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En Europe méditerranéenne, les bergers sont souvent étrangers

Une étude montre comment les bergers étrangers peuvent être une opportunité pour le pastoralisme euroméditerranéen.

L’impact des bergers étrangers est plutôt positif car les troupeaux gardés valorisent des terres qui seraient autrement abandonnées. © D. Hardy
L’impact des bergers étrangers est plutôt positif car les troupeaux gardés valorisent des terres qui seraient autrement abandonnées.
© D. Hardy

En Italie, en Grèce et en Espagne, plus d’un tiers de la main-d’œuvre agricole employée officiellement est d’origine étrangère. Les bergers n’échappent pas à cette règle et une étude parue dans la Revue de géographie alpine décrit les premiers résultats de TRAMed - Transhumances Méditerranéennes -, un projet de recherche qui analyse la contribution de la main-d’œuvre immigrée pour le pastoralisme des pays euroméditerranéens.

Dans les quatre pays étudiés (Espagne, Italie, France et Grèce), Michele Nori, l’agro-sociologue italien auteur de l’étude, note une présence croissante des travailleurs immigrés, en provenance d’autres zones pastorales de la Méditerranée. En effet, les enfants des éleveurs cherchent souvent d’autres modes de vie, hors de l’activité pastorale, ce qui entraîne un dépeuplement des zones de montagne et un mauvais renouvellement générationnel. Le programme Pastomed notait déjà en 2007 que, « pour le Portugal, les Abruzzes, l’Épire, et la Sardaigne, il y a, toutes exploitations confondues, plus de dix fois plus d’anciens que de jeunes ! »

La France se distingue par ses conditions de travail et ses salaires

Pour pallier ce problème de ressources humaines, le recours à l'immigration a été fondamental dans de nombreux cas. Les bergers étrangers offrent une main-d’œuvre relativement qualifiée à un coût relativement faible. Sans leur présence, beaucoup d’éleveurs auraient aujourd’hui de grandes difficultés à poursuivre leurs activités. L’étude dresse un profil type de l’immigré qui travaille comme berger salarié : un homme, entre 25 et 40 ans, originaire d’un pays méditerranéen (Maroc, Albanie, Macédoine, Roumanie, Bulgarie), avec souvent une expérience directe en élevage extensif. Si ces bergers ont un savoir-faire, la passion et la capacité à s’adapter aux conditions difficiles et à des salaires bas, ils peuvent parfois manquer de connaissances techniques, notamment pour la bonne gestion des ressources forestières, la présence de la faune sauvage et les relations avec l’agriculture et les aires protégées.

Dans ce contexte méditerranéen, la France se distingue par des conditions de travail, des droits et des niveaux de salaires nettement supérieurs. « C'est le résultat d'années de bataille et d’investissements à la fois sociaux, économiques et politiques tant de la part des élus locaux, des services pastoraux, des organisations professionnelles que des bergers salariés eux-mêmes » note l’étude qui rappelle aussi que la France dispose de cinq écoles de berger.

"Ces travailleurs n'ont pas tendance à s'installer"

Cette contribution des communautés étrangères au renouvellement générationnel n’est pas nouvelle dans le monde pastoral. Ainsi, en Provence, on est passé des Italiens et Espagnols au début du siècle, aux Maghrébins provenant de la Tunisie et du Maroc après la Seconde Guerre Mondiale, pour arriver aujourd’hui à une forte présence des Roumains.

« Les travailleurs restent de quelques mois à quelques années dans ce secteur, basculant entre différents élevages, note Michele Nori. Mais ils n’ont pas tendance à s’y installer, toujours à la recherche de conditions de vie et d’emploi plus confortables, d’hébergement plus digne, de salaires plus élevés, et de la possibilité d’améliorer leur statut au fil du temps ».

Cette forte présence de main-d’œuvre étrangère dans le pastoralisme permet de maintenir vivants et productifs les territoires de montagne, tout en gérant les ressources naturelles et en protégeant la population contre les risques hydrogéologiques (incendies, avalanches, etc.). Malgré, parfois, des divergences culturelles, l’impact de l’immigration dans ces régions est plutôt positif, la concurrence sur les marchés locaux du travail et des terres étant limitée.

Qui travaille où ?

L’étude de Michele Nori liste, région par région, l’origine des bergers étrangers et leur salaire moyen. Ainsi, dans les Abruzzes (Italie), 90 % des bergers seraient immigrés (de Macédoine, de Roumanie ou d’Albanie) avec des salaires moyens de 800 euros. Autour de Valence, en Espagne, environ sept bergers sur dix viendraient du Maroc avec un salaire moyen de 600 euros. En Grèce, la moitié des bergers de Thessalie viendraient d’Albanie, de Bulgarie ou de Roumanie pour un salaire variant de 400 à 600 euros. En France, le recours à la main-d’œuvre étrangère serait plus rare dans les Pyrénées ou les Alpes-Maritimes mais en Provence, les grands troupeaux seraient gardés l’hiver par des Roumains et des Maghrébins.

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