Les signatures de plus en plus nombreuses et lisibles
Depuis de nombreuses années, les opérateurs de la région Centre-Ouest, principalement les melonniers et les producteurs de petits fruits, ont compris l'intérêt de créer et de faire vivre leurs marques. Retour d'expérience.
La région Centre-Ouest, exportatrice de nombreux fruits et légumes, capitalise un certain nombre de marques, certaines d'entre elles étant même assez connues du consommateur. C'est vrai principalement pour les melons, beaucoup moins pour les petits fruits rouges. Les producteurs de framboises, mûres, myrtilles ou groseilles cultivent très souvent ces espèces en complément d'autres productions pour de la vente directe, sur l'exploitation, les marchés ou des Amap. La nécessité de créer une marque n'est donc pas prioritaire pour développer leur notoriété. En revanche, ceux qui ont fait des petits fruits rouges une spécialité, comme c'est le cas en melon, ont créé une marque pour se faire connaître et entretenir leur notoriété. Nous pouvons citer en Pays de Loire Panach'Fruits et La Ronde des Fruits pour les petits fruits rouges. En melon, le catalogue des marques est donc beaucoup plus vaste avec deux d'entre elles, Rouge Gorge et Soldive comme fer de lance.
Quand la relation directe avec le consommateur n'existe pas, les marques se font rares. Même avec un volume conséquent comme Anjou Myrtille qui produit 700 t de petits fruits rouges, l'entreprise ne vend pas sous une marque propre mais sous MDD, et même pour Les Fruits Rouges de l'Aisne. Créer sa propre marque n'est pas impossible pour Rodolphe Dupratte, dirigeant d'Anjou Myrtille. Mais les conditions ne sont pas encore toutes réunies. « Créer une marque est un travail de longue haleine que mes clients pratiquent depuis plusieurs années, remarque-t-il. Cela commence à porter ses fruits puisque la consommation augmente. »
Pas de marques sans démarche qualitéA la naissance de l'entreprise, les dirigeants ne se lancent pas forcément dans la création d'une marque. « En 1963, les premiers melons étaient vendus sous une marque commune avec Soldive, raconte Christophe Couteleau, l'un des dirigeants de Rouge Gorge. Les entreprises se développant, elles ont décidé de commercialiser leurs produits séparément. Mon grand-père qui dirigeait l'entreprise a choisi la marque qui aujourd'hui est encore d'actualité. A l'époque les melons portaient souvent le nom d'oiseau. C'est en voyant un rouge-gorge qu'il a décidé du nom de la marque. Cela correspondait bien à l'image que nous voulions donner de notre produit, évoquant la couleur d'une part et la qualité d'autre part. » Pour Jean-Marie Audigane, dirigeant de Panach'Fruits, « les choses sont venues naturellement. Nos clients nommaient nos plateaux de divers petits fruits rouges, les panaches. D'où le nom de Panach'Fruits. Néanmoins, le choix d'un nom ne peut être pris à la légère. Nous sommes rentrés en conflit avec des fabricants de bière. Heureusement, cela s'est bien terminé pour nous. Nous avons seulement réduit le nombre de classes demandées lors du dépôt de la marque. »
La signature reflète la stratégie de l'entreprise. Le graphisme du logo a son importance. La Ronde des Fruits est bien connue des consommateurs bio angevins. Elle signe la production de petits fruits rouges de Jean-Luc Thibault, qui multiplie les modes de commercialisation pour ses produits en frais ou transformés (1,5 t de framboises, 2,5 t de fraises). Il les distribue directement à la ferme, récoltés ou à cueillir, à cinq Amap, sur deux marchés angevins et en magasin spécialisé. « Plusieurs fois, je me suis posé la question. Faut-il changer de logo ? Finalement, j'y ai renoncé. Les nouveaux clients apprécient le graphisme. Il représente littéralement une ronde de fruits qui symbolise toujours pour nous une présence toute l'année de fruits diversifiés. »
L'entreprise Martineau, marque Boule d'Or, basée à Vouillé-les-Marais (Vendée) a, quant à elle, changé de logo, en 2008 quand de nouveaux membres sont arrivés dans l'équipe dirigeante. Au départ, il mettait en avant la situation géographique, le double cœur emblème de la Vendée et les roseaux le marais poitevin. Aujourd'hui, Boule d'Or est centré sur la passion des producteurs, chaque étoile symbolisant les membres de l'équipe.
La lisibilité est le maître mot aujourd'hui. Le consommateur est face à une palette de marques. L'entreprise vise donc un logo percutant qui flashe. Ainsi, Soldive a considérablement réduit la façon de décliner son logo. L'entreprise des Deux-Sèvres – dont l'objectif est d'offrir une qualité de melon toute l'année – a fait de l'évolution de sa marque un des thèmes de sa campagne (cf. fld magazine de juin 2013) pour symboliser les 50 ans de l'entreprise. De la même manière mais pour d'autres légumes, La Rosée des Champs a elle aussi rendu plus lisible sa marque. « Toute la difficulté est de faire évoluer le logo sans le changer fondamentalement, relève Francis Bailly, directeur de la coopérative. C'est de que nous avons fait l'année dernière. »
« Le marketing aide à faire vivre la marque, souligne Christophe Couteleau. Dans notre cas, cela s'est fait naturellement. La qualité de nos melons nous a amenés à nous développer. Le bouche-à-oreille a fonctionné. A partir d'un certain volume, il a fallu passer à la vitesse supérieure. Nous avons démarré un plan de communication avec des affiches 4x3 dans des villes stratégiques de la région, puis Paris. Mais attention, le marketing n'est efficace que si le produit est de qualité. » Aujourd'hui, le budget publicitaire a été réduit en raison des crises successives. « Nous avons trouvé une stratégie pour “faire mieux avec moins”. Le développement du site Internet, les blogs et les réseaux sociaux en font partie. » Désormais, tous les supports sont déclinés de façon cohérente pour une meilleure lisibilité. Cette année, les affiches auront un nouveau look afin de répondre aux tendances actuelles et surfer sur les notions de terroir.
La signature reflète la stratégie de l'entreprise. Le graphisme du logo a son importance.
L'entreprise Bogers située à Chaillé-Les-Marais (Vendée) a décidé l'an passé de créer une quatrième marque de catégorie I standard, répondant aux normes CE-ONU, afin de développer le marché des GMS. Elle se nomme Oxébon. Auparavant, trois marques caractérisaient l'entreprise. Funy, de catégorie II, 10 % environ des volumes, est destinée à la vente locale et pour les détaillants. Elle est présente aussi au Maroc puisque Bogers a créé une entité marocaine de production en 2007. Vendélice, la plus connue, de catégorie I, créée il y a quinze ans, exige un tri sélectif plus sévère qu'Oxébon. Le degré Brix, par exemple, dépasse les 12 %. Cette marque est diffusée principalement chez les grossistes et les GMS. Enfin, Vendélice Sélection, 5 % des volumes, existe depuis trois ans. C'est le nec plus ultra. Le melon est vendu à un stade de maturité optimum. La qualité visuelle est des plus soignée (zéro défaut). Le marché visé reste les épiceries fines. Au final, l'an passé, tous les melons ont été valorisés. Avec le drive, des marques comme Vendélice qui ne trouvaient pas preneur en GMS, arrivent à se positionner. La qualité demandée est plus exigeante et les prix bas moins recherchés.
Comme Miss Mâche née en Pays de Loire pour la mâche, une marque collective vient de naître en région Centre-Ouest pour le melon. Ce n'est pas tout à fait sur le même plan mais cela s'en rapproche. Les onze expéditeurs du Syndicat des Producteurs de melon du Haut-Poitou emballaient jusqu'à l'an passé leur melon sous leur marque propre (neuf marques). Le logo du syndicat était apposé selon la volonté des producteurs et surtout en fonction des critères du cahier des charges. Avoir une marque commune permet ainsi aux adhérents d'avoir des volumes plus conséquents à proposer et plus de souplesse dans la gestion de l'offre. Désormais, la marque commune prime et se décline selon deux marchés : “Melon du Haut-Poitou Melon de Maître” pour les détaillants et grossistes, “Melon du Haut-Poitou Premium” pour les GMS. Les melonniers ont allégé le graphisme en 2009 pour une meilleure lisibilité. « L'an passé, nos premiers tests chez les grossistes ont été concluants, assure Julien Bodet, président du syndicat. Avec cette deuxième marque et le temps favorable, nous espérons une même lancée. »