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[Génétique] « Le croisement a permis de diminuer notre charge de travail. »

Le Gaec du Truchet, dans l’Ain, a recours au croisement laitier trois voies Procross pour le renouvellement du troupeau et au croisement viande avec de la semence sexée mâle sur les moins bonnes vaches.

Au début des années 2000, le troupeau du Gaec du Truchet était constitué à parts égales de Montbéliardes et de Prim’Holstein. Confrontés à un agenda très chargé, les trois associés - Michel Pivard, son frère Jean-Louis et sa belle-sœur Okka – ont décidé de modifier en profondeur leur système. « Mon frère et moi avons des responsabilités professionnelles. Nous sommes souvent partis. Cela nous a poussé à déléguer le suivi du troupeau à un salarié et à changer notre système d’élevage », précise Michel Pivard(1).

Le changement de cap s’est fait en deux grandes étapes. La première a eu lieu en 2005. Le Gaec a investi dans un robot de traite. N’ayant pas assez de parcelles disponibles pour faire pâturer les vaches, les associés ont opté pour une conduite en zéro pâturage.

Des croisées Holstein x Montbéliarde x Viking Red

La moyenne d’étable est passée progressivement de 6 500 kg lait sans complémentation individuelle en salle de traite à plus de 8 500 kg (56 vaches traites en moyenne) avec 100 à 150 g de concentré par litre de lait.

Cette évolution a incité les éleveurs à mettre l’accent sur la rusticité des vaches. « Nous voulions apporter plus de solidité et de résistance à nos animaux. » L’idée du croisement refait surface pour se concrétiser en 2008. « Suite à des voyages au Royaume-Uni au début des années 1990, puis au Canada et aux USA, j’avais constaté que le croisement laitier trois voies donnait de bons résultats », indique Michel Pivard.

Le choix s'est porté sur le croisement Procross : Holstein x Montbéliarde x Viking Red. « Avant de faire le choix des races, il faut bien analyser et réfléchir à ce que chacune d’elle apporte. Et ce n’est pas parce qu’on fait du croisement qu’il faut arrêter de travailler la génétique du troupeau », prévient-il.

Une production comparable à celle d’une Montbéliarde

Un système rotatif avec trois races en partant d’un troupeau mixte Holstein et Montbéliarde n’est pas simple à gérer. « Il vaut mieux ne pas se fier aux couleurs pour faire les accouplements, souligne l’éleveur avec humour.« Les outils de management de troupeau sont très utiles pour faire le point sur la généalogie des animaux et respecter la rotation entre les trois races. »

Après douze ans d’expérience, le bilan est positif. « Les performances de production (8 840 kg à 39,8 g/kg de TB et 32,9 g/kg de TP en 2019) sont comparables à celles d’une Montbéliarde. » Avec un intervalle vêlage-vêlage de 395 jours et un taux de réussite en première insémination de 58 % pour les vaches, les résultats de reproduction sont plutôt bons. « Comme nous avons investi dans des colliers pour détecter les chaleurs, il est difficile de savoir quelle est la part imputable à l’équipement et au croisement dans ces résultats. » Les génisses croisées sont également plus précoces (vêlage à 30 mois), estime l’éleveur. 

La couleur des veaux n'est pas forcément attractive

Les frais vétérinaires ont baissé, malgré l’augmentation de la production par vache. « Nous voyons clairement l’impact positif du croisement sur la rusticité des animaux. » Côté bémol, Michel Pivard incite à veiller au maintien de la taille des animaux. « Avec la race Viking Red, si on ne fait pas assez attention, on peut avoir tendance à diminuer le gabarit des animaux. »

Par ailleurs, les veaux mâles issus du croisement laitier sont difficiles à valoriser. « Leur couleur n’est pas forcément attractive. Ils se vendent moins bien que des Montbéliards à morphologie équivalente, mais 30 à 40 euros de plus qu’un Prim’Holstein. »

(1) Michel Pivard est intervenu lors d’un webinar dédié au croisement, organisé le 3 septembre par Eilyps.

Des semences sexées mâles sur les moins bonnes vaches

Afin de mieux valoriser les veaux vendus à 2 - 3 semaines, les éleveurs ont recours au croisement viande avec des taureaux charolais sur une quinzaine de vaches. « Nous sommes dans une région où il y a de la demande pour des croisés Montbéliards x Charolais. Nous utilisons des paillettes sexées mâles à 40-45€ la dose sur les vaches dont on ne veut pas garder la descendance », précise Michel Pivard. Ce type de croisement concerne une petite dizaine de vaches par an.

Le Gaec achète également une quinzaine de doses de semences sexées femelles pour assurer le renouvellement du troupeau. « Nous avons remplacé notre ancien salarié par un autre il y a un an et demi pour améliorer le suivi de troupeau. Cela nous a permis de diminuer le taux de renouvellement. »

La baisse du taux de renouvellement en dessous de la barre des 30 % s’est soldée par un excédent de femelles cette année. Une demi-douzaine de génisses prêtes à vêler âgées de 2 ans à 2 ans et demi ont été vendues depuis cet été au prix moyen de 1 100 euros. « Le club des acheteurs de femelles croisées s’agrandit », constate avec satisfaction Michel Pivard. Une tendance confirmée par Loïc Quéméré sur la zone d’Eilyps (Ille-et-Vilaine).

Avis d'expert : Loïc Quéméré, directeur technique d’Eilyps

« Une stratégie à long terme »

« Quand on se lance dans le croisement, il faut bien réfléchir en amont à ses propres enjeux. On ne peut pas y aller qu’à moitié ou alors on verra peu les effets bénéfiques du croisement. C’est une stratégie à long terme. Cela prend trois ans pour qu’un animal croisé intègre le troupeau. Et neuf ans pour que le troupeau laitier soit complètement croisé. Il est également nécessaire de poursuivre un travail de sélection génétique par les voies femelle et mâle. Et il faut être méthodique dans les accouplements pour bénéficier des effets d’hétérosis. »

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