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Les intérêts des tunnels mobiles pour la production maraîchère

Des tunnels mobiles sont testés en stations d’expérimentation afin d’évaluer l’intérêt de leur intégration dans les systèmes maraîchers.

Le tunnel mobile installé début 2020 à la station expérimentale de la Serail (Rhône) doit permettre d'optimiser les rotations dans un système maraîcher intensif sur petite surface. © Serail
Le tunnel mobile installé début 2020 à la station expérimentale de la Serail (Rhône) doit permettre d'optimiser les rotations dans un système maraîcher intensif sur petite surface.
© Serail

La surface sous abri est souvent un facteur limitant pour les maraîchers. Le concept de serres mobiles peut permettre d’augmenter cette part de cultures sous abri. L’intérêt des serres mobiles est actuellement évalué dans les stations d’expérimentation SEHBS (Morbihan) depuis 2017 et Serail (Rhône) depuis cette année, avec deux approches différentes. A la Serail, l’utilisation du tunnel mobile s’inscrit dans le cadre d’un projet dédié au maraîchage intensif sur petite surface (projet MIPS, financé par la région Auvergne-Rhône-Alpes, www.mips-aura.fr). Ce projet vise à obtenir des données technico-économiques dans le but d’aider les futurs installés à se rendre compte de la viabilité de leur projet. Un système en maraîchage diversifié bio « classique » (entre 2 et 5 ha) avec une proportion d’abri d’environ 10 %, sera comparé à un système en maraîchage intensif bio sur moins de 1 ha avec une proportion d’abri d’environ 25 %. Dans ce système bio intensif, le tunnel mobile doit permettre d’optimiser les rotations sur petite surface. Ce tunnel de 8 m de large sur 10 m de long a été rendu mobile en février 2020, en autoconstruction avec l’aide de l’Atelier Paysan, qui propose des formations pour convertir une serre en serre mobile. Cinq pièces métalliques ont été installées de chaque côté du tunnel, permettant de fixer au total dix roues, récupérées sur des poubelles. Les rails sont des glissières d’autoroute, avec une toile tissée placée dessous pour limiter l’enherbement. Les coûts de transformation ont représenté 2822 €, soit un peu moins de la moitié de l’investissement total (5929 € HT, soit 74 €/m²).

Un déplacement facile et relativement rapide

La longueur des rails a été prévue pour trois emplacements du tunnel, soit une longueur de 30 mètres au total. L’ancrage du tunnel a été réalisé à l’aide d’amarres à frapper, positionnées devant chaque arceau, pour chacun des trois emplacements. Le tunnel est relié à ces amarres à l’aide de crochets tendeurs. Pour le déplacer, « il suffit d’enlever les dix crochets tendeurs, de pousser le tunnel à deux personnes, puis de remettre en place les crochets », décrit Grégory Chantre, de la Serail. L’opération nécessite 22 minutes et est jugée « relativement rapide et facile à mettre en œuvre » par les expérimentateurs de la Serail. « L’inconvénient des roulettes est qu’elles rehaussent l’ensemble du tunnel d’environ 20 cm, ce qui laisse un espace entre le bas du tunnel et le sol, indique Grégory Chantre, en charge du projet. Pour pallier ce problème, il a été choisi de laisser le plastique de couverture dépasser et de rajouter une bavette sous les pignons pour bien fermer le tunnel et éviter les courants d’air. » L’irrigation se fait par goutte à goutte et micro-aspersion. Tous les emplacements du tunnel sont équipés d’une électrovanne et d’un programmateur. Concernant les rotations, le tunnel permet de commencer des cultures sensibles sous abri et de les finir en plein air quand les conditions climatiques difficiles sont passées.

Un outil qui nécessite d’adapter les cultures

A la station expérimentale de Bretagne Sud, l’idée du projet prend le contre-pied du mouvement d’intensification du maraîchage sur petite surface. « Le tunnel mobile doit nous aider à désintensifier les cultures maraîchères afin de préserver les sols, indique Maët Le Lan, responsable de la station. Cet outil est pour moi une évidence pour la gestion de nombreux problèmes en cultures légumières. Mais ce n’est pas un tunnel fixe en un peu mieux. C’est un outil différent, qui nécessite d’adapter les cultures. » L’utilisation du tunnel fait partie d’un projet plus large intitulé « Vers plus de durabilité en maraîchage biologique ». La station bretonne s’est dotée d’un prototype construit par le fabricant de serres Debernard, destiné à être amélioré au cours de son expérimentation : un tunnel de 160 m² (7,8 x 20 m), équipé de roues convexes intégrées qui se déplace sur des rails posés sur une bâche tissée. La longueur des rails (100 m) fait que le tunnel peut être placé sur quatre emplacements différents. « On a reçu beaucoup de conseils de la part de maraîchers possédant une serre mobile, évoque Maët Le Lan, comme laisser des zones tampons de 2 m entre chaque emplacement, ou installer une bâche tissée sous le rail pour la gestion de l’enherbement. » La serre est fixée par des amarres à frapper. La rigidité est renforcée grâce à des barres de renfort bloquant le tunnel au niveau des ouvrants. Le déplacement du tunnel, assez simple, nécessite au total une heure à deux personnes. Sur chaque emplacement du tunnel se trouve une bouche d’irrigation se raccordant au système d’irrigation.

Resserrer les amarres avant un coup de vent

La responsable de la SEHBS indique plusieurs points clés que le tunnel mobile doit permettre d’atteindre : « la désintensification des cultures, la diversification des rotations, l’allongement des périodes de cultures – planter plus tôt, récolter plus tard – l’apport d’engrais verts pour diminuer les intrants et l’économie d’eau (récupération d’une partie de la pluviométrie). » Et ce, en évitant deux écueils, un prix trop élevé et une fragilité trop importante de la structure. L’objectif était de ne pas dépasser le seuil du double du prix d’un tunnel classique. Au final, le tunnel mobile a coûté environ 1,5 fois le prix d’un tunnel neuf. « Plus précisément, il faut compter 41 €/m² pour notre tunnel mobile, avec un monteur professionnel pendant deux jours, contre 30 €/m² pour un tunnel fixe avec la même aide au montage, précise Maët Le Lan. Sans main-d’œuvre pour l’aide au montage, nous arrivons à 32 €/m² pour le mobile, contre 21 €/m² en fixe. » Concernant la solidité, « en cas de tempête, le tunnel souffre, mais comme un tunnel fixe. Il tient bon. Avant un coup de vent, on resserre les amarres et on ouvre les ouvrants. » Après trois ans d’utilisation de la serre, le projet doit s’achever en 2021 par une étude économique. L’enchaînement des cultures est également réalisé sous un tunnel classique, monté en même temps que le tunnel mobile, pour comparer. Les indicateurs pour évaluer les performances du tunnel mobile sont la quantité de vers de terre présents, les analyses de sol, la qualité et le rendement des cultures et, bien sûr, l’analyse économique avec chiffrage des intrants et temps de travaux.

 

A lire aussi : Essais de la station de Bretagne Sud: répondre aux besoins des maraîchers diversifiés

 

Anticiper le déplacement du tunnel

L’utilisation d’un tunnel mobile entraîne certaines difficultés. « Lorsque l’on déplace le tunnel sur un emplacement vide la veille de planter, le sol n’a pas le temps de se réchauffer, observe Maët Le Lan. Cette année par exemple, les tomates ne sont pas bien parties car le sol était trop froid. Nous n’avons pas ce problème avec les cultures précoces, mais c’est plus compliqué pour les cultures d’été. » Il est aussi nécessaire de bien anticiper la météo. « Il a beaucoup plu cette saison hivernale en Bretagne et le sol était trop mouillé lors de la plantation des pommes de terre, qui ont partiellement pourri en terre. Nous aurions dû anticiper plus et installer le tunnel sur la parcelle vide plus tôt afin que le sol ait le temps de sécher. »

A la Serail, deux déplacements en mars et mai

A partir de mi-février 2020, à la Serail, ont été démarrées sous tunnel les cultures de carottes primeurs, pommes de terre nouvelles, petits pois et pois gourmands. Puis, à la mi-mars, le tunnel a été déplacé une première fois pour accueillir sur le deuxième emplacement les premiers haricots, des semis de mesclun et de radis. Enfin il a rejoint son troisième et dernier emplacement de l’année mi-mai, pour recevoir les cultures d’été palissées comme la dernière série de tomates, les melons, la deuxième série de concombres et les patates douces.

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