Maladies vectorielles : quelle stratégie adopter ?
GDS Cantal - Alors que de nouveaux sérotypes de la FCO menacent tout comme la MHE, la vaccination demeure la seule parade des éleveurs, ont répété les intervenants d’une table ronde à l’assemblée générale du GDS.
GDS Cantal - Alors que de nouveaux sérotypes de la FCO menacent tout comme la MHE, la vaccination demeure la seule parade des éleveurs, ont répété les intervenants d’une table ronde à l’assemblée générale du GDS.



Dans la lutte contre des pathogènes infiniment petits, en l’occurrence les virus de maladies vectorielles que sont la FCO, mais aussi la MHE ou encore la maladie de Schmallenberg, les humains sont souvent démunis ou ont du moins toujours un train de retard. Alors que les éleveurs du Cantal, comme leurs collègues de la quasi totalité de l’Hexagone, appréhendent une vague à trois lames cet été, avec un combo FCO-3, FCO-8 et MHE, le GDS du Cantal a réuni mardi 29 avril lors de son assemblée générale à Jaleyrac des experts pour définir la stratégie à adopter pour s’en prémunir et les gérer au mieux, à défaut de pouvoir endiguer ces épizooties. Les épisodes de 2023 et 2024 ont déjà laissé de graves séquelles dans les cheptels, notamment ovins.
Vaccinez, vaccinez, vaccinez !
Avec un leitmotiv répété tout au long de cette table ronde : vaccinez, vaccinez, vaccinez ! Vétérinaire à la clinique de Mauriac et secrétaire de la fédération régionale des GTV, Diane Pacalin a en effet rappelé qu’il n’existe aucun traitement dédié à ces maladies et que même si le cheptel est touché, la vaccination permet d’atténuer les symptômes qui peuvent générer de lourdes incidences économiques : perte immédiate de production en lait, amaigrissement visible à court, moyen et long termes, baisse de la capacité d’allaitement des mères avec un impact sur le GMQ (gain moyen quotidien) des veaux, infertilité des béliers, boucs et taureaux, vaches vides après saillies,... sans compter des animaux qu’il faut parfois réformer
précocement pour cause de boiteries chroniques. “Les collègues du Nord de la France, qui ont subi le sérotype 3 de la FCO, rapportent des séries d’avortements de même qu’un pourcentage élevé de veaux malformés”, a fait part la vétérinaire. Ce que confirme Stéphane Jeanne, éleveur en Loire-Atlantique, secrétaire de la FNGDS et vice-président de la Fesass (fédération européenne des organisations professionnelles de santé animale) : “Quand on voit les dégâts qu’il y a eus chez nos voisins de la Sarthe... on ne devrait même pas se poser la question de vacciner ou pas”, affiche celui qui regrette la frilosité des éleveurs français à vacciner, avec ou sans prise en charge des doses par l’État d’ailleurs. “Dans les autres pays européens, ils ont pris cette problématique à bras-le-corps, comme en Allemagne où l’État a préconisé de vacciner, ce que les éleveurs ont fait massivement. En tant qu’éleveur, on est responsable de notre cheptel”, estime-t-il.
Lever les freins
Une frilosité tricolore et cantalienne(1) ou du moins des freins qui tiennent à plusieurs facteurs : la disponibilité aléatoire des doses à l’automne dernier et en début d’année 2025, le coût des vaccins - pourtant vite rentabilisé au regard de l’impact économique de ces maladies -, les moyens de contention nécessaires et le nombre de vaccins à administrer, les - rares - effets indésirables rapportés sur le terrain (température des animaux). Une liste à laquelle Joël Piganiol (FDSEA) tient à ajouter un débat pollué par l’obligation de vacciner des animaux (broutards) destinés à l’export pour l’engraissement, alors que le véritable enjeu est de protéger le cheptel de souche.
Si la vaccination reste donc la seule et véritable barrière, l’état de santé de l’animal va être déterminant pour son immunité. Diane Pacalin et Justine Gaudré (vétérinaire conseil au GDS 15) ont ainsi souligné l’importance d’une alimentation de qualité et en quantité suffisante, de la complémentation en oligoéléments et minéraux, d’une bonne gestion du parasitisme. Sans oublier le dépistage à l’introduction d’un animal dans le cheptel.
“Moins l’animal aura de choses à gérer, plus ce sera facile pour lui”, a résumé la vétérinaire, incitant à jouer sur tous les tableaux.
Dont celui des mesures de bioprotection : éviter de faire pâturer les animaux près des zones humides ou boueuses, des tas de fumier... autant de lieux de pullulation des culicoïdes vecteurs. Un volet sur lequel le président de la FDSEA n’a pas manqué de réagir : “On voit toutes les difficultés que l’on a pour entretenir le moindre cours d’eau ; et si les zones humides sont jugées vertueuses en termes écologiques, c’est une véritable catastrophe pour la gestion sanitaire des troupeaux, et on risque de le payer très cher. C’est un sujet sur lequel on butte avec l’État.”
(1) On estime qu’un peu plus de 10 % du cheptel de souche est vacciné contre la FCO-8.
Pourquoi des ruptures de stocks ?
Délégué vétérinaire du laboratoire allemand Bœhringer, fournisseur des vaccins BTVPUR 4-8 et BTV-3, Jean-Charles Mouly a expliqué que la fabrication d’un vaccin était un processus long, d’au minimum six mois, le temps nécessaire pour multiplier les virus, les tester, élaborer le vaccin avec son adjuvant, tester ce nouveau produit sur des animaux... Avec une véritable difficulté à anticiper non seulement l’arrivée d’un nouveau sérotype, mais aussi les besoins des éleveurs. “Autant pour les maladies respiratoires on sait d’une année sur l’autre combien d’animaux les éleveurs vont vacciner”, autant pour la FCO et la MHE, c’est l’inconnue, a-t-il avancé. Quant à la demande de la profession d’un vaccin monovalent, permettant a minima de vacciner contre les sérotypes 3, 4 et 8 de la FCO, il n’a pas caché que cela ne pouvait s’envisager, au regard du coût d’un tel développement, que par un partenariat privé-public, impliquant donc l’État ou Bruxelles. Bruxelles qui a décidé de déclassifier la FCO et MHE “pour ne pas avoir à indemniser les éleveurs”, a indiqué Stéphane Jeanne.