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L'asperge, première culture légumière au Pérou

Le développement du secteur agricole péruvien n’aurait pas été possible sans certaines cultures légumières instigatrices, avec à leur tête l’asperge.

Texte traduit et adapté de l’article «El alimento de miliones de familias peruanas» (Gabriel Gargurevich Pazos), paru dans Redagricola Peru, mars 2018.

 

Le Pérou occupe une superficie de 1,285 million de km², soit deux fois la France. Mais moins de huit millions d’hectares y sont considérés comme cultivables. Déserts, montagnes et jungle occupent la majorité des surfaces. Pourtant, le secteur agricole est en plein développement, porté notamment par les cultures légumières. Le marché national grossit et quelques légumes tirent leur épingle du jeu à l’export. Bien sûr, l’asperge demeure le poids lourd des productions légumières péruviennes. Il s’en est produit près de 400 000 t en 2016, sur environ 25 000 ha, dont près de la moitié dans la région d’Ica, située à 300 km au sud de la capitale Lima. Et le Pérou est le deuxième exportateur mondial d’asperge en frais (principalement de l’asperge verte, l’asperge blanche étant surtout destinée à la conserve), avec comme principale destination les Etats-Unis. Son succès à l’export, l’asperge péruvienne le doit beaucoup à ses deux récoltes annuelles, ainsi qu’à l’arrivée des premiers hybrides californiens en 1986, comme l’explique André Casas, directeur du département d’horticulture à l’Université nationale agricole de La Molina (UNALM) : « Ce sont les Américains qui ont introduit l’hybride d’asperge verte au Pérou, mais c’est à l’initiative des agriculteurs de la région d’Ica. Ceux-ci, constatant que le secteur cotonnier ne rapportait plus, se sont tournés vers l’Agence internationale pour le développement (AID), à la recherche de nouvelles cultures d’exportation ».

L’export concerne peu d’espèces légumières

Un spécialiste de l’asperge de Californie effectue alors une étude de marché et recommande l’introduction de l’hybride californien au Pérou. « Ensuite, ils ont commencé à adapter toute la technologie américaine à la réalité péruvienne. Cette culture alternative a donc commencé à croître. Le premier projet pilote faisait 40 hectares, l’année suivante, il y en avait 100 hectares et la suivante, déjà 1 000 hectares », indique le chercheur. Les Etats-Unis manquaient d’importations d’asperge en novembre et en décembre, ce qui a ouvert un premier marché d’export au Pérou. L’asperge représente aujourd’hui environ 20 % des surfaces de cultures légumières péruviennes, si l’on exclut les tubercules : pomme de terre (« papa »), patate douce (« camote ») et manioc (« yuca ») sont en effet des cultures très importantes. La pomme de terre n’occupe pas moins de 350 000 ha au Pérou, qui est le plus gros producteur d’Amérique latine. Mais les rendements sont plus de trois fois inférieurs à ceux rencontrés en Europe de l’ouest. La pomme de terre est un élément de base au Pérou depuis plusieurs millénaires et plus de 3 000 variétés y sont cultivées. Loin derrière les tubercules et l’asperge, les surfaces de piments et poivrons représentent environ 5 000 à 6 000 ha, dont environ 80 % sont pour l’exportation. Si le Pérou n’est que le 27e producteur mondial de piments et poivrons, il en est le 8e plus gros exportateur (principalement paprika, piquillo et bell pepper). L’artichaut (premier exportateur vers les Etats-Unis) et l’oignon sont également des légumes d’export importants. Si peu d’espèces légumières péruviennes s’exportent à l’heure actuelle, ce n’est pas en raison de conditions de production difficiles. « Nous pouvons produire tous les légumes que nous pouvons imaginer, mais nous sommes loin des marchés nord-américains, explique André Casas. Le Mexique, l’Amérique centrale par exemple ont un grand avantage sur nous. Ils exportent des haricots verts, des citrouilles, des laitues… Ici, il y a beaucoup d’investissements à faire en post-récolte. Dans le cas de l’asperge, si nous n’avions pas produit deux fois plus que nos concurrents, il aurait été impossible d’exporter autant. Envoyer un melon vers les Etats-Unis depuis le Pérou coûte beaucoup plus cher que depuis le Guatemala. Le Guatemala ou le Mexique peuvent envoyer leurs produits aux Etats-Unis « en brouette », comme on dit. »

Lima, un marché de 10 millions de personnes

La majeure partie des volumes de légumes produits au Pérou est donc destinée au marché intérieur. Lima constitue la principale zone de consommation au Pérou. Dix millions de personnes vivent dans la capitale péruvienne, soit environ un tiers de la population du pays. Les vallées les plus proches approvisionnent la mégapole en légumes. « Chosica, Carabayllo, Mala, Cañete, el Norte Chico, sont les endroits qui ont le plus développé les cultures légumières, en parallèle de la croissance du marché », décrit André Casas. La baisse de rentabilité du secteur cotonnier a également favorisé cette transition. Comme pour l’asperge, l’arrivée de variétés hybrides au Pérou a aidé à la progression de la production légumière. « La deuxième culture à avoir adopté des hybrides fut la tomate, évoque le spécialiste. A cause du phénomène El Niño de 1997, les géminivirus, transmis par l’aleurode, sont arrivés au Pérou et ont commencé à décimer les cultures de tomate. C’est ainsi que les généticiens ont commencé à travailler sur les hybrides, car ils étaient le seul recours. En 2007 est apparu le premier hybride de tomate au Pérou. A Carabayllo, car c’était l’une des vallées les plus infestées, ainsi qu’à Huaral, à 75 km au nord de Lima. L’oignon a suivi la tomate dans l’utilisation des hybrides. Aujourd’hui, tous les oignons exportés sont des variétés hybrides ». Mais la moitié des oignons produits pour le marché national sont multipliés par pollinisation libre. Les oignons rouges et roses du Pérou sont notamment utilisés dans l’un des plats nationaux, le ceviche.

En chiffres

Surfaces de cultures légumières

120 000 ha au total (hors pomme de terre, patate douce et manioc)

25 000 ha d’asperges

8 000 ha d’oignons

6 000 ha de piments et poivrons

6 000 ha de tomates (dont 1 000 ha pour l’industrie)

3 000 ha d’artichauts

Les semences s’exportent

Le Pérou, ce n’est pas seulement des asperges, des piments et des artichauts… il existe également un marché en croissance pour les semences potagères. Ainsi, les exports de semences ont représenté 11,7 millions de dollars en 2017, un chiffre en augmentation de 25 % en un an. Les semences de piments doux ont été les plus exportées (6,8 millions de dollars), suivies par celles de cornichon et de citrouille. Les cultures de semences de tomate et de pastèque sont également très importantes. La production de semences potagères se fait systématiquement sous abris filets.

Des piments locaux pour la transformation

 

Un projet de l’UNALM consiste à redynamiser la culture de variétés traditionnelles de piments, tels que l'« aji escabeche » (piment au fruit long, orange, et assez fort), l’« aji rocoto » (fruit orangé ou rouge, particulièrement fort) ou l’« aji panca » (plus doux, consommé principalement séché). « Nous avons cherché à identifier les variétés traditionnelles de piments qui présentent les meilleures qualités pour la transformation, indique André Casas, de l’UNALM. Auparavant, les piments étaient consommés uniquement frais ou séchés. Aujourd’hui, il existe une importante industrie de transformation des piments, qui s’est beaucoup développée pour le marché local mais aussi pour l’exportation. » Les transformateurs recherchent des piments au goût constant. Ils se plaignent que les piments qu’ils utilisent aujourd’hui ne présentent pas toujours la même force. « Ils veulent des piments sans graine et qui soient faciles à éplucher, poursuit André Casas. Car actuellement, l’épluchage de certains piments comme l’« aji escabeche » par exemple se fait manuellement. » L’UNALM travaille avec des entreprises, comme Alicorp, qui transforme vingt tonnes de piment par semaine (congelé, en saumure ou sous forme de pâte) et qui en exporte de plus en plus. « La demande mondiale de produits péruviens est en pleine croissance, constate le chercheur. Des restaurants et consommateurs du monde entier rechercheront à l’avenir ce type de produits ».

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