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Yves Durand , président de la Fédération française des marchés d’intérêt national
Un marché de gros organise la concurrence !

Directive européenne sur les services,arrivée du capital privé dans la structure des marchés, évolution de la distribution…, les sujets étaient nombreux sur le bureau du président de la FFMIN à l’arrivée de Yves Durand en novembre dernier. Le député-maire de Lomme veut aussi que sa Fédération prenne toute sa place dans le débat public.

Le député-maire de Lomme (Nord), Yves Durand a pris la présidence de la Fédération des marchés d’intérêt national (FFMIN) en novembre dernier. Pourtant, peu de chose finalement destinait ce professeur d’histoire-géographie originaire de la Mayenne, à prendre les rênes de la représentation des dix-neuf marchés de gros. « A part peut-être le fait d’être maire depuis 1990 d’une ville où un Min est installé et, qu’à ce titre, d’en être le président. Et celui d’être parlementaire certainement aussi… », note-t-il tout sourire. Pour la défense des marchés de gros, ce n’est pas un luxe en effet.
Pendant ses mandatures, Yves Durand a porté le dossier de la rénovation du marché de Lomme et il a ainsi une vision claire de l’évolution des Min. « J’estime qu’il est temps de repenser et de redéfinir la notion de marchés de gros. Qu’entend-on par marché de gros en fin de compte ? En premier lieu, il s’agit d’un lieu de rencontre et d’échanges entre les producteurs, les grossistes et toutes les formes de distribution. Un lieu où se développe la concurrence mais de façon organisée. D’ailleurs, il est clair que si elle ne l’était pas, elle se tuerait d’elle-même, explique-t-il. Le développement de la grande distribution a fragilisé la position des marchés de gros, les mettant en danger. Cependant, ils ont su s’adapter et sont aujourd’hui encore plus nécessaires. Je ne suis pas contre la grande distribution, mais je pense qu’il faut atteindre un équilibre entre les grandes enseignes et le commerce de proximité. C’est le rôle des marchés de gros que d’organiser cet équilibre indispensable. »
Ce qui permet au député-maire de Lomme d’élargir le débat. « Je crois que l’évolution de la société telle que nous la connaissons actuellement va rendre les marchés de gros encore plus nécessaires. Après le développement de la GMS – et on est allé très loin sur ce point – on assiste au retour d’une conception plus humaine de la consommation. Ces tendances ont bien été comprises par la grande distribution qui développe ses propres formats adaptés à la proximité. Deux idées majeures ont émergé dans l’esprit du consommateur : la proximité et la qualité. Il s’agit de valeurs essentielles des marchés :ainsi, la convention signée entre le Min de Lomme et l’Institut Pasteur de Lille pour la mise en place d’un label de qualité pour les fruits et légumes. A ces deux tendances, j’en ajouterais d’autres : l’aménagement du territoire, la sécurité alimentaire et la qualité environnementale. »

S’impliquer dans le soutien du commerce de détail en centre-ville
Pour Yves Durand, il existe des leviers que les marchés de gros peuvent actionner pour apporter un soutien au commerce de proximité. « Un marché de gros, c’est une plate-forme commerciale et aussi un garant de la qualité pour sa clientèle. Finalement, les marchés de gros d’aujourd’hui sont précurseurs dans le domaine de l’aménagement du territoire en participant depuis des décennies à l’organisation de l’approvisionnement alimentaire des villes. De manière pratique, l’expérience des Min permet d’offrir des services en matière de mutualisation ou d’organisation des livraisons de produits frais en ville. Je pense ainsi que la Fédération doit prendre sa part dans le dossier des transports de marchandises. »
C’est dans cette même optique que la Fédération a exprimé sa vive inquiétude sur les risques que fait courir l’ouverture du commerce de détail le dimanche sur le secteur alimentaire. Un combat juste pour Yves Durand. « Accepter le travail le dimanche, c’est prendre le risque de rompre cet équilibre nécessaire dont je vous parlais entre les différentes formes de distribution. La question qui doit être posée : est-ce que l’on veut vivre dans une ville comme celle des Etats-Unis des années soixante à l’heure même où la société américaine se détourne de ce modèle ? C’est pour cela que nous avons voulu intervenir sur ce sujet. Il ne s’agit en aucun cas d’une défense purement catégorielle. Il est temps d’aller au-delà de cela. C’est un problème de civilisation, de vie en communauté. »
Avec l’arrivée d’une société privée dans le capital de la Semmaris (Rungis) et l’ouverture du marché de Corbas (Lyon) totalement privé, c’est néanmoins une certaine image des marchés de gros – prédominance de la collectivité territoriale et/ou de l’Etat – qui connaît une forte évolution. Ce qui ne trouble pas le président de la FFMIN. « Je ne vois pas de problème à ce que le capital privé participe à l’actionnariat d’un marché d’intérêt national dans la mesure où ce dernier continue de répondre à une définition précise et que l’intérêt général garde entièrement sa place. Après tout, un Min est soumis à une délégation de service public et, dans cette optique, cela permet au marché d’avoir des moyens supplémentaires pour remplir sa mission. C’est de l’économie mixte. Je suis pleinement conscient de la différence entre les Min concernant leur environnement économique et leur implantation sur le territoire, ce qui apporte des statuts différents d’un marché à l’autre. Mais, en fin de compte, tous les marchés d’intérêt national répondent à la même préoccupation. Il n’est pas nécessaire de se figer sur un statut et de ne plus en bouger. Au contraire, je pense qu’il devrait évoluer pour être toujours en phase avec la réalité économique de l’époque. Un Min, ce n’est pas la tranquille gestion des espaces verts. »

Vent debout contre la directive européenne sur les services
Dans l’actualité des marchés d’intérêt national, une place particulière est à donner à la directive européenne sur les services, appelée aussi “directive Bolkestein”, du nom du commissaire européen qui l’a portée. L’objectif de la directive, qui devrait être traduite dans le droit français au mieux à la fin de l’année, est d’introduire une libre concurrence dans l’ensemble des services sur le territoire de l’UE (à l’exception de certaines activités comme celles liées à l’éducation). A ce titre, le commerce des produits est aussi concerné. Plus spécifiquement, elle pourrait remettre en cause le périmètre de référence des Min. Il s’agit d’une zone géographique, qui peut s’étendre sur quelques communes autour du marché, dans laquelle l’implantation et l’exercice de l’activité de gros de certains produits, dits “de référence”, sont contrôlés. La remise en cause du périmètre de référence (autrefois appelé “de protection”) revient régulièrement à l’esprit de ceux qui y voient une distorsion de concurrence.
Yves Durand ne partage vraiment pas cet avis : « Contrairement à ce que pensent certains défenseurs d’un libéralisme débridé qui voudraient faire croire que les Min sont exempts de toute notion de concurrence, je dirais qu’ils sont le lieu où la concurrence existe pleinement. Elle est simplement organisée de telle façon à offrir le meilleur. Evidemment, il existe des compétiteurs aux marchés, les Cash & Carry en premier lieu. Mais, une position dominante ne serait pas profitable à ces derniers car ils ont besoin des marchés de gros pour justifier leur offre concurrentielle. Je ne dirais peut-être pas l’inverse. »
Du coup, pour le président de la FFMIN, « si on considère que ce même périmètre permet d’organiser la concurrence dans les flux de produits, alors je pense que ce serait une erreur de le supprimer dans le cadre de la mise en application de la directive. Le risque serait de voir les Min disparaître purement et simplement avec le périmètre. »
En tout cas, la “famille” des marchés n’est pas restée les bras croisés : « Nous nous sommes battus afin que la transcription dans le droit français préserve l’idée de périmètre et nous avons plaidé cela auprès du Secrétaire d’Etat chargé du Commerce, Hervé Novelli. Dans un premier temps, le gouvernement semblait préférer une transcription abrupte de la directive Bolkestein. La mobilisation des marchés et aussi des maires concernés, tout comme celle des grossistes, a été très forte. Cela a permis de mieux faire comprendre notre message auprès du ministère. Désormais, le texte devrait passer au Parlement dans le courant du mois d’octobre. » En juillet dernier, la partie du projet de loi visant à mettre en conformité la réglementation des Min avec le droit communautaire a maintenu la notion de périmètre de référence.
Finalement, l’expérience de professeur d’histoire-géographie d’Yves Durand s’avère utile : « Il faut savoir être à l’écoute et faire preuve de pédagogie. Et puis, l’approvisionnement des villes, c’est aussi de l’histoire et de la géographie. » conclut-il C’est aussi savoir donner de la voix : « La Fédération doit être partie prenante du débat public. Elle va se faire entendre. »

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