QUESTIONS À LUC BARBIER, président de la Fédération nationale des producteurs de fruits
Les consommateurs doivent prendre conscience du prix des services exigés et rendus

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Le congrès de votre syndicat, qui aura lieu le 1er février à Paris, débutera par un résumé de l’année syndicale. Quels ont été ses moments forts ?
L’année 2016 a été marquée par les 40 ans de l’Interprofession et deux dossiers sur la protection des plantes. Le premier a été le dossier D. suzukii avec le retrait d’homologation du diméthoate avec effet rétroactif. C’était du jamais vu ! Ce retrait d’un produit en cours de saison était une posture politique du ministre de l’Agriculture, non fondée sur le plan scientifique. Nous nous sommes ensuite concentrés sur la nécessité de sauver la récolte de cerise, puis celle des fruits rouges, en obtenant des dérogations de produits pour lutter contre ce ravageur. Le ministre avait promis de compenser les pertes dues à ce retrait. Cela n’a toujours pas été fait. Il y aura beaucoup de déception car les pertes seront seulement compensées en partie. Le second dossier est celui de l’arrêté du 12 septembre sur lequel nous travaillons encore. Mais nous avons sauvé l’essentiel. L’objectif était de sécuriser ce texte sur une base légale au niveau européen. Il reste dans l’esprit de l’arrêté d’origine mais nous essayons de le faire évoluer pour répondre en partie aux attentes sociétales, tout en prenant en compte les contraintes techniques des productions fruitières.
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Une table ronde abordera le lien entre nouvelles contraintes, attentes sociétales et débouchés. Pensez-vous que les attentes sociétales peuvent être des opportunités pour les productions fruitières ?
La première question est de savoir quelles sont les attentes sociétales. Les positions de principe d’un certain nombre de personnes médiatisées sont-elles réellement leur reflet ? Si ces attentes ne sont pas schizophrènes, elles peuvent être une opportunité pour nous. Mais nous ne pouvons pas produire des fruits et légumes de qualité, localement, avec de la main- d’oeuvre locale, un service de traçabilité et avec les niveaux d’exigences sociales et environnementales actuelles, au prix des produits d’importation. Nous avons déjà perdu notre situation d’autosuffisance sur certaines filières : cerise, pêche, raisin de table. Les consommateurs doivent prendre conscience du prix des services exigés et rendus.
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Vous ferez intervenir un professionnel d’un autre secteur sinistré qui a pourtant su rebondir. Y a-t-il des passerelles entre secteurs pour appliquer des stratégies payantes ?
Bien sûr ! Les analyses de marché sont similaires : comment distribue-t-on ? Comment construit-on une segmentation de gamme ? Et comment fait-on des contraintes sociétales et environnementales des atouts ? Grâce à ces questionnements, des professionnels d’autres secteurs ont réussi à relocaliser des productions en France. A travers des leviers de communication, nous pouvons faire des contraintes un atout en mettant en avant la qualité des produits français. Qualité qu’il nous faudra sans cesse améliorer.
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