Bus Restaurant 3268
Restauration nomade à la française
En service depuis un an, le Bus Restaurant propose, en banlieue d’Angers, des repas typiquement régionaux avec une priorité aux produits frais.
Al’heure où les sandwiches prennent une part toujours plus importante dans la restauration – ce produit gagne 50 à 60 millions de sandwiches par an et représente un chiffre d’affaires de 3,8 milliards d’euros en 2007 selon le cabinet Gira Food Service – Sylvie et Jean-Louis Rondeau se sont lancés, il y a un an, dans la restauration de rue à la française. Pas de sandwiches donc au menu mais des plats chauds, traditionnels, cuisinés avec des produits de saison et, dans la mesure du possible, de proximité. Ils n’ont pas choisi la facilité puisqu’ils proposent une restauration nomade tout en ayant pour objectif de fidéliser leurs clients.
Basés en Maine-et-Loire, ils ont acquis un ancien car scolaire qu’ils ont aménagé en salle de restaurant. Chaque midi, du mardi au vendredi, le Bus Restaurant 3268 – un clin d’œil à l’immatriculation du véhicule – s’arrête dans un lieu différent d’Angers et sa banlieue ou encore à Sainte-Gemmes-sur-Loire à proximité de la jardinerie Marionneau. Deux ans ont été nécessaires pour peaufiner le projet, le temps de multiplier les contacts pour mieux appréhender le marché et trouver le bus qui leur convienne. Après une année de fonctionnement, il n’est pas encore possible de dégager un véritable salaire mais les clients sont au rendez-vous et pour Sylvie c’est déjà beaucoup : « Notre projet n’est pas encore véritablement abouti, mais le taux de fidélisation est très correct. »
La clé de leur réussite réside sans doute dans la promotion qu’a réalisée dès le début le couple Rondeau. Il s’est approprié les outils les plus modernes. Les consommateurs sont fortement encouragés à réserver par le net afin de bénéficier du premier service ou des meilleures places, celles du fond. Systématiquement, les adresses e-mail sont demandées au client afin que Sylvie puisse leur envoyer les futurs menus et les opérations programmées, comme le tour de la France gourmande ou encore le Noël du Monde. Durant tout le mois d’avril, pour fêter leur première année d’existence, un jeu de questions est proposé aux convives. “Combien le bus a-t-il effectué de kilomètres depuis un an Réponse exacte : 10 844 km. ?” “Quel est l’ingrédient ajouté au plat du jour ?” Celui qui est le plus près de la réponse gagne un plat chaud : « Insistez bien sur le plat chaud, souligne Jean-Louis. Notre spécialité de restauration nomade est bien un plat chaud, pas un sandwich. »
Les plats sont confectionnés à partir de produits frais
Il a fallu s’adapter aux besoins de la clientèle pour assurer le maximum de convivialité et de confort : « Nous avons déjà changé plusieurs fois de décor et d’agencement, reconnaît l’ancienne spécialiste en marketing. Ainsi, des tables classiques ont remplacé les “mange debout” jugés inappropriés pour les consommateurs qui veulent prolonger leur visite. » En termes de menu, les jeunes restaurateurs sont également très attentifs : « Nous cuisinons des plats à partir de produits frais que les salariés n’ont plus le temps de préparer comme la daube provençale, du pot-au-feu ou encore des mijotés. Nous sommes très surpris par leur attente. Par exemple, le potage est le plat le plus consommé. Nous en avons proposé tout l’hiver. Aussi allons-nous tester cet été des soupes froides de melons, de concombres ou de tomates. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les hommes en redemandent aussi bien que les femmes. » Le Bus Restaurant peut accueillir jusqu’à vingt personnes, le double par beau temps avec les tables en terrasse.
Le menu est modifié au fur et à mesure des approvisionnements et des conditions climatiques. En saison hivernale l’objectif pour les restaurateurs est d’attirer l’œil du consommateur afin d’aiguiser son odorat. Les carottes, pommes de terre, différents choux et agrumes priment largement. Au printemps, les propositions sont aussi variées et les sens gustatifs eux aussi très sollicités. Fin mars, le poireau primeur succédait au potage avec de l’alfafa bio. L’asperge et les fraises devaient suivre les semaines suivantes.
Dans leur laboratoire, les Rondeau se partagent les tâches. Ancien pâtissier, tout jeune retraité et artiste peintre, Jean-Louis confectionne les entrées et les desserts : « J’affectionne de préparer des mets nouveaux, riches en couleurs. » Ainsi proposent-ils du millefeuille de betterave rouge aux copeaux de parmesan et roquette, un tableau gouaché de vert, rouge et crème. En hiver, les potages sont préparés par Sylvie : « Je les cuisine à l’instinct, sur l’odeur et le goût. Par exemple, pour un velouté de carotte, je fais rissoler des oignons dans de l’huile d’olive – mes origines méditerranéennes me trahissent – auquel je rajoute une grosse base de carotte et un peu de céleri branche. » Les effets sont réussis : la femme de l’écrivain Hervé Bazin, qui vit dans la région, qualifie les potages du Bus Restaurant comme un véritable art.
Tôt le matin ou tard le soir, le couple de restaurateurs s’approvisionne tous les jours, chez les grossistes et au Métro du Min d’Angers et chez des producteurs locaux (lire encadré). Dès le printemps, les herbes qui accompagnent la plupart des plats sont cueillies directement dans leur jardin. « Ce sont les seuls ingrédients, coriandre, ciboulette, basilic ou encore persil que nous cultivons,mentionne la restauratrice. Nous manquerions de temps pour produire nos propres légumes. » Acheter des produits de qualité comme du veau ou des produits frais comme de l’asperge fait grimper le prix de revient d’un menu : « Pour maintenir un prix abordable pour le client, entre 10 et 15 €, tout en lui faisant profiter d’un bon plat, nous travaillons donc sur le coût moyen d’un menu en essayant dans le temps de lisser les surcoûts. »
A l’avenir, Sylvie et Jean-Louis Rondeau espèrent bien que ce bus fera des petits, trois ou quatre, en franchise. En attendant, ils travaillent également le week-end avec les repas événementiels qu’ils organisent pour des vernissages ou des portes ouvertes d’entreprises. Ainsi les trois jours de la Pentecôte à la jardinerie Marionneau.
« Nous sommes heureux,disent-ils, d’offrir à chacun un moment de détente en toute simplicité. »