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Melon - Val de Loire
Vers une réduction des pesticides sur les melons

L’EARL Des Noisetiers fait partie des fermes pilotes Ecophyto 2018. A ce titre, l’exploitation a travaillé sur un indice de fréquence de traitement (IFT) et va tester le couvert végétal pour limiter le désherbage.

Depuis 1992, Jean-François Dabilly et son épouse Jacqueline, d’abord éleveurs de vaches laitières, se sont reconvertis dans les grandes cultures sur 80 ha, le travail à façon sur 70 ha en reconversion bio depuis 2010 et la production de melons sur 50 ha. Installée à Thuré près de Châtellerault, adhérente du Syndicat des producteurs de melons du Haut-Poitou, Jacqueline Dabilly a cédé sa place d’associée en 2009 à ses deux anciens salariés, Tony Thibault et Alexandre Henault. Les melons sont commercialisés sous la marque Val de Sérigny, le conditionnement étant réalisé par les producteurs eux-mêmes. Dès le départ, la démarche de l’ancien éleveur a été de réduire la part des pesticides dans son mode de culture, d’abord dans les céréales puis dans les melons. « Les marges financières s’en trouvent le plus souvent améliorées et je pense que l’environnement et la santé aussi. Nous sommes d’ailleurs bien conscients qu’à l’avenir nous devrons travailler avec peu de molécules chimiques disponibles sur le marché. De toute façon la réduction des phytos est une forte demande de la société, demande que nous devons respecter », indique Jean-François Dabilly.

Un appui technique indispensable
L’adhésion en 2000 à un groupe Civam céréales, Centre d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural, et les expérimentations pour réduire les intrants, a eu un gros impact sur l’activité melon. « Au fur et à mesure que nous avons acquis de l’expérience sur le blé, nous l’avons retranscrit par petites touches sur le melon », relate-t-il. Les efforts entrepris par le Civam céréales se trouvent récompensés aujourd’hui. L’EARL Des Noisetiers, l’entité juridique sous laquelle sont régis les trois producteurs, est l’une des neuf structures du Civam à être désignée ferme pilote Ecophyto 2018. L’exploitation adhère aussi au groupe Cap Légumes de la Chambre d’agriculture d’Indre-et-Loire animée par Isabelle Devant. Ainsi le plan de fumure est élaboré par l’animatrice en s’appuyant sur les résultats des prélèvements de terre effectués sur les parcelles pour déterminer les reliquats d’azote avant la plantation. « Le concept est calqué directement sur les pratiques en céréales. Ce bilan nous permet ainsi de réduire l’élément azoté de plus de 30 % face aux pratiques les plus intensives », affiche sereinement Jean-François Dabilly. La démarche est identique pour la lutte contre les ravageurs et les maladies. Depuis de nombreuses années, les producteurs de Thuré mettent tout en œuvre pour limiter le développement des champignons comme de faibles doses d’azote ou des variétés tolérantes. Respectant le cahier des charges du Syndicat des producteurs du Haut-Poitou, ils ont de toute façon un choix restrictif de variétés et ne retiennent que celles qui ont une qualité nutritive adéquate. « Nous avons cru au mouton à cinq pattes avec l’arrivée sur le marché de la variété Grandalf, affirme Tony Thibault. De bonne qualité, de bon calibre, d’une précocité intéressante, nous avons eu la désagréable surprise de constater qu’elle était sensible au champignon sclérotinia. Nous l’avons tout de même conservée en la plantant plus tardivement et non plus en petit tunnel comme pour les plus précoces. Ainsi, nous résolvons 70 % des problèmes de sclérotinia avec cette variété. »
« En 2008, l’enseigne Carrefour a demandé un audit environnemental. Notre conseillère de Cap Légumes a donc réalisé le calcul d’indice IFT (1), c’est-à-dire l’indice de fréquence de traitement mis en place suite au Grenelle de l’environnement ». Résultat, les indices varient du simple au double pour les douze producteurs adhérents. « Nous nous situons en bas de la fourchette, tout en obtenant les meilleurs rendements, se réjouissent les producteurs. Avec un Ecophyto melon, nous serions sûrs d’être dans les clous ! » Toutefois, sur le plan financier, l’impact de l’IFT est nettement plus important en céréales qu’en melon.

Une conduite parfois à risque
Ce sont en fait les exploitations qui possèdent les plus petites surfaces qui ont les meilleurs bilans. « Avec un périmètre plus restreint, l’habitude d’observer nos cultures dans les champs nous fait réagir rapidement quand une maladie se déclare, commente Tony Thibault. Nous ne traitons ou faisons traiter bien souvent que les parcelles qui sont vraiment affectées. » C’est l’une des façons de réduire les doses de pesticides. Mais la démarche n’est pas sans risque. Un concours de circonstance l’an passé a fait chuter fortement les rendements. Dans une parcelle assez riche en reliquats azotés, un passage pluvieux a favorisé le développement du champignon cladosporiose sur une variété à floraison groupée et fragilisée au moment de la nouaison. « La variété aurait eu une floraison étalée, détaille Tony Thibault. Les dégâts auraient été moindres. En outre, nous nous sommes fiés aux expériences passées sans toutefois utiliser les mêmes molécules. Le premier traitement à base de mancozèbe (2) aurait dû être complété une quinzaine de jours après. Ce que nous n’avons pas fait, estimant que le risque était faible. Normalement, les traitements sont réalisés le plus souvent avec du chlorothalonil (2), une molécule dont le nombre de traitements est désormais limité dans les cahiers des charges. » Les trois producteurs pourraient aller beaucoup plus loin dans leur démarche. Mais ils sont limités par le fait que leur production de melons est réalisée en co-production avec d’autres agriculteurs de la région, dans un rayon de 10 km. « Le cahier des charges du Syndicat exige que dans une parcelle une durée de cinq ans soit instaurée entre deux cultures de melons pour limiter les maladies du sol, souligne Jean-François Dabilly. La dernière implantation de melons sur nos terres date de 2004. La prochaine est prévue en 2014. Nous réalisons toutefois des essais chez nos collègues et, dans ce cas, c’est nous qui les prenons en charge totalement. » Ainsi, avec Cap Légumes, les trois producteurs ont mis en place des bandes fleuries dans les parcelles de melons. L’objectif est double : améliorer la pollinisation du melon et éventuellement favoriser la biodiversité pour limiter les dégâts des ravageurs du melon. Malheureusement, les résultats n’ont pas été concluants. « Mais nous ne désespérons pas, affirme Tony Thibault. Ce type d’implantation a montré un impact dans des cultures pérennes comme la vigne. » L’exploitation se prépare déjà pour la production de melons 2012 avec des techniques très innovantes déjà testées en grandes cultures. Il s’agit de planter le melon dans un couvert végétal semé huit mois auparavant. Ce couvert a pour objectif de limiter le désherbage, d’apporter de la matière organique qui libérerait des éléments nutritifs nécessaires au melon et enfin de favoriser un milieu apte à mieux réguler les antagonistes des ravageurs de la culture. Cette année sont prévues des expérimentations de paillage avec du plastique biodégradable, les melonniers étant de gros consommateurs de plastiques. « La baisse d’utilisation des intrants ne s’improvise pas, conclut Jean-François Dabilly. C’est une question de mentalité qui a des répercussions sur toute l’exploitation. Par exemple, les tuyaux des 20 ha de melons irrigués au goutte-à-goutte sur les 50 ha que nous conditionnons sont récupérés et réutilisés les années suivantes. »

(1) Mis au point au Danemark, l’IFT correspond à : dose appliquée x surface traitée/dose minimale homologuée du produit x surface de la parcelle.
(2) Mancozèbe et chlorothalonil : substances actives antifongiques.

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