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Six points à savoir sur les pédiluves

Pour contrôler la dermatite digitée, le produit miracle n’existe pas. Installer un pédiluve, sans avoir traité les autres facteurs de risque, ne sert à rien.

1 - D’abord régler tout le reste !

« Le pédiluve est la dernière chose à aborder pour contrôler la dermatite digitée (ou maladie de Mortellaro). Mettre juste un pédiluve ne changera rien quel que soit le produit. Il faut d’abord traiter tous les autres facteurs », affirme d’entrée de jeu Raphaël Guatteo, de l’École nationale vétérinaire de Nantes-Oniris. Parmi eux, trois points clés. Le premier est une détection précoce des lésions pour un traitement précoce, car le réservoir du tréponème (le principal pathogène en cause) ce sont les bovins atteints de lésions. Le deuxième est l’hygiène du bâtiment, pour avoir des pieds propres et une peau saine non agressée. « Si l’on met des tréponèmes sur une patte saine, on a énormément de mal à reproduire la maladie. En revanche, si on met le pied à macérer pendant deux ou trois jours dans une botte, on l’induit dans 60 % des cas », argumente-t-il. Le troisième est un parage préventif régulier : il donne une meilleure résistance au pied.

2 - Plus longs, moins larges et plus profonds

La plupart des pédiluves sont mal dimensionnés. C’est ce qui explique que, souvent, ils fonctionnent mal. Les recommandations reposent sur une étude menée aux USA. Une largeur de 50 cm, beaucoup plus étroite que ce que l’on rencontre, est suffisante. En revanche, les pédiluves commercialisés sont trop courts : « on estime qu’il faut que les pieds aient trempé trois à quatre fois pour imprégner la peau correctement, ce qui nécessite 3 m à 3,5 m de longueur ». Ils ne sont pas non plus assez profonds : « ils font souvent 13 à 18 cm alors qu’il faudrait 28 cm pour que la peau du pied trempe dans la solution et pas seulement le sabot, et que le produit reste dans le pédiluve ». Une enquête menée à Oniris montre qu’en partant d’une hauteur de solution de 13 cm, après 200 passages de vaches, il ne reste plus que 6,5 cm de solution. Pour respecter ces recommandations, la solution est l’autoconstruction.

3 - Quatre traites consécutives tous les 15 jours

La question posée souvent d’entrée de jeu face à un problème de dermatite digitée est : " quel produit mettre dans le pédiluve ? "  « Il y a peu de données pour préférer un produit à un autre : il existe beaucoup de biais dans les études et il y a un réel besoin d’essais cliniques avec un protocole robuste », affirme Raphaël Guatteo. Aucune preuve d’efficacité préventive n’est en effet rigoureusement démontrée. Pour le moment, seules deux études montrent un effet curatif, l’une avec une application en spray en salle de traite (Hoot Fit liquid), et une autre via le pédiluve (Pinkstep).

Quel que soit le produit, la fréquence de traitement préconisée est en général de quatre traites consécutives tous les 15 jours. « On peut passer sur un mode plus intensif si, au départ, on a plus de 20 % de lésions actives, ou à l’inverse diminuer la fréquence si les vaches sont au pâturage. » La fréquence d’application sur des pieds propres préalablement nettoyés est la condition du succès.

4 - Pas plus de 100 à 120 passages

Il ne faut pas dépasser 120 passages pour éviter une inactivation du produit bactéricide désinfectant par la matière organique. Elle est apportée par les bouses. « Notre enquête montre qu’il ne faut pas dépasser 100 à 120 passages de vaches pour répondre à la norme d’efficacité européenne de 20 g de matière organique par litre tout en veillant à la hauteur du liquide. »

5 - Avant tout des pieds propres

« Faire rentrer les animaux avec des pieds très sales dans un pédiluve avec un produit coûteux, clairement cela ne sert à rien ! » Une étude sur l’effet de l’hygiène montre par ailleurs qu’avec des pieds sales, le risque de développer des lésions est presque multiplié par deux. Laver les pieds des vaches en salle de traite n’est pas du temps perdu (5 à 10 min pour 60 vaches). Le jet classique du tuyau en salle de traite suffit ; si on le fait régulièrement, on n'a pas de guangue compliquée à enlever. Ce lavage permet aussi de détecter les lésions plus facilement et de les traiter. « Des pieds sales, c’est la garantie d’avoir de la Mortellaro ", insiste Raphaël Guatteo.

6 - Le pédiluve ne remplace pas le traitement

Le passage dans un pédiluve ne remplace pas le traitement individuel des lésions. L’oxytétracycline en bombe, par exemple, comme beaucoup d’autres désinfectants, a été testée et a prouvé son efficacité à condition d’être bien appliquée. « Mieux vaut pas de pansement qu’un pansement mal fait, non hermétique », précise Raphaël Guatteo.

Une chose est sûre : « ce n’est pas du pédiluve qu’il faut attendre un effet maximum ».

 

Lire aussi /lait/prevenir-la-dermatite-digitee-grace-au-pediluve-sec

et https://www.reussir.fr/lait/apprenez-reconnaitre-les-cinq-stades-cliniques-de-mortellaro

Détecter régulièrement les lésions

Plus on a de vaches infectées, plus on en infecte d’autres, moins on arrive à s’en sortir. Il faut briser ce cycle avec une guérison très précoce. « On recherche une détection la plus précoce possible pour traiter le plus précocement possible. L’objectif est de revenir à une peau vraiment saine plutôt qu’à une peau apparemment saine qui contient en profondeur des bactéries », explique Raphaël Guatteo. Observer au quotidien les vaches qui boitent n’est pas suffisant pour cette détection très précoce. L’idéal est de passer en revue toutes les vaches en salle de traite, une à deux fois par mois. Une méthode d’observation à l’aide d’un miroir d’électricien et une lampe frontale a été mise au point par Oniris et l’Inra. Elle permet de détecter les lésions et de suivre leur évolution sans avoir à lever le pied des vaches.

« Les génisses doivent faire l’objet d’autant d’attention que les vaches », souligne-t-il. D’après une étude récente, plus elles présentent des lésions avant vélage, plus elles en ont adultes. Elles peuvent être une partie du problème, ramener des lésions actives et contaminer les vaches.

Évitez aussi l’introduction d’animaux porteurs de lésions en dormance, en levant les pieds lors de la visite d’achat.

Le saviez-vous ?

Le tréponème est peu résistant dans l’environnement. Les bovins sont leur propre réservoir. Quand une vache a une lésion, c’est douloureux, elle se lèche, ingère les bactéries, les héberge dans son système digestif et les recycle en permanence via les bouses contaminées.

Et les pédiluves secs ?

Il existe deux types de produits utilisés dans les pédiluves secs.

• Des asséchants type chaux. Le seul essai mené sur Saniblanc litière obtient des résultats équivalents à un pédiluve liquide bien mené, les pieds devant être lavés aussi. Les éleveurs rapportent un passage plus aisé des animaux, moins de peur.
• Des solutions bactériennes (cobiotex, bactivore, podo dry...). Le principe de ces solutions bactériennes est de permettre une colonisation de la peau par des bactéries inoffensives (colonisation de barrière) et ainsi d'empêcher l'installation des pathogènes. " Théoriquement, cela a du sens. Les essais que nous avons menés n'ont pas montré d'effet positif, mais dans nos enquêtes, les pieds étaient lavés avant passage pour identifier les lésions, et traiter le cas échéant. Or, garder un peu de matière organique sur les pieds est nécessaire à l'installation des bactéries, ce qui pourrait expliquer l'absence d'effet. Davantage d'études sont nécessaires sur ces produits ", explique Raphael Guatteo.

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