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[Changement climatique] Le sorgho suscite beaucoup d’intérêt et de questions

Ses aptitudes à mieux résister que le maïs au stress hydrique et thermique poussent le sorgho sur le devant de la scène. Mais le scénario idéal reste à écrire.  

Les essais pluriannuels d’Arvalis portent sur des sorghos fourragers monocoupes type ensilage parce qu’ils ont une valeur alimentaire proche de celle du maïs.  © A. Uijttewaal-Arvalis
Les essais pluriannuels d’Arvalis portent sur des sorghos fourragers monocoupes type ensilage parce qu’ils ont une valeur alimentaire proche de celle du maïs.
© A. Uijttewaal-Arvalis

Dans une stratégie de diversification fourragère pour répartir les risques, l’emploi du sorgho a du sens. Idem si l’on recherche à intensifier sa production fourragère en cultivant des dérobées comme du méteil ou du RGI. « La date de semis du sorgho (mi-mai) permet de récolter deux fois les intercultures. Attention toutefois à ne pas l’exposer à des problèmes d’implantation par une trop forte utilisation de l’eau du sol par les dérobées », prévient Anthony Uijttewaal, ingénieur Arvalis.

Le sorgho a une capacité à rebondir même après un gros stress hydrique. Ce n’est pas le cas du maïs si la sécheresse intervient au moment de la floraison. Le rendement reste pénalisé même s’il bénéficie de pluies tardives. « Le sorgho ayant la réputation d’être plus résistant que le maïs au stress hydrique et dans une moindre mesure au stress thermique, on nous adresse beaucoup de questions mais nous n’avons pas aujourd’hui toutes les réponses », poursuit-il.

Lire aussi : La silphie, une plante d'avenir pour faire des stocks ?

La question la plus fréquente est de savoir si le sorgho peut compléter ou se substituer en partie à l’ensilage de maïs sans pénaliser les performances zootechniques. Dans cette optique, les variétés de sorghos fourragers monocoupes sucriers de la classe ensilage tirent leur épingle du jeu. Elles sont plus riches en énergie que les variétés multicoupes (NDLR qui s'apparentent plus à de l'herbe que du maïs). Et comme elles sont également assez pauvres en amidon, en particulier les variétés sans grain, ces sorghos complètent très bien les rations à base d’ensilage de maïs. « Il est possible de substituer jusqu’à 50 % d’ensilage de maïs par ces sorghos sans nuire aux performances des vaches. Une synthèse de cinq essais a en effet montré que la baisse de production de l’ordre de 3-4 % est compensée par une hausse du TB d’environ 6-7 % », précise Hugues Chauveau, ingénieur Arvalis.

Le sorgho valorise bien les pluies de fin d’été

Là où les choses se corsent, c’est sur le volet agronomique. Est-il envisageable de cultiver cette espèce tropicale dans les régions situées au nord de la Loire ? Faute d’études récentes, les dernières remontant à la fin des années 1980, il va falloir patienter un peu pour obtenir des réponses. Arvalis s’y emploie depuis 2020 avec la mise en place d’essais pluriannuels visant à comparer les rendements du maïs avec ceux du sorgho monocoupe. Ils sont notamment réalisés dans l’Ouest et le Grand Est.

Côté bémol, « le maïs et le sorgho ayant des cycles culturaux un peu décalés, nous ne comparons pas les espèces mais la conduite de deux cultures fourragères estivales », précise Anthony Uijttewaal.

Les essais de 2020 ont cependant permis de tirer des premiers enseignements. « Le rendement du sorgho a été inférieur ou équivalent au maïs. Le maïs a en effet bénéficié d’un gros effet d’esquive l’année dernière alors que le sorgho a pris de plein fouet le stress estival en Pays de la Loire et Sud Bretagne. » Cet essai a aussi confirmé la capacité du sorgho à bien valoriser les pluies de fin d’été. Reste à savoir comment il se serait comporté sans ces pluies.

Difficile d’atteindre un taux de matière sèche suffisant

L’un des défis majeurs à relever est d’arriver à récolter un ensilage à 28-30 % de matière sèche, une condition a priori nécessaire pour assurer une bonne conservation et valorisation du fourrage par les animaux. Cette difficulté monte d’un cran quand on utilise des variétés de sorghos monocoupes sans grain (mâles stériles ou photopériodiques sensibles) qui sont plus tardives que les sucrières avec grain. « Même avec une offre en températures importante comme dans le Sud, les sorghos sans grain peinent à atteindre, voire n’atteignent pas le seuil des 28-30 %. » Les pertes à la conservation peuvent cependant être limitées en stockant le sorgho sur d’autres fourrages plus secs (maïs fourrage, couche de foin/paille). Mais cela implique parfois de débâcher un silo.

De leur côté, les variétés ensilage avec grains sont plus précoces et peuvent donc atteindre en théorie plus facilement la barre des 28-30 % de matière sèche, en particulier au nord de la Loire. « Leur amidon est généralement moins bien valorisé que celui du maïs fourrage car les équipements de récolte n’ont pas la capacité d’éclater correctement les grains de sorgho », expose Hugues Chauveau.

Des mélanges de variétés grains et sans grains sont parfois préconisés sur le terrain. L’objectif est de limiter le risque de verse et d’obtenir un taux de matière sèche suffisant sans trop diluer la valeur énergétique du fourrage récolté. Par ailleurs, il existe un réservoir de ressources génétiques. Si la demande est là, les entreprises semencières s’investiront davantage dans la sélection pour aller rechercher de la productivité tout en gardant les caractéristiques agronomiques et nutritionnelles actuelles du sorgho.

À savoir

Dans le cadre du nouveau Plan protéines, des essais vont être menés en 2021 et 2022 par Arvalis et l’Idele pour étudier différentes cultures fourragères d’été, dont le sorgho en pur ou associé avec des légumineuses (lablab et cowpea inoculés, trèfle d’Alexandrie…)

Des comparaisons maïs/sorgho compliquées

« La stricte comparaison est illusoire pour plusieurs raisons. On ne peut en effet pas comparer les différences de rendements entre deux cultures ayant des cycles décalés. Le maïs a une capacité à être semé environ un mois avant le sorgho. Un mois pendant lequel la plante fait de l’enracinement et peut donc miser sur une stratégie d’esquive face au stress hydrique. En revanche, en étant semé mi-mai, le sorgho a une exposition au risque plus importante, mais on peut intensifier la production de fourrage à l’interculture précédente », explique Anthony Uijttewaal.

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