Aller au contenu principal

Les plantes bio-indicatrices, outil de diagnostic du sol

Pour qu’une graine germe, il faut que les conditions d’environnement correspondent aux besoins de son espèce. Véritables bio-indicateurs, les plantes spontanément présentes dans une parcelle sont un levier pour comprendre puis améliorer le fonctionnement du sol.

« Dans toutes les parcelles, il y a une multitude de graines d’espèces différentes, qui peuvent rester en dormance pendant des dizaines d’années, relate Françoise Roger, conseillère en agriculture biologique à la chambre d’agriculture de Bretagne. Certaines lèveront, d’autres pas, selon l’état du sol et son évolution. Comme chacune a son milieu de prédilection pour pousser, les plantes nous donnent des informations sur ce qui se passe dans le sol, ce qui s’est passé et comment il peut évoluer. Ce sont de véritables bio-indicateurs. »

À chaque plante ses spécificités

Le concept de plantes bio-indicatrices a été théorisé par l’agronome Gérard Ducerf. Il a classé toutes les espèces que l’on rencontre en France selon les indications qu’elles donnent sur le milieu : pH, richesse en bases solubles et non solubles, conditions d’oxygénation du sol (tassement), excès ou manque d’eau, richesse en matières organiques d’origine carbonée et d’origine azotée, fossilisation de la matière organique (comme cela peut être le cas dans les sols très tassés dans lesquels, sans oxygène, la matière organique n’évolue plus), lessivage, érosion, blocage de phosphore et de potassium, présence de polluants, activité biologique.

« La présence de telle ou telle plante est une indication de l’état du sol, une alerte sur des potentiels dysfonctionnements à venir. Quand on sait les observer, les plantes nous révèlent les secrets du so», souligne Françoise Roger.

Inventorier la flore

La première étape pour faire des plantes bio-indicatrices un outil de progrès pour comprendre l’état de son sol est de recenser la flore de ses parcelles. Pour une vision « juste », il faut partir d’une parcelle n’ayant pas subi de désherbage chimique ou mécanique, qui aurait modifié la flore.

« Les prairies se prêtent bien au relevé de la flore spontanée, suggère Françoise Roger. L’idéal est de répéter l’opération à chaque saison sauf l’hiver. » En parcourant la parcelle en diagonale, il faut recenser toutes les plantes rencontrées et leur attribuer une note de recouvrement. « Pour celles qui représentent plus de 5 % de recouvrement, ce qui correspond à une espèce suffisamment présente pour être significative, on se reporte au fascicule des conditions de levée de dormance qui attribue à chaque plante ses indicateurs », complète Françoise Roger.

Une grille de collecte synthétise les informations. « Il faut au moins cinq plantes à plus de 5 % de recouvrement pour pouvoir établir un diagnostic. En général, se dégage clairement un profil de sol, souligne Françoise Roger. En discutant avec l’agriculteur, nous faisons le lien avec certaines pratiques. » Ce qui est observé peut être la conséquence de pratiques plus ou moins anciennes.

Par exemple, un travail du sol toujours à la même profondeur va créer une zone de compactage. Pour y remédier, une piste est d’intégrer des plantes à pivot pour fissurer la zone de compactage.

« Les plantes bio-indicatrices sont une approche innovante et complémentaire d’outils comme le profil cultural ou l’analyse physico-chimique, pour comprendre et prendre soin de son sol », encourage Françoise Roger.

Raphaël Cotty, éleveur à Plouigneau, dans le Finistère

« Je comprends mieux la présence des plantes non désirées dans mes prairies »

Producteur bio dans le Finistère, Raphaël Cotty a accueilli une formation « plantes bio-indicatrices » sur son exploitation. « Je suis en bio depuis quatre ans, explique l’éleveur. Dans mes prairies, j’ai quelques plantes non désirées. J’avais envie de comprendre pourquoi elles étaient là, à cause de quelles pratiques. » Avec ses collègues, il a procédé à un inventaire de la flore d’une prairie permanente. « Nous avons trouvé pas mal de plantes indicatrices de tassement, partage Raphaël Cotty. Comme mon bâtiment est un peu juste en places, j’ai tendance à laisser mes bêtes au maximum dehors. De plus, j’avais diminué les apports en calcaire sur prairies. L’évolution de la flore montre qu’il faudrait que je reprenne. » Raphaël Cotty voit dans cette approche un véritable outil de progrès. « Cela m’a éclairé, apprécie-t-il. Reste à trouver les bonnes solutions car il y a beaucoup d’informations à digérer, à analyser, avant d’arriver à déterminer quelle évolution de pratiques serait pertinente. »

Définitions

Exemples de plantes et de leurs indications sur le sol

Pissenlit : engorgement de matière organique animale

Renoncule rampante : hydromorphie

Grand plantain : tassement du sol, anaérobiose

Spergule des champs : lessivage, érosion

Datura : pollution, intoxication du sol

Chardon commun : blocage du phosphore avec asphyxie

Ail sauvage : blocage du potassium avec asphyxie

Coté biblio

« Fascicule des conditions de levée de dormance des plantes bio-indicatrices », de Gérard Ducerf aux éditions Promonature.

Les plus lus

Eleveur veau moins de quinze jours niche individuelle
Veaux laitiers : « Je ne connais ni les diarrhées ni les problèmes pulmonaires »

À la SCEA des vertes prairies, en Seine-Maritime, Nicolas Banville concentre ses efforts sur la préparation au vêlage et la…

Pièce de monnaie
Prix du lait : Sodiaal payera 485 €/1 000 l pour 2023 en conventionnel

En conférence de presse le 4 avril, Damien Lacombe, président de Sodiaal, a annoncé 14,4€/1000 litres de ristournes pour les…

Deux stalles de robot de traite GEA
Robot ou salle de traite, les indicateurs à calculer pour bien choisir

Les tensions sur la main-d’œuvre poussent de nombreux éleveurs à sauter le pas des robots de traite. Pourtant le retour sur…

veaux en igloo individuel
Les bons gestes pour des veaux laitiers en pleine forme dès la naissance

Il n’y a pas une seule et unique recette pour élever un veau. Ce qui est sûr, c’est que les premiers jours sont déterminants…

Éleveuse veaux pouponnière
« J’utilise zéro antibiotique pour élever mes veaux laitiers »

Dans les Côtes-d’Armor, le Gaec Restquelen enregistre 3,3 % de mortalité périnatale sur les quatorze derniers mois. Les…

Yohann Barbe, président de la FNPL élu le 8 avril 2024
Yohann Barbe, nouveau président de la FNPL : « Nous ne devons plus perdre ni litre de lait, ni actif pour le produire »

Yohann Barbe, éleveur dans les Vosges, a été élu président de la FNPL le 9 avril. Il livre sa feuille de route à Réussir Lait…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 100€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir lait
Profitez de l’ensemble des cotations de la filière Réussir lait
Consultez les revues Réussir lait au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters de la filière laitière