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Marché de gros, un concept plein d'avenir

Les marchés de gros, en Europe comme en Méditerranée et au-delà, demeurent le meilleur centre d'échanges pour le commerce des fruits et légumes. Et cela quel que soit son statut juridique.

Héritiers des halles historiques, et finalement aussi des toutes premières places de marché de l'Humanité, quand la nécessité de l'échange entre les peuples s'est imposée, les marchés de gros demeurent au XXIe siècle un acteur important de la distribution des fruits et légumes en Europe et au-delà. Dans le cadre de Medfel 2015, une conférence a été organisée sur le sujet en prenant le thème : “Quels sont la place et le rôle des marchés de gros dans la distribution des fruits et légumes dans l'Euroméditerranée ? Etat des lieux et perspectives”.

Des réalités différentes en Europe

Même s'ils partagent bon nombre de points communs, les marchés de gros présentent des visages différents, selon la force des circuits de distribution. Manuel Estrada, président de l'Union mondiale des marchés de gros, et Maguelone Pontier, secrétaire générale de la Fédération française des marchés de gros (FFMG), se sont accordés sur ce constat : l'Europe présente en effet un double visage, avec des pays où la grande distribution est très présente, plutôt au nord, et d'autres où la place du commerce traditionnel est restée importante, plutôt au sud. « La France se situe un peu sur la position médiane entre ces deux extrêmes, explique Maguelone Pontier. Nous résistons à la grande distribution et plutôt bien : les vingt marchés de gros français assurent un chiffre d'affaires d'environ 13 Md€ et commercialisent 4,5 Mt de produits. Ils sont la centrale d'achat du commerce de proximité mais ils ont aussi un rôle dans les échanges internationaux, aussi bien à l'import qu'à l'export, bénéfiques pour la balance commerciale française ». Pablo Vilanova, directeur de la Stratégie et du Marketing du marché de gros de Barcelone, a expliqué comment la place catalane s'est positionnée : « Barcelone approvisionne le commerce traditionnel bien évidemment, mais le marché a aussi intégré la grande distribution. En cela, nous nous caractérisons comme une unité alimentaire. Celle-ci comprend les grossistes traditionnels, la GMS tout comme les importateurs et les exportateurs et les entreprises de transport et de logistique. Avec plus de 150 sociétés spécialisées dans les fruits et légumes et environ 1,7 Mt traités par an (sur les 2,5 Mt en global), Barcelone se positionne comme une sorte de cluster alimentaire. » Un exemple opérationnel de ce qu'est la réalité d'un marché a été donné par Gilles Foxonnet, président du Marché de Perpignan Méditerranée. « Un marché de gros, comme celui de Perpignan, est un outil structurant, incontournable à la vie économique de l'agglomération. Quand il s'est s'agi d'entamer la rénovation du marché, nous avons, en premier lieu, investi dans un outil de travail nouveau et nous nous sommes tournés vers les opérateurs. Ce qui permet d'accueillir d'autres activités que celles liée à la production. » Sujet d'un important programme de rénovation, celui-ci doit permettre d'agir directement sur le maintien d'une agriculture périurbaine et familiale et permettre la valorisation complète ou partielle de leurs productions. La première tranche des travaux, la “Halles aux carreaux” devant accueillir les 150 producteurs locaux, devrait être officiellement inaugurée à la rentrée. Mais pour Gilles Foxonnet, cela va plus loin : « Même dans une zone comme celle de Perpignan, connue pour sa ceinture verte, l'existence d'un marché de gros permet de nouer le contact entre les différentes parties de la filière mais aussi au-delà d'encourager les relations entre Perpignan et Barcelone, autour de la notion culturelle catalane. »

Marché de gros public, privé, les deux ?

Le statut des marchés de gros est un sujet récurrent. Pour Maguelone Pontier, « historiquement, les marchés d'intérêt national sont, en France, publics. Dans le cas du marché de Corbas, les grossistes, alors installés sur le Min de Perrache, ont voulu s'emparer de leur outil de travail. Ce qui est une bonne chose. Cependant, la philosophie et le rôle du marché demeurent. En ce qui concerne Rungis, la privatisation partielle du capital social de l'organisme gestionnaire du marché n'a pas remis en cause son statut et sa mission définis par la loi. Un marché de gros a la responsabilité d'assurer l'approvisionnement des villes et la sécurité sanitaire des produits alimentaires vendus. » Manuel Estrada a considéré qu'il n'existait pas de stratégie commune aux marchés de gros : « Dans le monde méditerranéen, le modèle le plus fréquemment rencontré est celui de la gestion publique des marchés de gros. C'est le cas en Espagne ou encore en Italie, où l'implication des villes est forte. Mais ailleurs, on rencontre aussi des marchés qui sont sous gestion privée, comme en Russie. On pourrait aussi parler de Copenhague ou de Sydney. En fait, il faudrait plus correctement parlé de marchés privatisés plutôt que de marchés privés ex nihilo. Je veux dire qu'à un moment de l'histoire du marché, il apparaît des conditions spécifiques qui amènent le basculement entre le public et le privé. D'ailleurs, en tant qu'observateur, j'aimerais aussi faire remarquer que la France, qui est connue pour avoir créé et développé le modèle d'entreprise étatique telle que nous la connaissons aujourd'hui, est aussi le premier pays dans l'Union européenne qui a complètement privatisé un marché de gros – en l'occurrence celui de Corbas – et partiellement privatisé un autre, et non des moindres, celui de Rungis. »

Cet article est un

Cet article est un résumé de la conférence “Quels sont la place et le rôle des marchés de gros dans la distribution des fruits et légumes dans l'Euroméditerranée ? Etat des lieux et perspectives” qui s'est tenue le 22 avril durant Medfel. Les intervenants étaient Manuel Estrada (1), président de l'Union mondiale des marchés de gros, Maguelone Pontier (2), secrétaire générale de la Fédération française des marchés de gros, Pablo Vilanova (3), directeur de la Stratégie et du Marketing du marché de gros de Barcelone, et Gilles Foxonnet (4), président du Marché de Perpignan Méditerranée, maire de Baixas et vice-président de l'agglo à l'agriculture.

Le monde des marchés en fête !

Du 15 au 31 mai se déroule la Fête internationale des marchés à l'initiative de l'Union mondiale des marchés de gros, qui regroupe aussi ceux de détail. Plusieurs milliers de marchés de plein-vent et couverts en Europe et dans le monde y participent, dont 500 en France. Des centaines d'animations sont prévues, sous le slogan “J'aime mon marché !”.

Circuit de proximité, pas circuit court

Après le développement de la grande distribution dans les années 70, qui a été plus ou moins bien intégrée par les marchés de gros selon les pays, ces dernières années ont vu l'émergence des circuits courts, cherchant à mettre en contact direct les producteurs avec le consommateur. Pour bon nombre d'observateurs, cette tendance, largement soutenue par les collectivités locales, s'avère être une menace pour les marchés de gros. Maguelone Pontier n'a pas nié la réalité du phénomène : « Il y a aujourd'hui un vrai mouvement de mode en faveur des circuits courts. Au niveau de la Fédération, nous n'aimons pas beaucoup ce terme de circuits courts. Il est réducteur. Nous préférons parler de circuits de proximité. Et là, les marchés de gros ont toute leur place. Les grossistes sont les opérateurs qui, de par leur fonction et leur place dans la filière, connaissent aussi bien l'amont que l'aval de celle-ci. J'ajouterais qu'il n'y a pas eu d'accidents sanitaires majeurs sur les marchés. D'ailleurs, la réalité est là : il existe un courant régulier entre le marché de Château-renard, essentiellement tourné vers la production, et celui de Rungis. »

L'évolution réglementaire en France semblerait apporter de l'eau au moulin des circuits courts. Il suffit de se rappeler que la loi implique qu'en 2017, 40 % des produits alimentaires mis en œuvre en restauration collective devront être sourcés localement. Pour Maguelone Pontier, cela ne remet pas en cause le rôle des marchés de gros, bien au contraire : « Les marchés ont un vrai rôle à jouer ici. L'approvisionnement d'une cantine de 200 couverts ou de 2 000 convives par jour n'est pas le même. » De fait, les contingences logistiques, et aussi celles liées à un sourcing de qualité et de quantité constantes, sont au cœur de cette question. La secrétaire générale de la Fédération française des marchés de gros a d'ailleurs indiqué à la tribune de Medfel 2015 que la FFMG travaillait actuellement avec Restau'Co, le réseau qui anime la restauration collective en gestion directe, afin de définir un modèle économique.

Un outil de structuration locale

Les défis que les marchés de gros ont à relever sont donc multiples dans nos pays. Du coup, s'est posée la question d'un éventuel manque de structure en Europe. Pour Manuel Estrada, ce n'est pas forcément dans nos pays que cette interrogation devrait être. « Un marché de gros offre une bonne approche du niveau de développement du pays dans lequel il est implanté, a-t-il expliqué. On peut s'interroger sur la nécessité de construire de nouveaux marchés de gros dans notre partie du monde, dans l'Europe méditerranéenne. Je ne pense pas qu'il y ait besoin de plus de marchés de gros mais de meilleurs marchés de gros. En revanche, plus au Sud, en Afrique, il y a une prise de conscience de plus en plus forte de la nécessité d'assurer la sécurité alimentaire des populations qui demande des infrastructures permettant la conservation et la vente en toute transparence des denrées alimentaires. » Sur ce point, l'Union mondiale des marchés de gros collabore depuis juillet 2014 avec la FAO afin d'identifier et de diffuser les bonnes pratiques développées dans les marchés pour améliorer les infrastructures de distribution alimentaire dans les zones urbaines et périurbaines. Ces bonnes pratiques sont aussi nombreuses que diverses pour les deux entités : nouveaux marchés, relocalisation de marchés existants et, d'une manière générale, tout ce qui peut contribuer à résoudre les contraintes logistiques et opérationnelles mais aussi réussir l'intégration des petits producteurs, la mise aux normes sanitaires et phytosanitaires ou encore la facilitation de l'accès des denrées pour les consommateurs finaux.

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