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Bien abreuver les ovins en bâtiment et au pré

L’abreuvement des animaux en quantité et qualité est essentiel. Le manque de main-d’œuvre amène notamment à rechercher des solutions pour capter l’eau au pré et la distribuer en libre-service.

L’eau est le premier aliment des brebis, souligne Émilie Laffont, du GDS du Lot lors d’un webinaire du Ciirpo. Pourtant, lors de problèmes sanitaires, c’est rarement un critère auquel on prête beaucoup d’attention ». Si les besoins varient selon la température ambiante, le stade, l’alimentation, les besoins sont en moyenne de 10 litres par jour pour une brebis qui allaite et 4 litres par jour pour un agneau. Beaucoup d’animaux ne sont pas correctement hydratés. « Dans une étude menée en 2016 dans le Lot, 80 % des animaux n’étaient pas assez hydratés. » Vérifier qu’ils boivent assez est donc primordial. Un compteur d’eau (à 50 € et un par paddock) permet d’évaluer la quantité consommée. La mesure de la densité urinaire au réfractomètre permet lui de vérifier leur niveau d’hydratation. « Et si les animaux ne sont pas correctement hydratés, il faut vérifier le nombre et le type d’abreuvoirs, leur hauteur, leur débit, leur propreté, l’absence de courants parasites. » Les normes prévoient un abreuvoir pour 40 à 50 animaux, à 40-50 cm de hauteur pour les agneaux et 60-80 cm pour les adultes, avec marche en l’absence de fumier. Les études montrent aussi que les ovins préfèrent les abreuvoirs à niveau constant et de grande longueur, plutôt que les abreuvoirs à pipettes. Les animaux ne buvant pas dans des abreuvoirs trop sales, leur entretien régulier est indispensable. Enfin, il est judicieux de placer les abreuvoirs à l’opposé des cornadis, pour que les animaux ne salivent pas trop vite.

Capter l’eau au pré

La mise en place de solutions d’abreuvement autonomes au pré devient aussi une priorité. « Il est important que le bétail dispose d’une eau de qualité au pâturage, insiste Jean-Emmanuel Vernon, de la chambre d’agriculture de la Haute-Vienne. Mais le transport de l’eau par citerne représente une charge de travail qui peut atteindre deux à trois heures par jour. Or, la main-d’œuvre sur les exploitations diminue. Le coût en travail, carburant ou amortissement du matériel peut, de plus, dépasser 10 000 euros par an sur certaines exploitations, soit 17 euros par UGB et par an en moyenne. Enfin, l’abreuvement direct au cours d’eau peut entraîner de l’érosion, l’ensablement des cours d’eau et des pollutions bactériologiques. »

De plus en plus, les éleveurs cherchent donc à capter l’eau au pré, avec une priorité accordée à la qualité de l’eau et à une distribution en libre-service. Une solution pour capter l’eau de sources superficielles est le puits filtrant (2 000 € HT environ), qui consiste à creuser un trou de 2 à 4 m de profondeur, dont on empierre le fond et dans lequel on pose une buse en béton ou plastique. L’eau remonte dans la buse et est ensuite amenée jusqu’aux abreuvoirs par gravité ou grâce à une pompe. « L’eau est fraîche, le système est opérationnel en période de gel léger et les travaux sont faciles et en général non soumis à déclaration. Il faut juste s’assurer que la source a un débit suffisant toute l’année. » Si l’eau ne peut être amenée aux abreuvoirs par gravité, une solution intéressante est d’y installer une pompe solaire assortie d’un ballon surpresseur permettant de gérer le dénivelé. « Le coût du matériel, en comptant le puits filtrant, la pompe solaire et le ballon surpresseur, est d’environ 2 700 euros, soit 7 euros par hectare sur 10 ans si on l’installe pour 10 paddocks. Cette solution est par contre peu adaptée à l’hivernage. » Une autre solution est l’abreuvement au ruisseau. Un gué abreuvoir ou une descente aménagée (à partir de 2 000 €) permettent aux animaux de boire en toute sécurité. « L’eau est fraîche et courante, le système fonctionne en période de gel et l’entretien est facile. Il faut par contre un fond rocheux et une faible variation de niveau. Les travaux de terrassement peuvent être assez lourds. Et l’ouvrage est soumis à déclaration. »

Forage ou bélier hydraulique

Autre technique encore : le forage, qui permet de capter des eaux profondes et peut être équipé d’une pompe solaire. L’eau est fraîche et de bonne qualité bactériologique en général, avec un volume important régulier. « Il faut par contre faire appel à une entreprise spécialisée, le coût atteint 4 000 euros et l’ouvrage est soumis à déclaration. » Autre solution : le bélier hydraulique, technique ancienne dans laquelle une chute d’eau permet de remonter de l’eau plus haut que la source grâce au poids de l’eau, sans nécessiter d’énergie. Enfin, une autre piste est de valoriser l’existant. « Sur beaucoup d’exploitations, il existe des sources captées ou des puits partiellement utilisés ou abandonnés, note Jean-Emmanuel Vernon. Il peut être intéressant de les revaloriser, ce qui permet d’accéder à une eau de qualité avec un coût moindre et une réglementation plus simple. » La remise en fonctionnement d’un puits implique de vérifier qu’il est déclaré en mairie, de le sécuriser et de vérifier la quantité et la qualité de l’eau en le vidant. Vérifier aussi qu’il n’y a pas d’assainissement non collectif à proximité. Dans tous les cas, les aspects réglementaires sont importants, notamment s’il y a dans la parcelle un cours d’eau ou une zone humide. « Selon la jurisprudence, un cours d’eau se caractérise par la présence d’un lit marqué, un débit suffisant, une origine de l’eau liée à des sources et un substrat différencié, précise Jean-Emmanuel Vernon. Et une zone humide se définit surtout par le fait que le terrain est habituellement inondé de façon permanente ou temporaire. » Les curages, les petites dérivations, passages busés ou consolidations de berges impliquent une déclaration avec procédure simplifiée. Quand la taille de l’ouvrage augmente, il peut être soumis à déclaration complète, voire à autorisation. Un captage ne nécessite en général pas de démarche particulière, sauf s’il concerne un cours d’eau ou une zone humide. Dans tous les cas, mieux vaut se renseigner auprès de la police de l’eau de la DDT et de la chambre d’agriculture.

Attention à la qualité de l’eau

La qualité bactériologique et physico-chimique de l’eau est essentielle pour que les animaux boivent (eau claire, sans odeur de chlore, pH 6 à 7, dureté entre 10°TH et 15°TH…) et pour éviter la contamination en virus, bactéries ou parasites. L’eau de réseau est fraîche, propre, disponible, mais représente un coût. Elle est traitée au chlore, ce qui peut rebuter les animaux. Il peut être nécessaire de neutraliser le chlore avec un filtre à charbon actif et d’adoucir l’eau si elle est trop dure. Un forage dans une nappe profonde donne également une eau fraîche, avec un volume important, mais qui présente souvent des problèmes de dureté, fer, manganèse et sel. L’eau de pluie récupérée sur les toits (coût 8 000 à 10 000 €) est une autre solution. « Comme l’eau est de l’eau distillée, il peut être intéressant de la stocker dans une réserve en ciment ou en pierre pour la reminéraliser avant de la distribuer, signale Émilie Laffont du GDS du Lot. Attention aussi aux matériaux du toit, comme l’amiante ou le plomb. » Dans tous les cas, il est important de l’analyser régulièrement et éventuellement de la traiter selon les résultats d’analyse (filtration, adoucissement, tampon, oxydation, électrolyse, échangeur d’ions, UV, dynamisation…).

Éviter les courants parasites dans les abreuvoirs

La présence de courants parasites dans l’eau des abreuvoirs est un problème fréquent qui peut avoir de lourdes conséquences. Quelques mesures simples permettent de les éviter.

« Quel que soit le type d’abreuvoir utilisé, la présence de courants électriques parasites dans l’eau est fréquente, constate Émilie Laffont, du GDS du Lot. Les animaux boivent alors moins et il peut y avoir des problèmes de santé récurrents, des mortalités, des avortements… » En cas de doute, il peut donc être utile de mesurer l’électricité présente dans l’eau à l’aide d’un voltmètre, en plaçant une électrode dans l’abreuvoir et l’autre dans la litière. La tension mesurée doit être inférieure à 150 mV (idéalement 50 à 100 mV). Quelques mesures simples permettent de limiter les courants parasites : ne pas placer les abreuvoirs sous les clôtures électriques, éviter d’installer les postes à clôture sur les piliers du bâtiment, ne pas enterrer les tuyaux d’eau et les fils électriques dans la même tranchée ou, s’il n’y a pas d’autre solution, installer l’eau en dessous et les fils électriques au-dessus, séparés par 1 m de galets. La mise à la terre correcte du bâtiment et des abreuvoirs est également essentielle. « Cela implique de relier entre elles toutes les parties métalliques conductrices accessibles, la tuyauterie, les armatures de béton armé, les stalles, les cornadis… pour éviter l’apparition de tensions parasites entre ces éléments », précise Émilie Laffont. La mise à la terre doit ensuite se faire entre 15 et 30 mètres du bâtiment, avec une orientation Nord-Nord/Est, une résistivité inférieure à 10 ohms et une seule mise à la terre par site. Enfin, avec la multiplication des antennes relais, éoliennes, lignes à haute tension…, il peut être utile en cas de courants parasites persistants de vérifier la géobiologie du lieu.

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