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Pomme - Val de Loire
Renaissance, une OP hors normes

Avec 14 000 t, les onze arboriculteurs de l’OP Renaissance approvisionnent le marché français. Ils ont développé une nouvelle variété, Choupette, et ont su se doter d’une organisation spécifique pour une meilleure compétitivité.

Suite au remaniement de l’OCM fruits et légumes, en 2006, certaines organisations de producteurs (OP) ont dû modifier leur fonctionnement. C’est le cas pour vingt-quatre arboriculteurs-exploitants au carrefour de la Sarthe et de l’Indre-et-Loire qui, en 2007, se sont constitués en deux OP : Natur’Pom et Renaissance. Cette dernière est présidée par Eric Martineau, arboriculteur sur 21 ha à Chenu dans la Sarthe. « Renaissance signifie la naissance d’une nouvelle OP, le renouveau, affirme-t-il. De nombreux opérateurs ont cru qu’il s’agissait d’un clin d’œil aux périodes fastes du XVIe siècle et aux châteaux de la Loire. Pourquoi pas ? Notre objectif était plutôt de créer une nouvelle structure tout en s’appuyant sur l’existant. Je crois sincèrement que nous avons eu raison, car notre stratégie fonctionne. Aucun arrachage n’a été déploré depuis la création de notre OP. »
Contrairement à une OP classique, le conditionnement n’est pas centralisé sur une station. « Nous n’avons pas eu le choix, indique Eric Martineau. Les onze exploitants qui adhèrent à Renaissance conditionnaient déjà leurs produits. Nous n’allions pas casser des outils performants. Nous avons maintenu aussi les quatre structures commerciales [les SARL Launay, Vergers des Vaux du Loir, Leroy et La Jolinière commercialisent des pommes depuis de nombreuses années, essentiellement auprès de la grande distribution, NDLR]. Nous en avons même créée une nouvelle : Alliance Fruits. »

Les arboriculteurs sont à la fois adhérents et concurrents
Aujourd’hui, les adhérents confient leur production à l’OP Renaissance qui la commercialise ensuite à l’une des cinq structures commerciales. « La création d’une société unique aurait obligé l’OP à embaucher un commercial, explique-t-il. Or cela aurait entraîné des charges supplémentaires et diminué le dynamisme commercial. James Launay, Charlie Gautier, Pierre Leroy et Rémi Leborgne (La Jolinière) sont à la fois adhérents de l’OP et concurrents, bien qu’ils ne visent pas forcément les mêmes marchés. Il en résulte une certaine émulation des prix à la hausse. »
Créée début 2011, la société Alliance Fruits développe la commercialisation de la pomme Choupette du pépiniériste DL. Produite par tous les adhérents de Renaissance, elle est devenue leur variété phare, mais provient aussi d’autres OP. Sa production sur 90 ha se concentre en région Centre pour 92 % et pour 7 à 8 % en Alsace.
C’est grâce à Charlie Gautier, qui la repère en 1998 chez le pépiniériste DL, que l’histoire de Choupette a commencé à s’écrire. Pomme bicolore, sucrée, ferme et juteuse au calibre moyen de 70 à 85, elle s’avère surtout tolérante à la tavelure. Charlie Gautier la teste sur son exploitation et elle séduit aussi James Launay. « Une fois la saison de Gala terminée, explique Charlie Gautier, nous n’avions pas de fruits aux qualités gustatives intéressantes à proposer pour le marché. Nous cherchions aussi à répondre aux besoins des consommateurs qui exigent des fruits cultivés avec le moins d’intrants possible. Nous voulions aussi préserver la qualité de vie de nos salariés en limitant au maximum les traitements phytos. » A l’origine, seuls deux metteurs en marché la commercialisaient : les SARL Launay et les Vergers des Vaux du Loir. Aujourd’hui, c’est la société commerciale Alliance Fruits, gérée par Charlie Gautier et James Launay, qui regroupe les deux metteurs en marchés historiques et La Jolinière. « En créant Alliance Fruits, atteste Eric Martineau, l’offre est mieux coordonnée. Nos clients n’ont plus qu’un seul interlocuteur et l’embauche d’un commercial nous a permis de mieux développer les ventes de Choupette. »
Le choix s’est avéré payant. En 2008, la variété Choupette reçoit un Sival d’Or. A l’époque, sa commercialisation démarre tout juste. « Leclerc puis Carrefour ont vraiment joué le jeu », affirme James Launay. En 2010 et 2011, Leclerc a lancé une opération nationale et a diffusé des spots radio sur Choupette. Durant quatre jours, tous les centres Leclerc proposaient la variété. Quant à Carrefour, la demande progresse toujours. Cette montée en gamme permet d’ajuster le marché à la demande. Des opérations régionales sont effectuées tous les ans par Leclerc, Carrefour, Grand Frais et aujourd’hui Cora, Leader Price ou encore Système U. Un suivi en juin-juillet en région Nord-Est devrait aiguiller la structure commerciale sur le réachat des consommateurs.

Une gestion originale
Cette saison est assez particulière, vue le faible tonnage (2 000 t cette année au lieu des 3 000 t prévisionnelles), ce qui oblige à concentrer les transactions. En 2014-2015, le potentiel devrait atteindre 5 000 t. Face au succès de la variété, pourquoi les producteurs n’en plantent-ils pas davantage ? Malgré le succès de la variété, « l’investissement dans de nouveaux vergers coûte cher, déplore Eric Martineau. Dans l’OP, le renouvellement du verger est de l’ordre de 5 %, ce qui est supérieur à la moyenne des adhérents de l’ANPP* (3 %). Avec un verger de 20 ha, il faut donc vingt ans pour le renouveler. »
Comme les autres variétés plus classiques de l’OP, la pomme Choupette est stockée momentanément à la station de conditionnement du producteur ou dans les frigos de Cuma Froid situé à Saint-Aubin-le-Dépeint, en plein cœur de la zone de production. Renaissance bénéficie ainsi d’un système original de stockage. Bénéficiant d’une capacité de stockage en atmosphère contrôlée de 12 000 t (augmentée de 2 500 t en 2010), Cuma Froid vient d’être mis aux normes en 2012 (changement du gaz réfrigérant) grâce à un investissement de 500 000 E. La structure a l’avantage d’avoir de petites unités frigorifiques où le stockage est effectué par variété et non par producteur. Chaque palox est alors bien identifié afin d’optimiser la gestion des lots.
En parallèle, les adhérents de Renaissance sous-traitent leur précalibrage à la société Preca Services, implantée à Saint-Aubin-le-Dépeint, à proximité de Cuma Froid. Ces deux entreprises ont un lien car elles embauchent du personnel (quatre salariées à elles deux) via le groupement d’employeurs Harmonie créé à cet effet. Un investissement de 300 000 E a été effectué pour moderniser Preca Services en 2012 dont les capacités de précalibrage avoisinent les 25 000 t. Le conditionnement est ensuite effectué à la station du producteur en fonction des besoins. « Notre système peut paraître complexe mais en réalité, il est très réactif, argumente Eric Martineau. Avec les seize lignes de conditionnement que possèdent les arboriculteurs, nous sommes capables de fournir les produits demandés dans les plus brefs délais. » Et au niveau personnel, cela laisse plus de souplesse. Si le conditionnement s’arrête, les employés peuvent reprendre leurs travaux dans le verger. « Nous sommes capables aujourd’hui, conclut James Launay, de livrer un produit homogène bien qu’il provienne de diverses exploitations. Nous employons le même technicien, les mêmes structures de stockage, le même précalibrage et nous avons élaboré un cahier des charges en commun. Choupette a beaucoup aidé dans l’harmonisation des pratiques. »
Autre originalité de Renaissance : le personnel de l’OP se résume à deux salariés, l’animatrice Stéffi Munier et le technicien Pascal Boyer. Tous les adhérents mettent la main à la pâte avec une tâche bien précise. Le président représente l’OP dans toutes les instances et gère la partie administrative. L’un se charge de la gestion du personnel des  sociétés. Deux autres supervisent la comptabilité, les finances et ont accès aux comptes, négocient les prêts si besoin. Un cinquième s’est spécialisé dans les achats de fournitures, un sixième dans le matériel et les techniques liés à l’environnement. « L’OP Renaissance, montre Eric Martineau, est vraiment devenue la prolongation de nos exploitations. Ce système nous évite aussi d’embaucher un directeur et nous fait gagner du temps. » Le statut de l’OP et son fonctionnement sont, eux aussi, particuliers. L’OP est régie sous le statut juridique d’une SAS. « Nous avons opté pour la souplesse et la transparence, note Eric Martineau. Nous n’organisons pas de conseil d’administration mais des assemblées générales mensuelles. Ainsi, les onze producteurs assistent aux discussions et nous fonctionnons sur le principe d’un homme, une voix. Certes les débats sont parfois animés, mais le pot de l’amitié de fin de séance peut aplanir les différends. Rien n’est figé. Si le président ne fait pas l’unanimité, il peut être écarté de sa fonction sur le champ. »

Compétitivité et modernisation des exploitations
Comme toutes les OP, Renaissance dépose des Programmes opérationnels (PO) pour améliorer la compétitivité des entreprises et répondre aux exigences du consommateur. Chaque année, l’OP achète 2 000 à 3 000 palox pour assurer la commercialisation des fruits. Sur le plan environnemental, le PO a permis de diminuer l’utilisation d’insecticides, de se fournir en nichoirs, de semer des jachères de fleurs, d’utiliser la confusion sexuelle et d’installer des stations météo dans les vergers permettant aux producteurs un accès direct aux données climatiques afin qu’ils puissent gérer au mieux le bon moment pour traiter. Dans le but d’améliorer les récoltes et réduire la pénibilité des cueilleurs, l’OP a prévu aussi l’achat de plates-formes.

* Association Nationale Pommes Poires

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