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« Nous intensifions notre production laitière tout en maîtrisant notre empreinte carbone »

Au Gaec des blanches mesures, la construction d’un nouveau bâtiment combiné à un triplement du cheptel a profondément modifié la conduite du troupeau. Si l’intensification est de mise, elle ira de pair avec une diminution des émissions de gaz à effet de serre.

« Nous intensifions notre production laitière tout en maîtrisant notre empreinte carbone »
© A. Juanchich

Une installation en 2019, un bâtiment tout confort flambant neuf sorti de terre en 2020, deux robots de traite, un cheptel qui grimpe de 40 vaches sur aire paillée à 106 vaches à la traite, une nouvelle unité de microméthanisation… Dans le Pas-de-Calais, depuis l’installation de Maxime, son fils, Olivier Martel a vu sa ferme se transformer radicalement. Et ce n’est pas fini. L’intensification continue mais elle rimera avec une empreinte carbone maîtrisée.

Le duo d’éleveurs a réalisé un diagnostic Cap'2ER en octobre. « Nous voulions situer notre système intensif avec méthanisation », explique Maxime Martel. L’empreinte carbone calculée est de 0,96 kg éq. CO2/l de lait corrigé pour 0,99 kg éq. CO2/l de lait corrigé d’émissions de gaz à effet de serre. Dans la région Hauts-de-France, l’empreinte carbone nette moyenne des exploitations ayant réalisé un diagnostic Cap'2ER entre 2013 et 2019 est de 0,91 kg éq. CO2/l de lait. Elle est de 0,88 kg éq. CO2/l de lait pour les systèmes robot de traite suivis dans le cadre du projet Life Carbon Dairy. Le producteur admet qu’il pensait « faire mieux ». « Mais nous ne sommes pas encore en rythme de croisière », considère-t-il.

Produire encore plus

Si les rendements atteignent déjà 11 000 kg/VL/an, Maxime Martel vise 12 000 kg pour 120 vaches à la traite et un total de 1,5 million de litres de lait produits. La mise en place de cette stratégie conduirait à réduire ses émissions de gaz à effet de serre à 0,73 kg éq. CO2/l de lait corrigé (-0,26). De quelle façon ?

Premièrement, mathématiquement, plus de lait à émissions constantes diminue algébriquement des émissions exprimées par litre de lait. Pour cela, il faut des animaux productifs sans augmenter ni la taille du troupeau, ni le concentré (environ 160 g/l de lait). Après une phase d’accroissement du troupeau où la quantité prime, les éleveurs comptent désormais axer leur sélection vers la production. « Si on veut une bonne empreinte carbone, alors il faut des génisses et des vaches qui produisent, sinon on pollue pour rien », résume Maxime Martel. Un critère actuel de réforme est une production de moins de 15 kg par jour. « Demain, nous irons plutôt vers 20 kg. »

Moins d’animaux improductifs

En plus de faire vieillir leurs vaches pour limiter le taux de renouvellement, abaisser l’âge au vêlage (de 26 mois à 22-24 mois) est également un levier que met en place le Gaec. « Nous nous occupons mieux de nos génisses. » Pour un maximum de précision, elles sont pesées trois à quatre fois par an et sont inséminées lorsqu’elles ont atteint 420 kg.

La ration des génisses a également été améliorée avec le passage au bol mélangeur. Distribuée une fois tous les deux jours, elle est composée de 3 à 4 kgMS d’enrubannage de seigle, 3 kg de paille, 2 kg de canne de maïs et de 0,6 kg de correcteur. « Avant, nous leur donnions du maïs mais il fallait corriger et elles avaient tendance à graisser. Aujourd’hui, elles n’en reçoivent plus jusqu’à la préparation au vêlage. Puis la nouvelle ration est plus rentable », glisse l’éleveur.

« Nous intensifions notre production laitière tout en maîtrisant notre empreinte carbone »
© A. Juanchich

Les conditions sanitaires jouent également sur l’augmentation de la productivité. « Avec le nouveau bâtiment, nous avons moins de mammites (11 en 2022). Les boiteries sont maîtrisées. Nous n’avons quasiment pas de non-délivrances », énumère Olivier Martel. Ensuite, le Gaec mise sur plusieurs leviers qui, « mis bout à bout, réduisent l’empreinte carbone tout en améliorant la productivité et l’économique ».

Des fourrages de qualité

Côté fourrages, les éleveurs recherchent un maximum de qualité. Les maïs sont coupés à 50 cm « afin de concentrer la qualité plutôt que de remplir à tout prix le silo sans faire plus de lait ». Avec seulement 70 hectares, les rotations sont courtes voire très courtes. Les prairies temporaires implantées en légumineuses sont retournées au bout d’un an ; maximum deux ans pour les 4 hectares de terre les plus alcalines. Une grande partie de l’herbe provient de dérobées (ray-grass ou méteil composé de triticale, avoine, pois et vesces). Les coupes sont précoces. Des analyses sont réalisées une fois par an afin d’ajuster au mieux le concentré. L’année dernière, suite à une mauvaise année fourragère, il a fallu augmenter le concentré à 200 g/l de lait. Cette année, l’objectif est le redescendre à 160 g.

Miser sur la fertilisation organique

« Nous intensifions notre production laitière tout en maîtrisant notre empreinte carbone »
© A. Juanchich

Côté fertilisation, avec l’augmentation du troupeau et l’installation d’une unité de microméthanisation en 2021, le Gaec a diminué de 80 % ses achats d’engrais minéraux pour l’ensemble de son parcellaire (culture de blé et betteraves en plus des fourrages). Sur ses prairies permanentes, le plan carbone compte sur une diminution de 150 kg des apports d’azote. Le digestat est désormais épandu avec une rampe à patins qui engendre moins de perte qu’un pendillard, et une répartition plus régulière.

Fiche élevage

Gaec des blanches mesures

125 prim’Holstein
2 associés, 1 salariée à mi-temps et 1 apprenti
Production de 380 000 l en 2017 ; 1,25 Ml en 2021
70 ha dont 10 ha de prairies permanentes, 9 ha de prairies temporaires et 30 ha de maïs, le reste en céréales ou betteraves

Avis d’expert : Léa Boulard, conseillère carbone chez Seenorest

« Un système cohérent »

Léa Boulard, conseillère carbone chez Seenorest
Léa Boulard, conseillère carbone chez Seenorest © Oxygen
« Le système du Gaec des blanches mesures fonctionne bien car il est cohérent. Les éleveurs essayent de ne rien laisser de côté. La conduite de l’élevage est minutieuse. Les rations sont très bien suivies. L’élevage des génisses est bien maîtrisé. Avec le robot, la complémentation est bien gérée au DAC. La méthanisation leur permet de valoriser leur lisier alors qu’ils en ont beaucoup pour peu de surface. »

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