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Salade - Recherche variétale
Les technologies boostent le métier de sélectionneur

La création de variétés exige plus de précision tout en réduisant le temps nécessaire à la sélection. Avec la biologie moléculaire, les obtenteurs de variétés potagères comme Vilmorin peuvent répondre à ces nouvelles attentes.

Dans un marché devenu très concurrentiel, l’obtention de nouvelles variétés potagères à la fois plus résistantes aux maladies ou aux insectes exige aujourd’hui de la part des semenciers toujours plus de technicité, de réactivité et d’inventivité. Au sein de ces entreprises, de nouveaux métiers sont donc apparus depuis une dizaine d’années autour de la biologie moléculaire. En plein essor à cette époque, cette nouvelle discipline, qui s’intéresse à l’étude du génome des êtres vivants, donne la possibilité pour le sélectionneur de diriger plus efficacement ses recherches sans forcément aboutir à la création d’organismes génétiquement modifiés (OGM). L’utilisation de ces techniques peut très bien s’insérer dans un programme classique de sélection. Ainsi la création d’une nouvelle carotte ou d’une nouvelle laitue s’effectue avec les mêmes techniques que par le passé, c’est-à-dire à l’aide de nombreux croisements et le tri des meilleurs crus au cours des générations successives selon des méthodes qui se sont améliorées au fil du temps. Le savoir-faire du sélectionneur et son intuition scientifique restent ainsi toujours d’actualité mais avec désormais un bagage supplémentaire que constituent les techniques de la génétique moléculaire. Outils assez sophistiqués, ils demandent une formation et une expérience spécifique en la matière. D’où la création, comme chez Vilmorin, d’un service dédié à ces nouvelles technologies.

Des techniques sophistiquées
Damien Peltier, spécialiste en biologie moléculaire, a été embauché par la firme angevine en 1999 au moment où cette dernière – qui utilisait déjà les technologies moléculaires pour le contrôle de ses variétés – a voulu étendre leur utilisation à la sélection elle-même : « Nous développons des outils de marquage moléculaire pour la sélection de pratiquement toutes nos espèces que nous travaillons aujourd’hui. Nous élaborons d’abord des projets avec les sélectionneurs et les pathologistes. Nous effectuons aussi le suivi. » Les marqueurs moléculaires deviennent un enjeu important de la sélection pour trouver de nouvelles variétés résistantes. « Au début de l’utilisation de ses nouveaux procédés, le sélectionneur les appréhendait avec réticence, se rappelle-t-il. Et c’est normal. Toute nouvelle méthode mérite d’être cernée pour mieux les utiliser ensuite. Aujourd’hui, il en a compris tout l’intérêt et il en est même devenu très demandeur. Il faut être à l’écoute des nouveaux développements dans ce domaine qui évolue très vite pour optimiser nos méthodes de recherche et développement. » Les prémices de la technique datent du début du XXe siècle. « Le marqueur moléculaire est une sorte de balise sur le génome qui nous renseigne sur la présence d’un gène d’intérêt agronomique, définit Damien Peltier. C’est un caractère moléculaire qui détermine une plante. » Au départ, les marqueurs moléculaires étaient enzymatiques, c’est-à-dire qu’ils reconnaissent les protéines intervenant dans les réactions en chaîne codées par le génome. Les laborantins extrayaient alors les protéines du végétal étudié en le faisant réagir sur un substrat spécifique. Désormais, l’ADN est directement analysé pour déterminer la présence ou l’absence d’un ou plusieurs gènes qu’ils se traduisent ou non par une modification phénotypique (1), physiologique ou biochimique. Pour identifier ce gène d’intérêt, il est nécessaire d’utiliser des techniques spécifiques, la plus connue étant celle de la PCR (Polymerase chain reaction) : « Cette technique consiste à amplifier le gène plusieurs fois, comme si on le grossissait pour avoir la possibilité de le détecter plus facilement. »
En pratique, un simple petit fragment de feuille est suffisant pour obtenir la quantité d’ADN nécessaire à l’analyse. Une fois extrait, des réactions de PCR successives avec des marqueurs spécifiques vont permettre d’identifier les gènes recherchés. Suivant la plate-forme de visualisation utilisée, on observera le produit de la PCR sous forme de bandes sur gel ou de pics de fluorescence sur les ordinateurs.
Damien Peltier travaille essentiellement la laitue. « Avec des appareils comme les séquenceurs capillaires, il est possible d’obtenir plus de précision. Nous sommes capables d’identifier une base sur plusieurs milliards. Si l’homme en contient plus de 3 milliards, la tomate 900 millions, celui de la laitue est estimé à 2,5 milliards. Nous pouvons donc être facilement submergés par les informations. Aussi, il existe des logiciels, des serveurs spécifiques, de très gros ordinateurs pour réaliser le tri entre ces données. C’est le domaine de la bio-informatique. » Ces travaux sont confiés à des bio-statisticiens de laboratoires spécialisés comme Keygène (2) aux Pays-Bas. La mise au point d’un marqueur peut demander plus d’un an de travail.

Une sélection plus rapide et précise avec le marquage moléculaire
« Dès le stade plantule, nous pouvons connaître si la plante a le potentiel pour résister à un insecte ou une maladie », explique Damien Peltier. Mais la technique du marquage ne résout pas tout. Pour être efficace, les semenciers doivent maintenir des ressources génétiques importantes pour permettre l’identification et la sélection des caractères d’intérêt agronomique. Le sélectionneur utilise ensuite au mieux cette variabilité pour créer de nouvelles variétés en s’aidant des marqueurs moléculaires. En laitue, par exemple, le bremia et le puceron Nasonovia ribisnigri font l’objet de sélection par marqueurs. Avec un nombre d’analyses en croissance constante, l’équipe de recherche et développement en biologie moléculaire a doublé son effectif ces cinq dernières années. Bientôt, le séquençage du génome de la laitue fournira des connaissances nouvelles qui ouvriront des perspectives dans la création des variétés de demain et devrait notamment permettre de progresser dans la connaissance de la résistance des laitues au bremia. Car avec ce champignon qui a la faculté de contourner rapidement les résistances, les obtenteurs ont entamé une course perpétuelle dans la recherche de nouvelles variétés. Les dernières recrues résistent désormais à une vingtaine de races de bremia. Grâce aux travaux génétiques, les sélectionneurs s’orientent non plus vers des résistances strictes mais des tolérances susceptibles de réduire la pression des champignons. « Aujourd’hui, l’acquisition d’information est permanente et peut donner le tournis, remarque Damien Peltier. C’est très stimulant. Cela demande des moyens importants que notre entreprise aujourd’hui est capable d’apporter. »

(1) Le phénotype est le caractère ou l’ensemble des caractères observables d’un individu.
(2) Les actionnaires de Keygène sont quatre sélectionneurs en potagère : Vilmorin, Enza Zaden, Tachii et Rijk Zwaan.

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