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Jean-Paul Huchon, président du Conseil régional d’Ile-de-France
Une région capitale pour les fruits et légumes

A la suite du Salon de l’Agriculture où les fruits et légumes étaient à l’honneur sur le stand d’Ile-de-France, Jean-Paul Huchon nous a accordé quelques instants pour nous exposer les différentes actions de la région en faveur de l’augmentation de la consommation de ces produits ainsi que les soutiens à la filière arboricole et maraîchère.

Signataire de la Charte Fruits, Légumes et Société lancée par l’interprofession Interfel et président d’une des deux régions pilotes du Club du même nom, Jean-Paul Huchon nous a accordé une interview afin de nous présenter les diverses animations mises en place par la région Ile-de-France en faveur de la consommation des fruits et légumes.

Fld : Vous avez signé la Charte Fruits, Légumes et Société en septembre 2006. Que vous apporte une telle démarche ?

Jean-Paul Huchon :La Charte Fruits, Légumes et Société est venue à point nommé pour conforter les actions de la Région Ile-de-France et officialiser sa volonté de maintenir un secteur caractéristique des zones périurbaines, qui représente quelque 600 exploitations et 3 000 emplois, et créer des liens avec les consommateurs. Elle permet également un rapprochement avec l’Interprofession (Interfel) qui dispose d’outils de communication parfaitement complémentaires des démarches des collectivités. La Région est bien décidée à participer à la mobilisation des Franciliens sur ces thématiques de santé publique.

Fld : Quelles sont les actions que vous avez entreprises en faveur de la consommation des fruits et légumes ? Et comment ces actions sont mises en œuvre dans votre Région ?

J.-P. H. :Un Francilien sur trois souffre de surpoids et l’on constate une augmentation importante des cas d’obésité et de surpoids chez les jeunes, notamment au sein des zones d’éducation prioritaires, reflet des inégalités sociales. (Source : Insee - Enquête décennale santé 2002-2003).

Nous sommes confrontés à une question de santé publique et de “fracture alimentaire”, renforcée aujourd’hui par le coût croissant des fruits et légumes dans les magasins.

La Région Ile-de-France a, depuis 2000, initié un certain nombre d’actions pour ses producteurs de fruits et légumes : Programme Primheur, construction d’un nouveau carreau des producteurs, soutien aux arboriculteurs, actions d’animation au travers de son Comité de promotion, expérience de mise en place de distributeurs de pommes dans les lycées… Nous menons par ailleurs une importante politique d’aide au développement et au soutien de l’agriculture biologique, avec une expérimentation en partenariat avec le Gabif, d’introduction du bio dans les cantines d’un certain nombre de lycées franciliens.

Enfin, nous finançons, dans le cadre de nos actions sociales, des programmes d’associations de prévention de l’obésité chez les jeunes qui parlent de nutrition.

Fld : A ce jour, combien de lycées et d’élèves ont déjà participé à ce genre d’actions en faveur des fruits et légumes ?

J.-P. H. : Nous avons atteint notre objectif de 100 interventions sur l’année scolaire 2007-2008. Le but à terme est que chaque classe concernée puisse devenir un relais au sein de son établissement (et en lien avec les responsables des cantines et infirmeries) pour développer la consommation de fruits et légumes dans les établissements et notamment en lien avec les producteurs de proximité. Par ailleurs, nous étudions des outils pour les responsables des cantines : classeur de recettes de fruits et légumes, avec l’aide de diététiciens.

Fld : Y a-t-il des différences dans la mise en œuvre d’un tel programme d’actions entre les villes ou départements de la Région ?

J.-P. H. : Chaque collectivité a une mission bien définie par les lois de décentralisation : les écoles primaires sont à la charge des Communes, les collèges à celle des Départements et les lycées et CFA sont confiés aux Régions.

S’agissant de la Région, l’action en cours est développée sur la base du volontariat au sein des établissements. Nous disposons désormais de l’entière responsabilité en matière de restauration des lycées et, à ce titre, nous devons prendre en compte les questions de nutrition. Le lien avec le territoire, dans une région où le secteur de la production agricole est si méconnu, me paraît indissociable de la démarche.

Fld : Quel est le rôle exact du Cervia et son lien avec la Région ?

J.-P. H. : Le Centre régional de valorisation et d’innovation agricole et alimentaire (Cervia), qui a statut d’organisme associé de la Région, principal financeur, est unique en France mais devrait faire des émules si l’on en croit les nouvelles politiques nationales annoncées. En créant le Cervia en 2007, la Région a souhaité passer un “pacte alimentaire” avec les Franciliens et les professionnels des secteurs de l’alimentation “du champ à l’assiette”.

La création du Cervia est intervenue quelques mois après la signature de la Charte Fruits, Légumes et Société. Les statuts de l’organisme intègrent la nutrition dans ses missions, au même titre que la qualité, l’innovation ou la sécurité sanitaire des aliments et en parfaite complémentarité avec la promotion des produits franciliens.

Il a aussi en charge de développer l’image de l’Ile-de-France agricole et rurale. Il y a peu, voire pas, de notoriété des produits régionaux franciliens, alors que plus de 50 % du territoire est agricole.

L’action conduite dans les lycées s’intègre donc parfaitement aux missions confiées au Cervia en matière agricole et alimentaire.

Fld : Vous êtes également Collectivité pilote Fruits et légumes pour quelles raisons ? Quel est votre rôle exactement ?

J.-P. H. : L’Ile-de-France a répondu positivement à Interfel pour être l’une des deux régions pilotes en France pour le développement de la consommation des fruits et légumes dans les établissements d’enseignement, avec la volonté de créer un lien avec la production de proximité. Cette action est mise en œuvre par le Cervia, en partenariat avec l’Association Eveil.

Les interventions de 1 h 30 intitulées “Des fruits et légumes pour les jeunes Franciliens !” sont destinées aux lycées ou CFA, privés ou publics, d’enseignement général ou technique d’Ile-de-France. Cet exposé, à la fois ludique et interactif, aborde aussi bien le patrimoine francilien et l’alimentation des jeunes, que la place pour le plaisir alimentaire et le goût ou les fruits et légumes dans le quotidien.

Ces interventions amènent donc les élèves à s’interroger. Que connaissent-ils de leur région ? Quel type de consommateur sont-ils ou souhaitent-ils devenir ? Qu’est-ce qu’un bon aliment ? Un aliment bon à manger ? Un aliment sûr ? Un aliment bon à penser ? Un aliment sain ? Un joli mélange de tout cela ?

Tout cela participe à une lutte contre la fracture alimentaire grâce à une meilleure connaissance des fruits et légumes et donc à un accroissement de leur consommation.

Fld : Quels budgets sont dédiés à ces actions par la Région Ile-de-France ?

J.-P. H. : Le budget proprement dédié au module dans les lycées et CFA est d’environ 50 000 € pour 100 prestations, auxquels il faut ajouter toutes les actions annexes : réalisation de visuels, films, livrets de recettes…

Fld : Quelles sont les autres actions que vous menez en faveur de l’agriculture et plus particulièrement les productions de fruits et légumes de votre Région (engagement en faveur des vergers franciliens ou productions spécifiques – cresson de Méréville, poire de Groslay, asperge d’Argenteuil, cerise de Montmorency)… ? La Région participe-t-elle à la Semaine Fraîch’Attitude et quel est le soutien de la Région en faveur de la production biologique fruits et légumes ?

J.-P. H. : La Région s’est engagée dans un nouveau contrat de projet qui comporte en particulier un nouveau programme Primheur pour la modernisation des exploitations spécialisées, pour l’agriculture biologique et conventionnelle et pour l’ensemble des filières. L’aide à la transmission et l’installation de jeunes agriculteurs, avec une aide bonifiée pour l’agriculture biologique, permettent de soutenir les porteurs de projets, les bio s’installant principalement en maraîchage. Au travers du Cervia, qu’elle finance hors contrat de projet, la Région aidera cette année encore ses producteurs spécialisés à participer à la Fraîch’Attitude, sur les marchés en particulier.

J’ai fait en sorte que l’agriculture soit un des “Grands projets” du contrat de projet 2007-2013 où la Région a inscrit 56 M€ pour l’agriculture, de l’enseignement supérieur à l’environnement en passant par le développement économique, et va bénéficier pour la première fois de fonds européens du Feader. La Région soutient par ailleurs activement les producteurs de fruits et légumes biologiques franciliens par le biais d’une aide au maintien de 650 €/ha pour les maraîchers et 900 €/ha pour les arboriculteurs. Elle accompagne également ces exploitations en finançant 80 % du coût de certification biologique annuelle.

Le budget annuel régional pour soutenir l’agriculture bio est de 1 M€ en 2008 auquel il faut ajouter 79 500 € pour l’introduction du bio dans les cantines des lycées. Nous souhaitons par cette expérimentation d’introduction du bio dans les cantines faire la démonstration qu’une alimentation de qualité est possible à coûts constants. L’expérience montre d’ailleurs que non seulement ça marche mais qu’en plus les équipes pédagogiques investissent cette dimension et qu’autour se tissent de nouveaux liens avec les élèves. L’Europe cofinance certaines actions comme Prevair, le Plan végétal environnement mais la part Feader reste assez faible du fait de l’enveloppe globale disponible en Ile-de-France au regard des dépenses nationales. La région apporte à elle seule pratiquement la moitié des crédits Etat, soit plus de 30 M€ pour une aide de l’Etat sur l’ensemble du territoire d’environ 70 M€ !

Fld : Depuis le Grenelle de l’Environnement, on parle beaucoup de la promotion des circuits d’approvisionnement à proximité des lieux de consommation, quel peut-être le rôle de la région Ile-de-France sur ce terrain ?

J.-P. H. : C’est une question complexe, l’interdiction des distorsions de concurrence conduisant souvent à l’impossibilité de privilégier la proximité.

Néanmoins, l’Ile-de-France n’a pas attendu le Grenelle de l’Environnement pour pratiquer l’approvisionnement de proximité. Il s’agit d’une tradition francilienne bien ancrée, qu’il s’agisse du carreau des halles de Paris jusqu’en 1969, des marchés forains ou des ventes à la ferme. Il se développe aujourd’hui de très nombreux autres modes de “circuits courts” : Amap (aide au maintien d’une agriculture paysanne) pour les agriculteurs bio, distribution de paniers en entreprises, dans des points de vente, dans certaines gares, par Internet.

D’autre part, se pose le problème des appels d’offres lorsqu’on parle de restauration scolaire où la notion d’approvisionnement de proximité n’est pas réellement prise en compte mais laissée à l’appréciation du juge, si ce n’est pour des opérations ponctuelles.

C’est encore une mission du Cervia que de valoriser la production francilienne au travers de la création d’une marque régionale, d’un site Internet performant pour créer des liens entre entreprise et consommateurs, et la mise en place d’un réseau de lieux de vente des produits régionaux.

Fld : En 2006, vous aviez organisé une opération de distribution de fruits et légumes dans deux gares parisiennes en partenariat avec la SNCF, le comité de promotion Ile-de-France, Interfel et le ministère de l’Agriculture. Pour quelles raisons ces actions ne sont-elles pas renouvelées ?

J.-P. H. : Le comité de promotion, qui a fusionné depuis 2007 au sein du Cervia, avait répondu en 2006 à la demande d’Interfel en distribuant, pour la semaine nationale Fraîch’Attitude, des radis et des pommes dans les aéroports, renouvelée ensuite dans une gare. Ce furent des opérations très lourdes en logistique et très coûteuses étant donné le nombre de passagers, pour un impact au final très minime sur la production régionale. Un travail sur le long terme a paru devoir être privilégié plutôt que des actions très ponctuelles dans des lieux de passage.

Fld : Les fruits et légumes étaient à l’honneur au Salon de l’agriculture, pourquoi cette année ? Quel est le bilan d’une telle action de promotion grand public ?

J.-P. H. : Il est de tradition de retenir un thème de communication pour l’espace Ile-de-France au Sia. Après l’élevage en 2006, les céréales en 2007, c’était au tour des fruits et légumes en 2008, ce qui coïncidait avec l’action dans les lycées. Malgré la morosité du point de vue commercial, que la majorité des exposants du Salon ont eu à déplorer cette année, l’effort réalisé pour l’animation sur les f&l a recueilli un excellent écho côté public. On pouvait y déguster des pommes d’Ile-de-France, voir la présentation de leurs caractéristiques génétiques et aromatiques, le pressage du jus de pommes, les enfants actionnant le pressoir pour déguster le jus fraîchement réalisé. Y voir aussi une démonstration de greffage de pommiers et poiriers.

Fld : Le Conseil général du Val-de-Marne propose depuis maintenant cinq ans dans les collèges la Semaine du fruit, est-ce une action envisageable dans les lycées franciliens aujourd’hui ?

J.-P. H. : Le Conseil général du Val-de-Marne fait un excellent travail dans le domaine de la nutrition et depuis longtemps. Il s’appuie pour cela sur le Min de Rungis implanté sur son territoire et en mesure de fournir rapidement les volumes requis. C’est une autre manière d’appréhender “la proximité”, mais je n’écarte pas la possibilité d’un travail commun et complémentaire au sien.

Fld : Vous avez rédigé un rapport en 1996 sur l’organisation commune de marché des fruits et légumes à l’échelle européenne, qu’en avez-vous retenu et quel est votre constat près de douze ans après sur la situation de la filière aujourd’hui ?

J.-P. H. : Je me suis surtout rendu compte, en devenant président de la Région Ile-de-France, que l’OCM n’était guère adaptée à l’agriculture francilienne, non organisée en OP car tournée directement vers un grand bassin de consommation et non vers l’exportation comme c’est majoritairement le cas des grandes régions du Sud. J’ai eu l’occasion de faire des propositions d’adaptation lors de l’accueil à Paris de l’Assemblée des régions européennes, légumières, fruitières et horticoles (Areflh) en février 2006.

Fld : Qu’attendez-vous du futur programme européen en faveur de la consommation des fruits et légumes dans les écoles ?

J.-P. H. : Sur le fond, c’est une excellente chose et je m’en félicite. On peut craindre néanmoins à nouveau un manque de proximité pour nos producteurs qui les freine dans leur accès aux aides. Le ministre annonce parallèlement une expérience de mise en place de distributeurs automatiques de fruits dans des lycées agricoles. Nous avions été novateurs en la matière mais l’expérience en Ile-de-France avait été interrompue suite à un amendement du Sénat interdisant tout distributeur de denrées dans les établissements scolaires.

220 M€ L’environnement, l’aménagement et le développement rural pèsent 5,1 % de l’actuel budget 2008 prévisionnel du conseil régional (4,35 Md€).

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