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Coupler méthanisation et traitement biologique

Evalor a mis au point le procédé Aéro qui repose sur la méthanisation du lisier en amont du traitement biologique. Plusieurs années de fonctionnement en confirment l’intérêt technique, économique et environnemental.

Transformer un centre de coût – le traitement du lisier – en centre de profit, c’est ce que permet l’installation d’une unité de méthanisation en amont d’un traitement biologique. Le procédé a été mis au point par Evalor et installé depuis 2011 dans un élevage des Côtes-d’Armor (voir ci-contre). Le recul est donc suffisant aujourd’hui pour en dresser le bilan. Premier constat, techniquement, le procédé est au point. L’exploitation étant située sur un "bassin algues vertes", le digestat issu du méthaniseur doit être centrifugé pour exporter le phosphore excédentaire hors Bretagne. La fraction solide est compostée et la fraction liquide traitée par nitrification-dénitrification, comme un lisier brut. Au final, le couplage fournit, d’une part, de la chaleur et de l’électricité produites par le méthaniseur, et d’autre part, un refus de centrifugation composté et valorisé en engrais. En sortie de station de nitrification-dénitrification, les boues décantées sont épandues à la tonne et un effluent épuré sert à l’irrigation des cultures. Depuis la mise en place de la méthanisation, qui consomme la matière organique des effluents pour la transformer en énergie, le volume de boues à épandre a été divisé par 4. Ce qui permet de conserver du digestat centrifugé pour l’épandage.

Sur ce point, Isabelle Robin, directrice d’Evalor, met en avant un avantage agronomique intéressant : « Avant la mise en place de la méthanisation, seuls deux produits pouvaient être utilisés pour la fertilisation des cultures de l’exploitation : les boues biologiques et le surnageant issus du traitement, qui contiennent essentiellement de l’azote organique, à minéralisation lente. A contrario, le digestat centrifugé utilisé aujourd’hui contient environ 85 % d’azote ammoniacal ce qui lui confère une efficacité immédiate élevée, permettant des économies d’engrais minéral ».

Des avantages économiques prouvés

Deuxième constat, le procédé génère des revenus complémentaires liés à la vente d’électricité, et des économies d’énergie, grâce à la chaleur produite qui sera utilisée pour des bâtiments d’élevage, des habitations…

Enfin, le procédé contribue fortement à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Que des avantages donc, et Isabelle Robin, directrice d’Evalor, calcule qu’une installation de méthanisation construite en amont d’une station biologique existante coûte moins cher que la même installation construite dans un élevage qui n’aurait pas l’obligation de traiter le lisier. « En effet, nous pouvons récupérer la fosse de réception et les ouvrages de stockage de la station biologique, ce qui représente une économie d’environ 20 % sur une installation de 100 kW. » Autre avantage de ce « couplage », la station de traitement biologique gagne en efficacité et la capacité de traitement est augmentée d’environ 40 % sans équipements supplémentaires. « La méthanisation agit comme un prétraitement de la matière organique et améliore l’efficacité du traitement aérobie. Par ailleurs, avec un digestat sortant à une température de 37 °C du méthaniseur, le procédé biologique est beaucoup moins sensible aux variations de température extérieure."

Pour toutes ces raisons, Isabelle Robin affirme que les éleveurs possédant une station de traitement biologique ont tout intérêt à la coupler avec une unité de méthanisation en amont, d’autant qu’ils sont rompus au pilotage de procédés biologiques et de gestion des fermentations. Mais, surtout, « le retour sur investissement est à la clé. Toutefois, il faut pour cela avoir la capacité à investir, et les moyens humains de gérer un atelier complémentaire sur l’exploitation". Et elle ajoute : "on attend toujours avec impatience les tarifs de rachat d’électricité revalorisés pour les nouveaux projets".

Le lisier est devenu une source de revenu

Au Gaec du Clos de la Pierre, à Plélo dans les Côtes-d’Armor, l’installation de méthanisation a été installée en 2011 en amont du traitement de lisier (Réussir Porc, novembre 2013). Avec ces années de recul, Jean-Yves Auffray, membre du Gaec, confirme l’intérêt de cet investissement de 750 000 euros (voir infographie).

Le procédé fonctionne conformément aux prévisions. Le méthaniseur produit 1 000 MWh d’énergie sous forme de chaleur dont 415 MWh servent à chauffer les porcheries. Par ailleurs, le cogénérateur permet l’envoi au réseau ERDF de 800 MWh rachetés au prix de 22,12 c/kWh.

L’objectif de l’éleveur était de trouver une alternative aux 30 000 litres de fioul nécessaires au chauffage des porcheries. Il est donc atteint, et la vente d’électricité apporte évidemment un revenu complémentaire. L’éleveur et Isabelle Robin annoncent que l’installation génère trois fois plus d’énergie qu’elle n’en consomme. Et le retour sur investissement est bien au rendez-vous. Avant l’installation de méthanisation, le traitement du lisier coûtait environ 4 €/m3, le bassin d’aération construit en 1995 étant totalement amorti. Aujourd’hui, le solde net se situe plutôt à + 3 €/m3 de lisier…

« Nous sommes donc bel et bien dans un processus à énergie positive, avec une station de traitement du lisier qui, auparavant, était un centre de coût, et devient, avec la méthanisation, une source de revenus complémentaires. »

Un moyen de consolider l’exploitation

Par ailleurs, l’intérêt du dispositif est aussi d’ordre environnemental. Grâce à l’ajout de la méthanisation et du poste de centrifugation en amont du traitement biologique, la capacité de traitement de la station biologique est passée de 15 m3 à près de 30 m3 par jour, sans aucun investissement supplémentaire sur le bassin d’aération qui a vu passer plus de 150 000 m3 de lisier en vingt ans… Ce qui a permis au Gaec de procéder à deux restructurations successives pour devenir naisseur-engraisseur total sans surface supplémentaire. Et satisfaire l’éleveur qui cherche toujours à gagner en autonomie.

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