Production
Plans de campagne : l’Etat va procéder au recouvrement des sommes dues
Outre les OP, 4 000 producteurs sont concernés. OP et producteurs risquent le dépôt de bilan. Les membres de l’Apfelso demandent la création d’une commission d’enquête parlementaire.
Le dossier des plans de campagne est en train de rentrer dans sa phase “hard”. C’est le message qu’ont tenu à faire passer les producteurs et représentants d’OP du Sud-Ouest à l’occasion de l’Assemblée générale de l’Apfelso (Association des producteurs de fruits et légumes du Sud-Ouest) qui se tenait vendredi dernier à Agen. Un message qu’ils ont délivré en présence notamment de deux sénateurs du Lot-et-Garonne, Pierre Camani (PS, également président du Conseil général) et Henri Tandonnet (UMP).
4 000 producteurs seraient concernés
La situation à juin 2012 de cette affaire, dont les premières manifestations remontent tout de même à 2002, est la suivante : seuls les dossiers des OP dont les sommes à recouvrer sont inférieures à 500 000 E sont réglés. Ce qui représente environ 20 % de l’enjeu national. Pour tous les autres dossiers, et donc ceux des OP les plus importantes du pays, ainsi que pour certains producteurs, on constate « une pression accrue de l’Etat pour procéder au recouvrement des sommes dues ». Car l’Etat lui-même est sous la pression de Bruxelles qui le menace de lancer une procédure en manquement qui serait accompagné d’astreintes journalières, des astreintes qui pourraient atteindre plusieurs millions d’euros.
Par ailleurs et contrairement à ce qui avait pu être indiqué, les OP ne sont pas les seules concernées. Tous les producteurs appartenant, au moment des faits, à des OP sans transfert de propriétés, et étant encore en activité, vont devoir rembourser les sommes exigées. « La procédure d’identification » de ces producteurs est « prête », dit-on. On estime leur nombre à un millier dans le Sud-Ouest, à 4 000 environ dans tout le pays. Enfin, et s’il est toujours difficile d’avoir une idée précise des sommes en jeu dans ce dossier, on considère qu’au global les sommes à recouvrer sur la période 1998-2002 avoisineraient les 500 millions d’euros : 150 M€ d’aides, plus la part professionnelle, plus les intérêts.
Une créance « certaine et exigible »
« L’administration est en train de lancer la mécanique lourde », a annoncé François Lafitte, président de l’Apfelso et président de Fedecom, la structure qui rassemble les anciens comités de bassin et qui est à l’origine d’un recours à Bruxelles. Car OP et producteurs doivent s’attendre à recevoir, au plus tard à l’automne, un document de l’administration, exigeant le remboursement des sommes dues, majorées des intérêts aux taux exorbitants de plus de 7 % : dans la plupart des cas, ces intérêts représentent 100 % des sommes initiales.
« La créance est certaine et exigible », a expliqué un juriste présent, dans une ambiance de plomb. Un éventuel recours en annulation ne sera pas suspensif. En clair : il va falloir payer. Ce qui peut mettre la plupart des entreprises concernées en grandes difficultés, allant jusqu’au dépôt de bilan. De plus, en cas de non-paiement, l’Etat pourrait appliquer la jurisprudence Deggendorf, c’est-à-dire le blocage du versement des aides nationales en cas de non-régularisation de la situation des OP ou des producteurs.
Front du refus et demande de création d’une commission d’enquête parlementaire
Les producteurs du Sud-Ouest en appellent à l’organisation d’un front du refus. Et les deux sénateurs présents ont évidemment été sollicités. « Il faut réfléchir à une méthode de fonds spécial », a demandé François Lafitte.
Un prêt à taux zéro et à très long terme pourrait également prendre en charge les intérêts. L’idée est d’aider les producteurs et les OP à tenir, à faire face aux échéances, sans mettre en péril leurs entreprises en attendant la fin des procédures judiciaires. Le recours en annulation, déposé par Fedecom auprès de la Cour de Justice du Luxembourg, a été plaidé le 23 avril dans « une ambiance houleuse ». Le verdict sera connu en octobre prochain.
Mais François Lafitte veut aller plus loin et a réclamé aux deux sénateurs la création d’une commission d’enquête parlementaire car « il y a une responsabilité quelque part, et ce n’est pas celle des producteurs », explique-t-il pointant le rôle de l’Etat et des politiques. Les deux sénateurs, par ailleurs co-présidents du groupe de travail fruits et légumes à la Haute assemblée, n’ont pu que s’engager à soutenir cette démarche. Enfin, un autre élu lot-et-garonnais va être mis à contribution. Il s’agit de Jérôme Cahuzac, député du cru, et qui est depuis le 16 mai dernier le nouveau ministre délégué chargé du Budget.