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Passer en bio pour simplifier le travail

Au Gaec de Bramariguettes, dans l’Aveyron, Sylvie et Joëlle ont converti leur élevage laitier au bio, tout en sortant de la filière roquefort, pour simplifier le travail.

Sylvie Combernoux avoue qu’elle a eu du mal à prendre la décision de quitter Société, le principal fabricant de roquefort. Elle élève 750 brebis laitières, en Gaec avec sa mère, Joëlle Sigaud, à Saint-Léons dans l’Aveyron. Les deux femmes ont décidé de sortir de l’interprofession de roquefort et de rejoindre le « quatrième bassin », en l’occurrence l’entreprise Le Petit Basque, pour passer en bio et revoir en profondeur leur système de production. Avant le changement, elles étaient en traite annuelle avec deux troupeaux (850 brebis au total) et deux périodes de mises bas. Un système trop difficile à gérer. Elles conduisent seules l’exploitation avec l’aide bénévole du père de Sylvie, retraité, et l’intervention d’un salarié lors des pointes de travail. L’agriculture biologique permettait de réduire le cheptel et de le conduire avec une seule période de mises bas, sans perdre de chiffre d’affaires. Elles avaient l’impression aussi que les exigences du système conventionnel devenaient de plus en plus fortes sans pour autant voir évoluer le regard du consommateur ni la rémunération. Les livraisons de lait bio ont démarré en octobre 2016.

La lutte se déroule sur plusieurs mois

Pour autant, il n’était pas question d’arrêter l’ensilage d’herbe. « Bien réalisé, c’est un mode de conservation adapté à notre région d’altitude », défend Sylvie Combernoux dont la ferme est située à 870 mètres d’altitude. Les deux associées ne voulaient pas non plus investir dans une installation de séchage en grange. Société n’acceptant pas l’ensilage en agriculture biologique, le choix a été fait de livrer leur production au Petit Basque. « Ce qui était important pour nous aussi, c’était de pouvoir choisir notre période de traite », ajoute Sylvie. Elle démarre début décembre, lorsque les brebis ne sortent plus et quand les semis sont terminés.

La conversion à l’agriculture biologique a complètement changé la conduite de l’exploitation. « Il faut tout repenser. » Les céréales pures sont devenues des méteils. Les ray-grass italiens, pour l’ensilage, ont été remplacés par des méteils fourragers et des luzernes. Mais, c’est sans doute l’arrêt de l’insémination artificielle qui a le plus bouleversé les pratiques. La lutte se déroule sur plusieurs mois (du 24 mai au 10 novembre). « Nous allons resserrer la période. Nous sommes encore en phase d’apprentissage », disent les éleveuses. La lutte est assurée par des béliers génomiques dans le but de produire le renouvellement. « J’ai envie de continuer à travailler sur mon troupeau et je ne veux pas prendre de risque sanitaire », justifie Sylvie.

« Un système basé sur la production »

« On ne peut pas comparer les deux systèmes. On travaille autrement mais on veut toujours faire de notre mieux », résument les éleveuses. À leurs yeux, en effet, technicité et productivité ne sont pas en contradiction avec l’agriculture biologique. En 2017, la production de lait (2 200 hectolitres) a été aussi importante que les années précédentes avec moins de brebis (650 en production à 350 litres de moyenne). Toutes les brebis ont produit pendant huit mois, alors qu’avant le troupeau d’été faisait une lactation courte. Mais, avec l’étalement des mises bas, la traite ne s’arrête que pendant un mois. Le prix du lait (1,36 €/l avec les primes saisonnalité et qualité) compense les surcoûts de l’alimentation bio. « Nous achetons les mêmes quantités qu’avant. Il y a moins de brebis à nourrir mais les rendements en céréales sont moins élevés. Nous allons continuer à nous améliorer. » Par contre, les agneaux sont vendus dans le circuit conventionnel faute de structuration d’une filière bio. Au final, les résultats économiques sont meilleurs. Les aides assurent 20 % du chiffre d’affaires. « C’est un système basé sur la production, plus que sur les subventions, apprécient les deux éleveuses. Mais, les aides (NDLR : 20 % du chiffre d’affaires, y compris les aides à la conversion) restent indispensables. »

« Confiance et responsabilité »

Joëlle Sigaud et Sylvie Combernoux sont très satisfaites des relations avec leur nouvelle entreprise. La fourniture de lait est contractualisée pour cinq ans renouvelables. Une prévision de production est effectuée mensuellement sur trois ans, mais il n’y a pas de pénalité en cas de dépassement ou de sous-réalisation. « Je perçois cette liberté comme une relation de confiance et de responsabilité. En dévier serait aller vers les soucis que nous avons connu, affirme Sylvie Combernoux, qui siégea en son temps à l’interprofession roquefort. Le quatrième bassin a redonné de la dynamique et a participé à la réorganisation de la filière roquefort. » En tout cas, « nous sommes satisfaites de notre nouveau modèle et nous ne reviendrions pas en arrière », assurent en chœur mère et fille, pourtant si attachées à ce « patrimoine » que représente le roquefort.

Chiffres clés

750 brebis lacaune lait présentes
2 200 hl de lait produit
113 ha de SAU dont 20 ha de céréales, 14 ha de prairies permanentes et 79 ha de prairies temporaires.
3,5 UTH

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