L'avis des importateurs français
Les traités auront peu d'impact pour les importateurs
En raisin comme pour d'autres fruits, les importateurs français gardent la tête froide face aux traités de libre-échange. A leurs yeux, l'essentiel n'est pas là.
Les accords de libre-échange vont-ils changer la donne quant à l'approvisionnement européen ? Risque-t-on de voir une “vague déferlante” de cerises ou de pommes américaines sur l'Europe ? Fort peu probable répondent les importateurs français. « Les importateurs sont relativement peu impactés par les accords de libre-échange. Il faut garder en tête que c'est d'abord une question de logique économique, précise Véronique Le Bail, déléguée générale de la CSIF (Chambre syndicales des importateurs français de fruits et légumes). A quelques exceptions près, ce n'est certainement pas la suppression de droits de douane qui va entraîner une augmentation exponentielle des envois. Il faut qu'il y ait une vraie demande du marché européen pour cela. Par exemple, l'importation de cerises américaines, dont le calendrier est similaire à celui européen, ne pourrait trouver sa justification que si la production européenne accusait un extrême déficit une année. N'oublions pas qu'un importateur intègre aussi le fret, le taux de change, le risque client dans sa prise de décision : l'intérêt économique doit être là. »
Pour la CSIF, l'importation est alors bien dans son rôle, celui d'être complémentaire des productions européennes pour approvisionner le marché. « Les barrières non tarifaires – phytosanitaires ou administratives – peuvent éventuellement avoir un effet limitant, poursuit Véronique Le Bail. Mais, c'est dans les deux sens : elles affectent aussi bien l'importation que l'exportation. Et en termes de différences de normalisation, le problème a été en grande partie résolu depuis l'harmonisation européenne et le calage sur les normes CEE/ONU. De toutes les façons, sur ces sujets, les opérateurs professionnels de l'import se sont mis au carré pour les mettre en œuvre. »
Une complémentarité toute l'annéeCôté opérateur, le son de cloche est similaire. Créée en 2009, la société Pulp Fruits a fondé son développement sur des relations privilégiées avec des producteurs désireux d'être présents au long terme sur le marché français. Elle est présente à Steenvoorde (Nord), à Malakoff (Hauts-de-Seine) et à Rotterdam (Pays-Bas). Sa clientèle se répartit entre grande distribution (30 %), grossistes traditionnels et RHD (25 % chacun), les 20 % restants étant constitués, à parité, par les reconditionneurs français et les importateurs européens.
Pour Thomas Daugenet, directeur commercial, « l'ouverture des marchés qui doit accompagner les accords de libre-échange en cours – que cela soit avec les Etats-Unis ou avec le Canada – ne m'apparaît pas comme vraiment intéressante. En sourcing, il y aurait peut-être la pomme ou la poire, mais il faut considérer que les coûts de production aux Etats-Unis ne sont pas très éloignés de ceux en France. Si vous ajoutez en plus le coût du fret, cela n'en vaut pas la chandelle. N'oublions pas non plus que ces origines viendront en pleine concurrence avec l'Europe. Déjà que les pays européens producteurs n'arrivent pas à s'entendre entre eux comme l'a montré cette saison, il n'est pas nécessaire d'en rajouter. » L'occasion donc de faire le point sur la campagne raisins avec Thomas Daugenet : « L'Argentine n'exporte pratiquement plus de raisins sur l'Europe. Les coûts de production sur place sont trop élevés pour être rentables à l'export et il faut aussi souligner que la qualité du produit argentin ne rencontre pas la demande des opérateurs. Cette année, la campagne chilienne n'a pas été terrible : les fruits à noyau sont arrivés plus tôt que la saison précédente et cela a entraîné des perturbations pour les exportations de Red Globe. En revanche, le printemps doux a permis de maintenir des prix raisonnables pour le raisin sud-africain pendant toute la saison. »