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Oiseaux : Combiner différents modes d’effarouchement

Pour réduire l’accoutumance des oiseaux aux effaroucheurs, mieux vaut mixer les effets sonores et visuels, avec une fréquence aléatoire. Les dispositifs doivent être prêts avant l’arrivée des premiers volatiles.

L’effarouchement est un premier rempart pour se prémunir des oiseaux aussi bien dans les champs que les bâtiments. Les étourneaux, les corvidés et les pigeons s’attaquent aux jeunes semis, aux fourrages, souillent la table d’alimentation, percent les bâches de silos et peuvent être sources de contaminations. « Pour faire face à une telle situation, il faut adopter une approche globale en associant le problème à une bonne connaissance du site et de l’oiseau. Il n’y a pas de solution unique, dépeint Maël Peden, de la Fédération départementale des groupements de défense contre les organismes nuisibles du Finistère. Les effaroucheurs agissent sur l’instinct de survie des oiseaux. Le plus important est d’agir tôt en anticipant l’installation des équipements avant l’arrivée des premiers oiseaux. Normalement, au bout de quelques jours, ils comprennent que l’endroit n’est pas accueillant et vont chercher leur nourriture ailleurs. » Cela étant, il y a des situations extrêmes où, au bout d’un certain temps, les oiseaux s’accoutument, quel que soit le dispositif.

1 « L’effaroucheur pyro-optique est le matériel le plus abouti et qui donne les meilleurs résultats », présente le spécialiste. Également appelé effraie, il produit une détonation grâce à un canon à gaz. Chacune des détonations est accompagnée de la propulsion de leurres le long d’un mât de 7 m de haut, qui simulent l’envol d’oiseaux apeurés. De plus, les détonations se déclenchent à une cadence aléatoire pour éviter l’accoutumance. « C’est la combinaison des effets visuel et acoustique, couplée à la surprise, qui permet une bonne efficacité. » L’effraie est simple d’emploi. « Il est recommandé de programmer les détonations à une fréquence de 1 à 3 coups répartis aléatoirement toutes les 15 à 20 minutes. La plage d’intervention (de 8 h 30 à 17 h par exemple) est également programmable. » L’effraie coûte environ 1 400 euros.

En exploitation, l’idéal est de trouver l’endroit stratégique entre le site de perchage (ligne électrique, haie d’arbres, toit…) et le lieu d’alimentation des oiseaux (silo, table d’alimentation…). Il faut aussi veiller à ce que le matériel n’entrave pas la circulation des engins agricoles avec les haubans. « Au champ, selon la configuration de la parcelle, l’effraie peut protéger une parcelle de 2 à 3 hectares s’il est placé dans un endroit bien visible. »

 

2 Les canons à gaz simples émettent uniquement des détonations. Ils peuvent fonctionner sur panneaux solaires, et/ou batterie. « Mieux vaut privilégier des tirs selon une cadence aléatoire. Les canons tirant des coups à intervalles réguliers ou rapprochés (moins de 3 min) provoquent une accoutumance et perdent toute efficacité. » Le rayon d’efficacité est de 2 à 4 hectares.

 

3Lesballons et cerfs-volants offrent une protection ponctuelle à court terme. Ils ont l’avantage d’être peu coûteux, légers et faciles à mettre en œuvre. « Ils sont utilisables sur une courte durée, par exemple si l’année est favorable avec des conditions de levée rapide des cultures. » Les ballons fonctionnent à l’hélium. Les cerfs-volants s’installent sur des mâts de 7 m de haut. Ce mode d’effarouchement nécessite de changer régulièrement d’emplacement. Mieux vaut choisir un modèle le plus mobile possible et l’associer avec d’autres types d’effaroucheurs. Leur efficacité dépend du vent. Certains volent dès 2 à 3 km/h de vent. L’usage est proscrit avec un vent de plus de 30 km/h. Un cerf-volant peut protéger 2 hectares en terrain dégagé contre les corvidés. « L’effet est moins évident contre les étourneaux. » 

 

4 Les lasers et flash lumineux repoussent les oiseaux à l’aide d’éclairages très puissants, le faisceau étant perçu comme un danger physique. Il existe des lasers portatifs type pointeur d’astronomie (25 €) et des lasers fixes à tête rotative. Le faisceau en mouvement crée un effet de contraste. Les faisceaux verts sont plus efficaces que les rouges. « Ils peuvent se révéler efficaces contre les étourneaux s’ils sont combinés à un effaroucheur sonore, type pistolet par exemple. »

 

5 Les pistolets d’alarme et lance-fusées permettent de tirer des fusées à action différente. Les cartouches sifflantes produisent tout au long de leur trajet un sifflement strident. Tandis que celles à détonation filent d’abord silencieusement puis explosent dans le ciel à proximité des bandes d’oiseaux. Ces cartouches produisent une explosion aussi puissante que celle d’un effaroucheur. Ce système revient à 100-150 euros le pistolet, 50-60 euros le lot de 100 amorces et 100 fusées. « Avec un minimum de disponibilité de l’éleveur et le respect de quelques règles simples, cet équipement peut donner de bons résultats. Mais il faut intervenir dès le début de l’hivernage et tirer des fusées le matin dès l’arrivée des oiseaux. »

 

6 Le synthétiseur de cris comporte des haut-parleurs et une centrale diffusant des cris d'oiseaux naturels, des cris de détresse et des cris de prédateurs d'oiseaux. Il est possible de paramétrer les types d'oiseaux à effrayer, de configurer le mode de lecture, ainsi que son fonctionnement le jour, la nuit ou 24h/24. « Mais attention, des émissions trop systématiques pénalisent l’efficacité. Et un cri de détresse est très précis. Mal reproduit, il ne fonctionne pas, alerte Maël Peden. Le CD Orthifuga (25 €), créé par l’Inra, en se basant sur les stimuli et les réactions des oiseaux, est très bien fait. »

 

7 Le drone effaroucheur, à l’apparence de faucon battant des ailes, joue sur le biomimétisme des prédateurs. Des prestations de service sont proposées car le pilotage du drone est complexe. La simulation de chasse avec accélération des battements d’ailes, prise d’altitude, encerclement et pic sur les oiseaux nécessite des compétences de pilotage. Le vol du drone doit se faire matin et soir pendant plusieurs semaines. Étant donné le coût d’utilisation de cette technologie et son rayon d’action de 2 à 3 km2, les prestations sont plutôt destinées à un collectif d’agriculteurs. 

 

8 L’intervention d’un fauconnier nécessite aussi plusieurs passages. Ce dernier se déplace sur les lieux avec un rapace, élevé en captivité. Cette pratique n’est pas forcément la plus adaptée en élevage car la méthode est onéreuse et le nombre de spécialistes réduit.

Limiter aussi l’invasion des bâtiments

« Si les oiseaux sont déjà entrés dans le bâtiment, on a déjà perdu une bataille, concède Maël Peden, de la FDGDon du Finistère. Je recommande de concentrer les efforts pour éviter qu’ils ne s’approchent du bâtiment grâce aux effaroucheurs plutôt que de chercher à rendre le bâtiment hermétique. C’est peine perdue ! » Les étourneaux sont très petits, il suffit d’un trou de 3 cm pour qu’ils se faufilent et rentrent les uns derrière les autres dans la stabulation ! Pour limiter ce phénomène, il est conseillé d’installer des grilles au faîtage, des peignes plastiques sous les ondulations de fibro au niveau de la tablière, des bavettes sous les portails et latéralement sur le côté des coulissants, et des filets à oiseaux à grosses mailles (2 cm x 2 cm) dans les bâtiments semi-ouverts. « Certains éleveurs ont aussi bricolé des bandes de caoutchoucs flexibles à partir de tapis de carrière qu’ils ont fixés sur les portails au niveau des passages de racleurs », mentionne Jacques Charlery du GIE lait-viande de Bretagne. Attention aussi à maintenir une ventilation suffisante !

Avis d’expert : Maël Peden, de la FDGDon du Finistère

« Un calvaire quotidien pour les éleveurs »

« Les éleveurs se sentent impuissants face aux oiseaux qui envahissent leur exploitation. En particulier les étourneaux. Le sentiment de ne pas maîtriser ces intrus est stressant. Endurer leurs cris du matin au soir et supporter les fientes sur la table d’alimentation, les abreuvoirs et le matériel crée une pression continuelle. C’est usant moralement ! En janvier, nous recevons généralement un flux d’appels car les éleveurs concernés sont à bout de nerf et redoutent la transmission d’agents pathogènes. Les étourneaux sont un fléau, mais d’un point de vue sanitaire, il est préférable d’avoir 1 000 étourneaux sur sa ferme pendant les trois mois d’hiver que 10 pigeons ayant élu domicile sur l’exploitation 365 jours par an. Ces derniers présentent plus de risque vis-à-vis des salmonelles. »

« Nous avons éliminé plus de 700 pigeons dans un élevage »

Dans le Finistère, la FDGDON a employé les grands moyens pour venir à bout d’une invasion de pigeons.

Au départ, il n’y avait que quelques pigeons domestiques dans les bâtiments. Rien d’inquiétant a priori. Mais en quelques années, leur nombre a évolué de façon exponentielle. « Dans une ferme, les pigeons ont à la fois le gîte et le couvert. Un couple de pigeon peut avoir jusqu’à 10 à 12 descendants par an », explique Maël Peden, technicien à la Fédération départementale des groupements de défense contre les organismes nuisibles du Finistère (FDGDon 29). Les dégâts dans les silos de maïs, tables d’alimentation et abreuvoirs sont importants. Le pigeon est par ailleurs vecteur de maladies (salmonellose). Une intervention s’impose. « Le piégeage est compliqué à réaliser dans une exploitation agricole. Nous avons donc choisi de les éliminer avec des carabines à air comprimé et des projectiles en plomb. Cet équipement n’a pas d’impact sur les infrastructures du bâtiment et ne produit pas d’étincelles. On peut donc intervenir même en présence de paille sans risquer de déclencher un incendie. »

Acquisition d’une carabine à air comprimé

Avec plusieurs centaines de pigeons dans les bâtiments, la FDGDon 29 n’a pas d’autres choix que d’employer les grands moyens. « Nous sommes intervenus à quatre et de nuit parce que les pigeons se déplacent moins facilement. » Lors de la première intervention, plus de 600 pigeons ont été abattus entre 21h et 5h du matin. Deux mois plus tard, une seconde opération avec deux tireurs a permis d’en éliminer 150 de plus. Il faut compter 250 à 300 euros pour une intervention d’une durée de 1h30 avec deux techniciens.

En l’absence de méthode de prévention efficace, la FDGDon 29 propose ensuite soit de passer régulièrement dans l’élevage, mais c’est une solution assez coûteuse, soit de faire l’acquisition d’une carabine (345 € carabine et mallette équipée). « Réglementairement, le pigeon féral est considéré comme un animal de basse-cour ; il n'a pas de statut dans le Code de l'environnement. Il est la propriété du site qui l'héberge. Il peut donc être détruit toute l'année par tout moyen. Même sans permis de chasser, un éleveur peut le réguler lui-même avec une carabine à air comprimé de faible puissance (moins de 20 joules). »

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