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Des agneaux engraissés 100 % à l’herbe

Jean-Eudes Renard élève 570 brebis allaitantes en Charente. Ses 650 agneaux sont tous engraissés exclusivement à l’herbe.

Jean-Eudes Renard est éleveur de 570 brebis allaitantes à Brillac en Charente, à la limite avec le département de la Vienne, non loin de la rivière du même nom. Le jeune homme a repris depuis trois ans l’exploitation de ses parents qui avait la particularité d’être constituée de deux sites de 75 hectares séparés de 12 kilomètres. En s’installant, il a acheté 10 hectares de terres sur un troisième site au bord de la Vienne, lui aussi à 12 kilomètres des deux autres. Tous les ans, ses brebis croisées Texel et Charollais donnent naissance à 650 agneaux qui sont engraissés 100 % à l’herbe.

Trente ans de système herbager

Jean-Marie, le père de Jean-Eudes, était déjà en système herbager depuis 30 ans. C’est donc tout naturellement que son fils a continué l’engraissement à l’herbe. « Je suis né dedans et pourquoi vouloir changer un système qui marche ? », nous confie-t-il. Ce système a plein d’avantages, « il marche bien économiquement, pas besoin de faire trois agnelages en deux ans pour s’en sortir » et c’est un certain confort de travail, « je ne brasse pas des seaux de concentrés toute la journée », raconte l’éleveur. L’image des agneaux mangeant de l’herbe est également très bien valorisée auprès des consommateurs et l’absence de concentrés dans l’alimentation donne un gras très blanc qui est recherché par les bouchers et leurs clients.

Six cent cinquante agneaux vivants

Pour la reproduction, les 570 brebis sont séparées en deux lots conduits en monte naturelle. Le premier lot met bas à partir de début février pendant trois semaines puis il y a une semaine de battement pour tout nettoyer et ramener les 200 brebis du deuxième lot jusqu’à la bergerie où elles vont agneler pendant trois semaines. Les brebis sont transportées sur les 12 kilomètres qui séparent leur pâture de la bergerie dans un van avec étage et une bétaillère à raison de 100 brebis transportées par trajet. Parmi les 650 agneaux, 115 agnelles seront gardées pour le renouvellement et feront leur premier agnelage à l’âge de deux ans. Aucun achat de paille n’est effectué puisque c’est du vieux foin et la fauche des refus qui constituent la litière en bergerie lors de l’agnelage.

Un lot d’engraissement et un lot de stock

Le lot des agneaux à l’engraissement est constitué de 50 à 70 agneaux qui tournent toutes les semaines sur des parcelles de deux à trois hectares de prairie temporaire composée uniquement de trèfle et de luzerne pour qu’ils grandissent vite et soient bien conformés. Un lot de stock avec les autres agneaux vient alimenter le lot d’engraissement quand des animaux sont vendus. Les agnelles de renouvellement forment un lot qui reste sur le site près de la Vienne et après le sevrage, les deux lots des mères sont reconstitués. Tous les lots sauf celui des agnelles sont en pâturage tournant dynamique pour valoriser au mieux l’herbe et stimuler l’appétit des moutons par l’appétence de nouveaux pâturages et de nouvelles parcelles.

Seize hectares de légumineuses pures

Tous les ans en avril-mai, Jean-Eudes Renard sème huit hectares de prairie nouvelle uniquement constituée de trèfle et de luzerne. Cette prairie temporaire reste implantée deux ans, l’éleveur a donc 16 hectares qui sont d’abord fauchés pour récolter du foin riche en matière azotée puis qui sont pâturés par les agneaux du lot d’engraissement. Sur les 144 hectares de prairies restants, 25 hectares sont des prairies naturelles en zone Natura 2 000 constituées de fétuque, trèfle, minette, lotier et un peu d’agrostis. « Ce sont de bonnes prairies », mais l’éleveur travaille surtout sur le reste de sa surface où il sème un mélange de graminées et de légumineuses. En tout, les prairies fauchées produisent entre 400 et 500 bottes de 200 kg de foin par an. C’est suffisant pour alimenter les brebis qui ne sont complémentées en foin qu’à partir de décembre. Pour cette raison, le jeune éleveur a arrêté d’acheter de l’engrais azoté et les prairies ne sont plus fertilisées qu’avec des apports d’amendement organique.

Un parcellaire bien équipé

Toutes les parcelles sont délimitées par des clôtures fixes constituées d’ursus et d’un fil de barbelé. Cela représente 30 kilomètres de clôture et un temps d’entretien conséquent. L’éleveur réfléchit d’ailleurs à « passer à de l’électrique » pour faciliter leur gestion. Pour l’abreuvement en extérieur, il dispose de six tonnes à eau et d’abreuvoirs automatiques raccordés à une source. Un quad et une chienne Border Collie facilitent les déplacements des lots d’animaux.

Du parasitisme

Avec des brebis et des agneaux qui ne sont presque jamais en bergerie, il y a des problèmes de parasitisme, « principalement les strongles, les ténias au printemps sur les agneaux mais aussi de la petite douve et wohlfahrtia au niveau des pattes les années humides ». Traiter contre ces parasites représente beaucoup de travail, l’éleveur y passe « deux à trois heures par jour pendant une semaine pour traiter les 650 agneaux ». Le temps de retour des animaux sur une parcelle est de 20 jours alors qu’il faudrait une trentaine de jours pour casser le cycle des parasites, mais cela demanderait d’avoir encore plus de surface et la forte présence de faune sauvage permettrait sûrement aux parasites de se développer malgré tout. Jean-Eudes Renard a essayé d’ajouter des plantes à tanins comme la chicorée et le plantain dans ses prairies, « ça aide un petit peu sur les brebis gestantes mais sur les agneaux qui ont peu d’immunité ça ne permet pas d’enlever un traitement ».

Des agneaux sous signe de qualité

Les agneaux sont vendus de juin à décembre aux bouchers de la région. Ils ont le label rouge Le Diamandin, l’IGP agneaux du Poitou-Charentes et l’exploitation est certifiée HVE. Les agneaux sont ainsi vendus entre 140 et 150 euros avec un poids carcasse d’environ 20 kg. L’étalement de la production permet de bénéficier des cours un peu plus haut au mois de décembre quand il y a peu d’agneaux sur le marché. Cette bonne valorisation combinée à la réduction des charges permet de dégager un EBE de 75 000 euros.

Sécuriser le système face au changement climatique

Les prairies sont la seule source d’alimentation du troupeau, il faut donc veiller à ce que la ressource soit suffisante. Pour cela le chargement est très réduit, il est actuellement de 3,6 brebis par hectare. Avant l’achat du nouveau site de 10 hectares, le chargement était de quatre brebis par hectare. Pour faire face aux sécheresses, Jean-Eudes Renard n’a augmenté son troupeau que de 20 brebis après son agrandissement pour diminuer le chargement. Engraisser les agneaux à l’herbe permet aussi d’étaler la production et de pouvoir s’adapter à la pousse de l’herbe. L’exploitation est en Charente « c’est un climat océanique, il finit toujours par pleuvoir à un moment ou à un autre ».

Chiffres clés

160 ha
570 brebis
1 agnelage par an
LR agneau Le Diamandin

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