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Le diesel, dans le collimateur de l’État
Ces derniers jours, la décision d’avoir orienté la France vers le tout gazole a été sérieusement remise en question.
Un débat qui touche la production de biodiesel hexagonale, puisque, pour rappel, le gazole à la pompe dans les stations services en contient 7 %. Les critiques ont émané d’un référé de la Cour des comptes du 17 décembre 2012, sur les dépenses fiscales rattachées à la mission écologique, aménagement et développement durables et celles relatives à l’énergie. Texte que souligne que certaines de ces dépenses « répondent davantage au souci de préserver des secteurs d’activité qu’à des objectifs environnementaux », et notamment le différentiel de taux de TIC (taxe intérieure de consommation) entre l’essence et le gazole. Ce dernier est aujourd’hui d’environ 0,18 €/l et a fortement favorisé la diésélisation du parc automobile français. N’étant pas inscrit dans les dépenses fiscales, ce différentiel génèrerait une perte de recettes de 6,9 à 8 Md€, selon la Cour des comptes. Elle préconise aujourd’hui un alignement de la fiscalité du diesel sur celle des supercarburants pour plusieurs raisons. « En raison des progrès réalisés dans la conception des moteurs à essence, le différentiel de consommation de carburant entre les véhicules à essence et gazole neufs n’est plus si important, à respectivement 5,1 l/100 km et 4,8 l/100 km, selon l’Ademe. » De plus, « les émissions de CO2 sont du même ordre entre les deux types de véhicules, mais le contenu en CO2 par tonne équivalent pétrole est supérieur pour le diesel. Le différentiel de taux en faveur du gazole va à l’encontre des objectifs du plan Particules adopté en juillet 2010. »
Le 22 février 2013, la ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, Delphine Batho, répondait au référé de la Cour des comptes, critiquant le différentiel de taux de TIC entre l’essence et le gazole. Ce différentiel faisait partie de l’objectif français de « réduire les consommations de carburants dans le secteur du transport routier afin d’améliorer la sécurité, l’approvisionnement et l’indépendance énergétique de la France ». Mais « l’impact sanitaire des émissions de particules des moteurs diesel impose aujourd’hui de reconsidérer ce choix ». Et d’ajouter : « Quelque 40.000 décès prématurés par an en France seraient attribués aux particules diesel, reconnues cancérigènes par l’OMS depuis juillet 2012. » Cependant, cela est essentiellement dû aux vieux véhicules diesel, au nombre d’environ 7 millions, soit 27 % du parc français en circulation.
« Les données prises en compte dans le rapport de la Cour des comptes sont anciennes, pour d’anciens véhicules. Aujourd’hui, tous les nouveaux véhicules diesel sont équipés de systèmes de post-traitement », reproche Gaël Petton, responsable communication pour Diester. « La filière biodiesel soutient ses partenaires motoristes dans leurs efforts pour améliorer la qualité de l’air. » Il affirme également : « Le diester ne contient pas de souffre, et participe à réduire le rejet de particules, une fois incorporé dans le gazole. »
Néanmoins, Delphine Batho rappelle que, depuis 2005, la France ne respecte pas la limite réglementaire de l’UE en matière de qualité de l’air. « Un contentieux communautaire pourrait prochainement entraîner des sanctions de 100 M€ par an à partir de janvier 2014. »
Indécision sur les solutions à mettre en place
Pour ces raisons, le ministère de l’Écologie est pour une convergence progressive des fiscalités de l’essence et du diesel.
La possibilité d’une prime à la casse pour les vieux véhicules diesel, évoquée en fin de semaine dernière, a été rejetée par Arnaud Montebourg, qui veut absolument éviter de pénaliser les constructeurs automobiles français. Sur ce point, les deux ministres semblent s’accorder. Mais il est également contre une fiscalité pénalisante sur le diesel, le parc automobile hexagonal étant composé à 60 % de véhicules diesel. Les ministres pencheraient plutôt pour une prime à la reconversion, mais difficile de savoir ce que cela impliquera concrètement.
Matignon a indiqué qu’aucun changement de fiscalité ne serait envisagé avant le projet de Loi de finances 2014, mais les opérateurs de la filière gazole restent sur leur garde.