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ARBO
Observer les prédateurs généralistes

Certains traitements phytosanitaires peuvent être évités en laissant les prédateurs naturels jouer leur rôle de régulateurs dans ses vergers.

La recherche a démontré le potentiel des stratégies de régulation naturelle des bio-agresseurs par la mise en place d’un environnement favorable aux auxiliaires. Pour autant, il n’est pas évident de réaliser la transition d’un verger dépendant en intrants vers un verger diversifié accueillant une biodiversité fonctionnelle suffisante pour mieux contrôler les insectes ravageurs. Mais en arboriculture, l’observation régulière des auxiliaires permet de connaître leurs dynamiques et d’orienter les choix phytosanitaires. Au départ, les observations servent à identifier les zones dans lesquelles les prédateurs sont plus abondants et leur vitesse de réaction face à l’arrivée des ravageurs. Avec un peu d’entraînement, il est possible de réaliser des observations aux périodes stratégiques pour éviter certains traitements curatifs. Par exemple, recenser les auxiliaires actifs dans les foyers de puceron cendré (Dysaphis plantaginea) au stade chute des pétales peut servir à reconsidérer un traitement post-floraison.

Evaluer le taux de prédation des foyers de pucerons cendrés

Pour cela, des méthodes simplifiées d’observation existent. Pour ne pas être attiré uniquement par les arbres atteints, il vaut mieux suivre une méthode d’échantillonnage stricte. Par exemple, il est possible de cheminer en Z ou en croix dans le verger, ou encore d’observer un arbre sur trois ou cinq le long d’un rang. Les observations doivent être réalisées dans des conditions météo stables, sans précipitation ou vent, et en matinée car les auxiliaires sont moins mobiles à ce moment de la journée. L’observation visuelle de foyers de pucerons cendrés consiste en un premier suivi entre le stade bouton rose et la floraison. Il est nécessaire de repérer une centaine de bouquets avec un ruban coloré et de compter la proportion qui porte des pucerons. Au stade chute des pétales, entre 10 et 20 foyers repérés au premier passage sont à ouvrir pour observer les prédateurs (cf. encadré) et connaître le taux de prédation. A cette période précoce de la saison, il est plus difficile de repérer un grand nombre d’auxiliaires dans les foyers. Ils ne sont pas pour autant absents du verger.

Observer l’évolution des auxiliaires au cours du temps

La méthode de battage est favorable pour voir les gros arthropodes : coccinelles, chrysopes, araignées, punaises prédatrices et forficules. Il s’agit d’échantillonner vingt arbres au sein du verger puis de frapper trois fois une branche par arbre au-dessus d’un cadre blanc, en alternant la face de l’arbre frappée (nord/sud). Les auxiliaires sont observés et identifiés vivants. Il est conseillé de faire un premier suivi au stade chute des pétales et de suivre un mois plus tard l’évolution des auxiliaires dans la canopée. Les cartes de prédation sont des petits cartons exposés au verger sur lesquels sont collés des pucerons ou des oeufs de papillons. Vingt-quatre heures plus tard, on peut les relever et compter le nombre de proies prédatées par des auxiliaires. Cette méthode demande plus de temps à la préparation, à moins de participer aux suivis organisés par le Groupe de recherche en agriculture biologique (Grab) pour recevoir les cartes prêtes.

Offrir aux auxiliaires le gîte et le couvert

Pour la pose de bandes-pièges, une bande de carton ondulé est glissée dans une bouteille dont on a découpé le fond. Cette bouteille est accrochée verticalement contre le tronc, bouchon vers le haut. La méthode permet de comptabiliser des auxiliaires qui viennent y chercher refuge. Les pièges sont laissés pendant une semaine, ils sont ensuite ouverts délicatement au-dessus d’un récipient. Il faut ensuite secouer pour récupérer les insectes présents qui sont alors identifiés et comptés. Un premier suivi peut être réalisé au début du pic d’abondance des forficules, généralement fin mai, et le deuxième pendant leur pic d’abondance, c’est à-dire vers la mi-juin. L’abondance et la période d’arrivée des prédateurs dépendent beaucoup de la diversité floristique dans le verger. Ils sont plus rapidement actifs dans les vergers s’ils ont trouvé le gîte et le couvert à proximité, voire dans la parcelle tout au long de l’année. Pour favoriser leur abondance et diversité, il est important d’implanter des haies et couverts qui fleurissent et leur offrent un refuge feuillu même en hiver, comme le lierre.

Qu’en disent les producteurs ?

Grâce au projet européen EcoOrchard auquel participe le Grab, 40 arboriculteurs de neuf pays européens ont mis en application une ou plusieurs de ces méthodes chez eux en 2016. En fin de saison, ils ont fait un retour positif sur ces outils : facilité d’usage, aide pour se former à la connaissance des auxiliaires, et finalement pour ajuster leurs traitements par rapport à leurs observations. 70 % des suivis a duré moins d’une heure. Les deux tiers des producteurs ayant comparé différentes modalités, par exemple l’impact d’une haie sur la prédation, ont observé des différences. A la suite de ces observations, plusieurs producteurs ont prévu de modifier la gestion de leurs vergers en implantant des bandes fleuries par exemple.

Les forficules

Très mobiles et voraces, ils sont actifs dans la frondaison dès leur 3ème stade larvaire, ce qui est généralement postérieur au pic d’activité du puceron cendré. L’adulte consomme entre 40 et 100 pucerons par jour. Actifs de nuit, ils s’abritent de jour en groupe dans des endroits sombres, ce qui rend leur observation directe difficile.

Les coccinelles

65 % des espèces de coccinelles (adultes et larves) prédate des pucerons mais peut se rabattre sur des ressources alimentaires alternatives au début du printemps. L’adulte pond les oeufs par groupes au printemps dans des endroits où les larves n’auront pas de difficulté à trouver des proies.

Les syrphes

Ce sont les larves qui exercent une importante activité de prédation. A cause de la faible mobilité des larves, les lieux de ponte sont ciblés pour rapprocher la larve de ses proies, comme chez les coccinelles. Les générations se renouvellent deux à trois fois par an. Les syrphes adultes se nourrissent de nectar et de pollen. Il est donc intéressant de planter des fleurs dans le verger pour les attirer.

Les punaises prédatrices

Parmi les nombreuses familles de punaises existantes, toutes celles inféodées aux arbres sont des auxiliaires (Miridés, Anthocoridés et Nabidés).

Les chrysopes

Ce sont les larves qui se nourrissent de pucerons. Elles arrivent assez tôt dans la saison et sont actives le temps de leur développement qui dure 15 à 20 jours, durée qui leur permet de consommer jusqu’à 500 pucerons.

Les araignées

Leur intérêt est d’être présentes dans les vergers tout au long de l’année, puisqu’une diversité importante d’espèces se relaie au fil des saisons. Ainsi, elles exercent une prédation dès le stade fondatrice du puceron, ce qui a un impact sur la taille et le nombre de colonies pour le reste de la saison. Mais elles sont généralistes au point de s’attaquer indifféremment aux ravageurs et aux auxiliaires.

Un manuel pratique détaillant ces méthodes d’observations est disponible dans le cadre du projet européen EcoOrchard, auprès de François Warlop francois.warlop@grab.fr 04 90 84 01 70

Retrouver certaines des méthodes décrites ici, dans la vidéo d’Arnaud Dufils sur www.youtube.com, tapez « biodiversité fonctionnelle évaluation » dans la barre de recherche.

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