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Plant InterCluster
Passeurs entre la science et l’entreprise

Réunis au sein de Plant InterCluster, les quatre pôles de compétitivité du végétal français (Vegepolys, PEIFL, QualiMed, Qualitropic) travaillent au rapprochement du monde de la recherche avec celui de l’entreprise

Rendez-vous avait été pris le 23 juin dernier dans le quartier de Bercy à Paris, avec quatre représentants des pôles de compétitivité français dédiés au végétal : Isabelle Guichard, directrice de QualiMéditerranée (QualiMed), Gino Boismorin, directeur de Vegepolys, Gilles Fayard directeur du PEIFL (Pôle européen d’innovation fruits et légumes) et Céline Barbier, chargée de mission International de Qualitropic. Rares sont les occasions pour eux d’être présents ensemble sur la capitale. Leur situation géographique (Angers, Montpellier, Avignon et La Réunion pour Qualitropic) ne le permet pas souvent. Alors, la tenue d’une réunion dans les locaux de la DGCIS (Direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services) s’avérait être une parfaite occasion de faire le point sur leur activité.
C’est en 2004 que la France a lancé une nouvelle politique industrielle mettant en avant l’innovation dont sont issus les pôles de compétitivité. Aujourd’hui, il existe 77 pôles couvrant pratiquement tous les secteurs de l’économie et de l’industrie, du transport à la santé, du textile à l’agroalimentaire. Leur point commun est de rassembler entreprises, centres et organismes de recherches autour d’un thème porteur dans une démarche commune de développement. Les projets labellisés par les pôles, outre le financement, peuvent profiter des synergies générées entre les différents partenaires. Les domaines couverts par les pôles du végétal sont tout aussi multiples : agro-écologie, création et sélection variétale, qualité sanitaire des semences, nouveaux procédés pour l’extraction ou la transformation… Depuis leur création, ils ont lancé plusieurs programmes qui reflètent les besoins et les attentes de la filière. Un rapide florilège permet de comprendre les champs d’intervention : “TutaPI” lancé en janvier dernier, qui vise à trouver de nouvelles solutions biologiques permettant de contrôler le ravageur Tuta Absoluta pour la tomate (PEIFL), “Fruit Breedomics”, projet européen devant permettre de faire le lien entre connaissance scientifiques et techniques de sélection pour les arbres fruitiers (Vegepolys), “Tailorpack” pour la conception d’emballages biodégradables actifs adaptés à la conservation des fruits et légumes (QualiMed et PEIFL) ou encore “Biophyto”, pour la production de mangues sans pesticides de manière durable à La Réunion (Qualitropic)…
Cependant, « il existe aussi d’autres champs qu’ils peuvent investir, confirme Gino Boismorin. Ainsi avec le soutien de la Région Pays de la Loire et de la Société Publique Régionale, nous avons lancé un projet d’accompagnement design dédié aux entreprises du végétal, qui comprend la recherche de nouveaux usages spécialement dans l’univers de l’enfant, ou qui se penche aussi sur l’apport du design pour les contenants de végétaux. » Les pôles s’investissent aussi dans le domaine de la formation et de l’emploi. De fait, face à une relative désaffection envers les métiers, Isabelle Guichard précise : « Nous travaillons ainsi plus spécifiquement avec l’enseignement supérieur en région Languedoc-Roussillon pour faire remonter les besoins des entreprises » et Céline Barbier d’ajouter « l’internationalisation est aussi une donnée importante. Nous sommes aussi en contact avec des chercheurs d’Afrique du Sud. »
Participer à l’attractivité des métiers est aussi une des autres missions des pôles : « Par exemple, le salon Miffel, dont le PEIFL est partenaire, permet aux jeunes générations de mieux connaître les professions liées au monde des fruits et légumes », renchérit Gilles Fayard. Le maintien de la biodiversité fait aussi partie des objectifs et c’est avec Qualitropic qu’il prend un sens particulier : « Nous avons développé le programme “Légumes lontan” à La Réunion et à Mayotte dans cet esprit, explique Céline Barbier, afin de préserver des produits bien connus sur place et pour lesquels les producteurs locaux risquent de perdre l’usage et par là même leur bénéfice nutritionnel. C’est aussi une de nos missions. »

Consortium et collaboration
On pourrait croire au premier abord que faire cohabiter des entreprises privées et des organismes de recherches au sein d’un pôle de compétitivité peut être délicat.
En fait, cela se passe beaucoup mieux que l’on pourrait le croire : « Au sein des pôles, les entreprises ne sont pas que concurrentes mais sont souvent complémentaires, précise d’emblée Gino Boismorin. En fait, le challenge d’un pôle est justement de faire cohabiter des acteurs de culture différente. C’est à nous de nous placer comme le lieu idéal qui permet d’engager et d’approfondir le domaine du privé et celui du public. » Et ce qui n’est pas toujours évident dans la mesure où certaines entreprises ne disposent pas de culture R&D. « De plus, la perception du temps est fortement différente entre une entreprise privée qui agit dans le court terme, trois-quatre mois, et le monde de la recherche qui travaille plutôt sur une période de trois à quatre ans. Alors, il peut arriver qu’une entreprise nous contacte, nous expose son problème et nous demande quelle solution nous avons pour y remédier. Ce n’est pas ainsi que nous pouvons procéder. Nous avons certainement aussi un rôle de décodeur », poursuit-il. Isabelle Guichard confirme : « Tout l’enjeu réside dans une intégration par l’amont de la filière de l’application commerciale d’un projet. » La présence d’interprofessions fortes s’avère indispensable et un véritable accélérateur pour le lancement des projets : « C’est ce qui permet aux pôles de mieux travailler, reconnaît Gilles Fayard. En ce sens, la réforme économique de la filière fruits et légumes est un point positif car la structuration de la filière est essentielle. Même si sur certains secteurs, il reste encore du travail à accomplir. Et que d’une manière générale, on pourrait regretter que la grande distribution soit absente de nos démarches collaboratives. »
Les échanges permanents entre pôles permettent aussi de mieux structurer les travaux : « Un exemple probant est celui de la recherche variétale dans le cadre de la réduction de l’usage des phytosanitaires, explique Gino Boismorin. C’est un processus d’obtention long, de cinq à sept ans. Cependant, pour les semences potagères, le transfert de connaissances avec nos collègues du pôle de compétitivité des céréales a permis de réduire le temps d’obtention à trois-quatre ans. » D’après Céline Barbier « les résultats offrent des retombées économiques intéressantes. Par extension, la colabellisation de projets, c’est-à-dire portés par plus d’un pôle, est une démarche très positive pour accélérer la recherche. »
En fin de compte, pour nos quatre invités, la mission de fond des pôles de compétitivité est de renforcer l’interface entre les entreprises et les organismes de recherche pour favoriser l’innovation. « Nous disposons ensuite d’outils juridiques et techniques permettant de préciser d’emblée sur un projet l’apport et les engagements de chacun, ainsi que la répartition des retombées de la propriété industrielle », précise Gino Boismorin.
Car ce dernier point est particulièrement important dans un tel contexte comme le souligne Céline Barbier : « Nous ne sommes pas là pour assurer une pure prestation de services. Dans tous les projets labellisés, il y a un partage des risques comme des bénéfices pour les porteurs de projets et leurs partenaires R&D. Pour cela, les pôles recommandent souvent de monter un consortium entre les différents partenaires sur un projet permettant de mettre en place une vraie mutualisation des moyens. Et cela quelqu’en soient les résultats. Même si on ne peut garantir de trouver l’unique solution au problème, on peut quelquefois faire des trouvailles intéressantes en cours de route qui doivent aussi bénéficier à tous. »
L’union fait donc la force. C’est ainsi qu’est officiellement né en mai dernier Plant InterCluster (PIC) qui regroupe, outre les quatre pôles végétaux, un cinquième, Céréales Vallée, dédié au domaine des grandes cultures. Etait-ce vraiment une nécessité de se regrouper ainsi ? « Absolument. Le monde est vaste et nous ne pourrions le conquérir seul, reconnaît Gino Boismorin qui anime ce réseau. En effet, notre union fait la force et nous permet plus de lisibilité. Le végétal est notre dénominateur commun mais chacun garde sa spécificité. Nous allons pouvoir être présents sur un plus grand nombre d’événements, chacun pouvant représenter le groupe. »

Réseau mondial
Pour Isabelle Guichard, « nos cinq pôles réunis en consortium deviennent ainsi un guichet unique capable de répondre à toutes les problématiques touchant au végétal, aussi bien en termes de production que de transformation. » De fait, l’ensemble forme un réseau d’envergure : plus de 580 entreprises et 130 organismes de recherche et de formation. Le PIC a frappé fort en organisant, fin mai, les premières rencontres internationales des pôles de compétitivité de la filière du végétal. Plus de 70 représentants de 27 clusters venus de 16 pays principalement d’Amérique du Nord et du Sud et d’Europe ont participé à cette première édition. Les sujets abordés furent divers et les échanges intéressants à plus d’un titre : « Par exemple, en France, nos pôles relèvent du ministère de l’Agriculture. Nous avons ainsi pu voir qu’en Espagne, agence de développement et structure type Oséo ne faisaient qu’un dans les régions », se souvient Gilles Fayard. Cette réunion est le fruit d’un travail au long court : « Cet hiver, nous avons réalisé une cartographie mondiale identifiant les clusters homologues selon leur domaine d’excellence, explique Gino Boismorin. A la suite de ce travail nous avons souhaité les réunir pour la première fois à Paris sous le parrainage de la DGCIS. Ces rencontres ne sont qu’une première étape. L’ambition du consortium est d’installer un fonctionnement de réseau mondial. » Cela se concrétisera en 2012 par deux missions pour les acteurs du Pic, la première au Chili et au Brésil, la seconde en Afrique du Sud. Et une dimension internationale, cela permet aussi de peser sur les autres décideurs dans la partie : « Faire du lobbying, peut-être, mais uniquement en ce qui concerne les réglementations et encore il faut que cela se fasse en harmonie avec tous les autres acteurs impliqués », précise Isabelle Guichard. Là aussi le collaboratif prime.

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