La recherche teste un suivi des truies gestantes par caméras dans des élevages Cirhyo
L’Inrae et l’Ifip ont développé avec l’entreprise Dilepix un outil de détection du comportement des truies gestantes par caméras. L’objectif est de mieux calculer leurs besoins alimentaires et d’évaluer leur bien-être et leur santé.
L’Inrae et l’Ifip ont développé avec l’entreprise Dilepix un outil de détection du comportement des truies gestantes par caméras. L’objectif est de mieux calculer leurs besoins alimentaires et d’évaluer leur bien-être et leur santé.




Des caméras pour suivre les truies, piloter l’alimentation et suivre de manière automatique le bien-être animal et la santé des animaux, tel était l’objectif annoncé par l’Iinrae, accompagné de l’Ifip, de la société Dilepix et de la coopérative Cirhyo, dans le projet SoMove financé par le Casdar.
En se basant sur les nouvelles possibilités offertes par l’intelligence artificielle et la réduction du coût des caméras et ordinateurs de calcul, la détection automatique des truies, leur posture, leur localisation et leur orientation est envisageable en élevage. Les applications sont multiples : ces données d’activité permettent de déterminer le niveau d’activité quotidien de chaque animal pour ajuster précisément les rations distribuées par les automates d’alimentation, en complément des informations de poids et d’épaisseur de lard dorsal de début de gestation. Les données de localisation et d’orientation des animaux offrent, quant à elles, la possibilité de définir des indicateurs comportementaux des truies visant à caractériser leur santé et leur bien-être.
Valider les données de la recherche
À l’issue de la première phase du projet réalisée à la ferme expérimentale de l’Inrae à Saint Gilles et à celle de l’Ifip à Romillé (Ille et Vilaine), les résultats des algorithmes de détection automatiques des truies et des caractères recherchés se sont avérés satisfaisants. Il était cependant indispensable de les valider et de les consolider sur le terrain. C’est à cette étape que la coopérative Cirhyo est intervenue. En effet, comme pour tout développement d’algorithmes et plus particulièrement ceux qui sont basés sur de l’apprentissage automatique, il est essentiel de tester les résultats et de valider les briques technologiques dans des contextes différents de ceux de l’apprentissage., Cinq élevages du groupement ont été sélectionnés selon plusieurs critères : les truies devaient être identifiées par une puce RFID, pour faire le lien entre l’identifiant caméra et celui RFID au niveau du nourrisseur. Ensuite, la taille des cases et la hauteur sous plafond devaient varier d’un élevage à l’autre, afin de valider les données dans des environnements différents (nombre de truies par case, cloisons pleines ou ajourées, plafond plat ou grand volume, système de ventilation, …). Les critères de surface et de hauteur étaient également liés à des contraintes matérielles : il fallait que les caméras puissent couvrir plusieurs cases dans leur totalité pour suivre les truies en continu.
Synergie entre la recherche et le terrain
L’intérêt de cette collaboration entre les instituts de recherche et des éleveurs est double. D’une part, elle permet d’avoir des outils suffisamment fiables et robustes pour être utilisables sur le terrain. D’autre part, elle facilite la diffusion des résultats des projets de recherche directement vers les acteurs concernés (coopératives, éleveurs, équipementiers, …). Le projet SoMove est un exemple remarquable de ce mode de fonctionnement, avec des tâches bien réparties et des échanges fluides : Cirhyo a fourni une liste d’élevages intéressés pour participer au projet et leurs caractéristiques ; Dilepix a sélectionné les élevages selon les contraintes techniques inhérentes au projet ; l’Inrae a fourni le matériel nécessaire aux installations ; l’Ifip et Cirhyo se sont rendus dans les élevages choisis pour installer le matériel, expliquer le projet, enregistrer les données et démonter le matériel. Et enfin, les éleveurs ont accepté et pris le temps de recevoir les intervenants et les ont accompagnés pour l’installation du matériel et le suivi des enregistrements.
Des éleveurs impliqués
L’élément clé de ce type de projet est l’implication des éleveurs. Sans les données collectées dans leurs élevages, impossible de valider l’outil testé. Du côté des chercheurs, l’objectif était d’enregistrer ces données de la manière la moins intrusive possible, dans des locaux non prévus pour l’installation de caméras ou d’enregistreur vidéo. Une fois sur place, il a fallu trouver des solutions pour la mise en place de matériel peu commun en élevage, sans perturber son fonctionnement. Le travail des animaliers et la conduite des animaux ne devaient pas être modifiés pour avoir des résultats correspondants à la réalité du terrain. Après une semaine d’enregistrement en continu, le matériel a été démonté et les images ont été analysées en dehors des élevages. Les performances de l’outil obtenues sont, comme attendus, moins bonnes que celles qui avaient été mesurées dans les élevages expérimentaux de l’Ifip et de l’Inrae. À titre d’exemple, la F-mesure (1) de détection des truies dans l’image chez les éleveurs Cirhyo est de 0,77 contre 0,91 dans l’élevage Ifip. La F-mesure moyenne de détection des postures est de 0,50 contre 0,70. Cependant, ces valeurs cachent une grande hétérogénéité d’un élevage à l’autre, allant, respectivement, de 0,61 à 0,96 et de 0,35 à 0,70. L’objectif est maintenant d’expliquer ces variations et de continuer à améliorer l’outil pour un fonctionnement optimal dans tous les contextes.
Johan Thomas, johan.thomas@ifip.asso.fr
Vers une utilisation en routine en élevage
Johan Thomas, Ifip-Institut du porc
"À terme, cette technologie pourrait être intégrée dans les élevages en tant que matériel fixe et pérenne, à l’image des DAC. L’installation comprendrait des caméras dans les salles et l’outil informatique traitant les données dans un bureau. Les données générées seraient automatiquement transmises au logiciel de pilotage des automates d’alimentation pour piloter la ration. Quant aux données de comportement et de santé, celles-ci pourront être transmises à l’éleveur par un outil de pilotage d’élevage. Actuellement l’Ifip et l’Inrae poursuivent son développement afin d’améliorer le suivi individuel et la robustesse du modèle".