Le point sur la campagne 2010
Trois questions à Luc Jeanneau
Président de la Commission nationale de la pomme de terre primeur du CNIPT, Luc Jeanneau donne ses impressions à l’aube d’une nouvelle campagne, qu’il espère moins désastreuse que l’an passé.
Fld : Quels sont les estimations de récolte et l’état du marché alors que les premières primeurs sont déjà sur les étals ?
Luc Jeanneau : Si l’on considère le marché global de la pomme de terre, cela va un peu mieux depuis février en volumes et, en mars, nous avons noté un redressement des prix, tout en sachant qu’ils partaient de vraiment bas ! Je reste donc très prudent en ce début de campagne primeur. Il y a des indicateurs objectifs : plusieurs bassins de production ont moins planté comme Noirmoutier et la Bretagne par exemple et puis il y a l’effet désastreux de la tempête Xynthia sur l’Ile de Ré. Les pertes liées à l’inondation atteindraient 30 % des prévisions. Nous avons aussi des indications sur la production en Espagne victime du gel et de fortes pluies ces derniers mois, mais nous n’avons pas de données précises quant aux pertes. Quant à l’importation, il y a beaucoup d’Israël et il existe un grand point d’interrogation au sujet de l’Egypte. Ce pays a une grande volonté de développement des volumes, mais il nous faut dénoncer le problème de la lutte sanitaire et la présence parasitaire. Il existe un accord sur les parasites de quarantaine qui stipule qu’au bout de trois cas recensés de présence de parasites, l’importation est interdite vers l’Europe. Avec le nouvel accord, ces autorisations passeraient à cinq cas maximum. Cette décision est complètement incompatible avec les critères de protection des cultures demandées dans notre pays.
Fld : Lors de l’Assemblée générale du CNIPT vous aviez insisté sur l’importance de sortir la primeur du rayon pomme de terre qu’en est-il ?
L. J. : Notre plus gros concurrent, c’est la pomme de terre de consommation. Depuis cinq à six ans, le marché est toujours difficile en mai. Dans les rayons pomme de terre, la primeur trouve difficilement sa place car elle n’est pas identifiée clairement. Nous constatons un manque flagrant de compétences de la part de certains chefs de rayon. Le fond du sujet, ce n’est donc pas l’importation, le vrai problème, c’est le manque d’identification et parfois des promotions sur de la pomme de terre de consommation alors que la primeur est déjà présente sur le marché. C’est dans cet esprit que la Commission primeur a rencontré la FCD afin de préparer au mieux la campagne 2010. Il a été décidé une communication générique autour de la primeur avec de la PLV spécifique et toute une campagne de sensibilisation des adhérents de la FCD. Cette année, nous avons réussi à mobiliser l’ensemble des acteurs compte tenu du marasme en pomme de terre de consommation. Tout le monde a admis que l’avenir de la filière passe forcément par celui de la primeur. Car lorsqu’elle arrive sur les étals, cela provoque une rupture et redynamise le marché.
Fld : Et son rapprochement avec les autres légumes primeurs ?
L. J. : Sur le fond c’est toujours d’actualité, l’idéal serait aussi de remonter l’ensemble du rayon primeur, c’est un travail de longue haleine que nous avons encore à mener. Mais il faut admettre que lorsque nous étions à Interfel, globalement on ne savait pas où nous mettre. Il faut surtout arriver à motiver les chefs de rayon pour qu’ils mettent en avant la primeur. C’est notre volonté en ce début de campagne.