts sont calculés hors main-d’œuvre en fonction d’une moyenne de besoin de renouvellement. « L’usure des jouets peut toutefois varier du simple au double selon les élevages », prévient Mélanie Ropars.

 

 
 © Evel'up
© Evel'up

 

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