Ail, Oignon, Echalote - Protection
Optimisation dans l’homologation des pesticides
Le catalogue des usages concernant les produits phytopharmaceutiques autorisés pour traiter toutes les cultures vient d’être revu. Exercice pratique avec l’oignon.
Comme annoncé par fld le 13 mars 2012, le ministère de l’Agriculture a publié, en début d’année, les notices du nouveau catalogue des usages après trois ans de travail. Cette nouvelle nomenclature entre en application normalement le 1er janvier 2013. Les principaux objectifs étaient de la simplifier, de la rendre plus clair et de résoudre de nombreux usages dits orphelins. Pour rappel, on entend par usage un groupe composé d’une culture, d’un mode d’application et d’une cible pour lequel un ou plusieurs produits phytopharmaceutiques peuvent être autorisés.
Concrètement, l’autorisation de mise sur le marché (AMM) d’un pesticide nécessitait souvent une demande spécifique pour lutter contre une maladie ou un insecte et ce pour chaque culture que l’on voulait traiter. Par exemple, le fongicide Acrobat utilisé contre le mildiou, le champignon qui cause le plus de dégâts aujourd’hui sur l’oignon a été autorisé aussi sur échalote parce que BASF Agro en a fait la demande. Or cette démarche a un coût pour les firmes phytosanitaires, notamment pour les productions qui présentent de faibles surfaces d’où l’existence de nombreux usages dits orphelins. Selon les estimations du Forum Phyto, 20 à 30 % des usages orphelins vont ainsi être résolus. Le champ d’application d’une AMM en vigueur pour une culture va s’étendre ainsi à l’ensemble des cultures qui lui sont rattachées dans le nouveau catalogue. Autre conséquence, ce relookage aboutit en toute logique à réduire significativement les nombreux usages en cours, de 800 à 550 pour les légumes et de 500 à 200 pour les fruits. Aujourd’hui, il sera donc possible d’obtenir une AMM simultanément pour plusieurs cultures mais sous certaines conditions.
La LMR doit être disponible pour chaque culture listée dans le regroupement. C’est le cas pour la carotte, le céleri-rave, le panais, le raifort, le topinambour, le persil à grosse racine, le cerfeuil tubéreux et le crosne. La LMR pour ces plantes a été élaborée à partir de la pratique agricole revendiquée. Celle du céleri-rave, par exemple, peut être extrapolée à partir d’une base de donnée complète issue de la carotte. La société phytosanitaire doit donc demander l’autorisation de mise sur le marché d’un produit phytopharmaceutique pour toutes ces cultures si le besoin de traitement s’avère nécessaire. Pour les choux, c’est plus compliqué. Quatre catégories ont été maintenues. La firme qui souhaite homologuer un produit qui vise l’usage “choux traitement des parties aériennes chenilles phytophages” doit fournir des données résidus sur les choux feuillus, les choux pommés, les choux à inflorescence et les choux-raves si elle veut couvrir l’ensemble des choux.
A ces regroupements existent toujours des exceptions. Par exemple, l’oignon de printemps est regroupé avec le poireau. La ciboule et la ciboulette sont deux lilliacées qui ne font pas parties du même groupe. La première relève des mêmes usages que le poireau tandis que la seconde est toujours répertoriée dans les fines herbes du catalogue des plantes à parfum, médicinales, et aromatiques.
Les LMR doivent être connues
Conformément au Règlement LMR 396/205 les données résidus des espèces dites majeures (parce qu’elles représentent une certaine surface de production dans l’Hexagone) vont servir de références pour les cultures appartenant au même groupe résidus. Ainsi, les données disponibles pour l’oignon – qualifié de référence majeure aussi bien au Nord qu’au Sud de la France – peuvent être utilisées pour l’ail, l’échalote et tout autre bulbe de lilliacées et ornementaux. Sur cette base, et dès l’entrée en vigueur officielle du nouveau catalogue des usages, les insecticides à base de spinosad autorisés sur oignon pour lutter contre les thrips pourront être utilisés sur l’échalote et l’oignon puisque des LMR pour cette substance sont disponibles sur l’ensemble des cultures du groupe.
En fongicide, les professionnels demandent que l’homologation du fongicide Kyriel (fluopicolide + propamocarbe) autorisé sur oignon pour lutter contre le mildiou le soit aujourd’hui sur échalote. Mais aujourd’hui, cette demande est-elle possible ? « L’absence de résidus disponibles pour le propamocarbe sur échalote obère l’utilisation du Kyriel sur cette culture », note Sophie Szilvasi, référent national légumes, pommes de terre et plantes à parfum, aromatiques et médicinales à la sous-direction de la qualité et de la protection des végétaux au ministère de l’Agriculture. Il en est de même pour le fongicide Signum (pyraclostrobine + boscalid) homologué sur oignon et échalote pour lutter contre le botrytis squamosa. Les professionnels souhaiteraient qu’il le soit aussi sur botrytis allii. Avec ce catalogue, cette demande devrait être satisfaite puisque les botrytis sont regroupés dans un usage pourriture grise et sclérotinioses pour le groupe oignon. En revanche, il est fort probable que le souhait d’autorisation de ce même fongicide contre la pourriture blanche de l’ail (Sclerotium cepivorum) en traitement de caïeux avant plantation soit refusé aux vues des premiers résultats indiquant des dépassements de résidus.
De nouvelles molécules en perspective
En parallèle du remaniement du catalogue des usages, des autorisations d’AMM sont attendues, notamment pour la lutte contre les mouches des légumes dont plusieurs usages étaient devenus orphelins suite au retrait de certains pesticides. Aujourd’hui, seul le chlorphyrifos-éthyl est autorisé sur oignon et échalote. D’autres molécules le sont mais pour d’autres familles de cultures comme la téflutrine en traitement de sol pour les choux ou la lambda-cyalothrine pour les carottes, céleris-raves et navets. Les choux sont relativement “favorisés” puisqu’ils peuvent être traités avec trois molécules (chlorphyrifos-éthyl, spinosad, téflutrine) mais à des stades différents de la culture. L’idéal serait d’avoir un choix de substances actives pour un même stade de développement de la culture afin de limiter la diminution de l’efficacité des pesticides dans le temps, phénomène plus ou moins inéluctable en raison de l’augmentation du nombre des mauvaises herbes, des champignons ou des insectes les plus insensibles ou devenus insensibles aux pesticides.
Dans le cadre de la lutte contre les mouches des légumes, des études de résidus sont en cours sur la cyperméthrine en vue d’une homologation en traitement de sol pour oignon, carotte, chou, navet et radis. Il en est de même pour le devenir des métabolites de la téflutrine et son homologation en traitement de sol pour l’oignon, la carotte, l’ail, le poireau et le radis, cette substance étant déjà autorisée sur chou. Pour les parties aériennes, aucun dossier à court terme n’est ouvert pour l’oignon et ses cultures associées contrairement à la carotte. Pour cette dernière, deux spécialités sont étudiées, l’une à base de chlorantraniliprole déjà utilisé contre le doryphore en pomme de terre, tomate et aubergine et l’autre à base de deltaméthrine et thiacloprid, mélange déjà autorisé contre les doryphores et pucerons de la pomme de terre.
A moyen terme, et toujours pour améliorer la lutte contre la mouche, des demandes pourraient s’orienter vers le fipronil en traitement de semences pour l’oignon et les choux ou la clothianidine pour les carottes et le céleri-rave. Par ailleurs, plusieurs molécules dont le cyantraniliprole, une nouvelle substance, et le zétacyperméthrine sont à l’étude pour les traitements en parties aériennes, notamment carotte, navet, radis, céleri-rave et chou.