Carré des Halles

Pari gagné aux portes du Min de Lille

A entendre tout ce qui se murmure dans le microcosme des fruits et légumes de la métropole lilloise, le magasin Carré des Halles aurait créé un véritable électrochoc dans la profession. Mais depuis l’inauguration de leur première enseigne implantée aux portes du marché de gros de Lille (ex-Min de Lomme), les deux fondateurs se sont imposés une discrétion toute légitime. Volontairement. « Car, on n’arrête pas de venir nous observer discrètement… », explique Jean-François Hernu, directeur général. Même si parfois la concurrence est stimulante, ils tiennent à en dire le moins possible sur leur projet et sur le bilan qu’ils tirent au bout de trois mois de fonctionnement.
L’emplacement du premier Carré des Halles ne doit rien au hasard. Bien sûr, les promoteurs du projet avaient jeté dans un premier temps leur dévolu sur des bâtiments, abritant une ancienne concession automobile Fiat, implantés à Roncq au Nord de l’agglomération lilloise. L’endroit était plus que stratégique, car situé aux portes mêmes de l’un des plus gros magasins Auchan de cette agglomération urbaine qui draine par ailleurs une importante clientèle belge. En janvier 2009, la Commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) émettait un avis défavorable à cette implantation, repoussant dans le temps le projet initial.

De nombreux réaménagements ont été effectués pour l’installation du magasin
Aux portes du marché de gros de Lille, les communes limitrophes (Lomme et Ennetières-en-Weppes) ont fait les efforts nécessaires pour permettre l’implantation de ce magasin installé dans des anciens bâtiments Honoré. Elles ont modifié le document d’urbanisme (PLU) pour permettre l’installation d’un commerce de détail dans une zone réservée au commerce de gros. La direction de l’ex-Min les a également beaucoup aidés dans cette implantation qui ne pouvait que valoriser l’image d’un marché de gros qui peine à se développer, à l’image de nombreux Min français.
Pour les promoteurs du Carré des Halles, le pari était risqué ! L’enseigne est certes implantée à l’entrée du Marché de gros de Lille, mais il est surtout situé à quelques centaines de mètres du magasin Auchan-Englos, celui-là même qui vient de fêter ses quarante ans. « Avec 50 000 à 75 000 habitants, cette zone de chalandise est exceptionnelle », assurent Guillaume Torck et Jean-François Hernu, les deux fondateurs. Et autour du rond-point tout proche, il passe en moyenne 15 000 à 20 000 véhicules/jour ! Tout a donc été fait pour que le client potentiel remarque la nouvelle enseigne et qu’il soit incité à parcourir ces dizaines de mètres pour pénétrer dans le magasin. On a même nivelé et dégagé les quelques arbres du rond-point pour rendre l’enseigne encore plus visible !
Le pari du premier Carré des Halles semble d’ores et déjà gagné. L’implantation de deux nouveaux magasins devrait être néanmoins décidée d’ici quelques mois. Le bâtiment se voit de loin… et le parking ne désemplit pas. Avec des airs (modestes) de halles de Baltard nouvelle formule, le chaland ne peut se tromper. Les concepteurs du projet ont sûrement tiré les leçons de la modernisation ratée des halles lilloises implantées dans le quartier de Wazemmes où, il faut bien l’avouer, on fait le plus souvent une contre-publicité aux fruits et légumes régionaux de qualité !
Les Halles d’une ville sont souvent un petit village, avec des allées, des places, des recoins et des vitrines… : leur premier magasin reprend l’essentiel de ces principes jusque dans l’architecture extérieure.

Tout est fait pour “Faire envie !”
A peine entré dans le magasin d’une surface de 1 000 m² (3 000 m² de surface au sol au total), on a tout de suite une sensation de calme et de sérénité. Ni stress, ni précipitation. Les achats peuvent se faire en toute quiétude.
Ici, tout est fait pour rassurer le consommateur et lui permettre d’acheter dans les meilleures conditions possibles. L’espace entre les allées, un éclairage adapté, de nouveaux linéaires aux allures de minivagues situés à bonne hauteur et sur lesquels sont disposés soigneusement les fruits et légumes. Car au Carré des Halles, on ne renverse pas les cageots ni les caisses de fruits sur les étals. Une théâtralisation du lieu de vente adaptée (juste ce qu’il faut) est plus que nécessaire pour stimuler les ventes.
Le consommateur n’avait plus l’habitude des précautions d’usage nécessaires à la présentation du produit, au Carré des Halles, la tomate Cœur de bœuf est placée sur un lit de paille et les concombres rangés soigneusement. Quant aux salades, elles reçoivent une brumisation régulière. Au rayon des légumes anciens, le client peut trouver du rutabaga, des panais, des topinambours ou du cerfeuil tubéreux. Sans oublier les scorsonères, les carottes noires ou les vitelottes !
Au-dessus des rayons, des panneaux explicatifs : sur la culture, le producteur et le lieu de production. Entre les produits, des fiches recettes qui donnent envie aux consommateurs de se remettre à la cuisine ! Pour faire envie, ou faire découvrir cette palette de produits en grande partie régionale. « Sur l’origine de l’approvisionnement, 80 % de nos fruits et légumes proviennent du Nord-Picardie, dont une partie est fournie par les producteurs locaux implantés dans la ceinture verte de Lille », soulignent les deux hommes qui veulent avant tout faire jouer la fibre régionale de leurs consommateurs. Un signe fort pour le développement durable et le bilan carbone…, on ne peut plus d’actualité !

Une provenance régionale
Pour parfaire l’offre, ils ont fait le choix de trois métiers : la viande, les fromages et les fruits et légumes. Sans oublier la boulangerie située à l’entrée du magasin à l’enseigne “Le Fournil de mon enfance” développée par une société indépendante.
« Irréprochable sur la fraîcheur ! », lance aussitôt Jean-François Hernu qui défend « la vente d’un produit frais à un prix abordable ». Dès l’entrée, ce sont les quatre linéaires de fruits et légumes qui attendent le client. Avant d’atteindre le rayon des viandes et celui des fromages situés au fond du magasin, il devra traverser “La place du marché”, lieu habituel des animations du mercredi avec les enfants ou du samedi en compagnie d’un chef de cuisine. De chaque côté, la crémerie, les produits du monde, la charcuterie et les volailles…
La volonté des deux créateurs a été de positionner leur nouvelle enseigne entre les hypermarchés qui proposent certes « des tarifs compétitifs, mais dont les produits ne sont pas toujours goûteux » et le commerce de détail « aux produits de qualité, mais aux tarifs élevés ». C’est en partant de ce constat-là qu’ils ont bâti progressivement leur projet. « Nous voulons être des spécialistes de l’ultra frais et de l’authentique avec une provenance essentiellement régionale : tout cela aux meilleurs prix ! », concluent-ils.