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Belgique
Les cadrans s’adaptent à la demande française

La Belgique demeure un fournisseur important pour la France. Encore fallait-il aux criées affiner leur sens commercial. « C’est bien mieux », semblent dire les sociétés françaises achetant aux cadrans belges.

L’annonce en février dernier par le groupe Marais de l’ouverture d’un bureau d’achat près de la criée de Malines (cf. fld hebdo du 8 février 2011) montre que les opérateurs français n’hésitent plus à se mettre au plus près des cadrans d’outre-Quiévrain pour leur approvisionnement en fruits et légumes belges. Qu’ils soient situés en frontière du plat pays ou installés directement sur place, les Français ont développé de fortes relations, aidés, il est vrai, en cela par une meilleure approche des veilings qui adaptent l’offre aux demandes de la clientèle autant que faire se peut.
L’origine belge sur le marché français des fruits et légumes demeure relativement forte : en 2010, les exportations de légumes frais belges ont représenté 177 millions d’euros en valeur contre 153  M€ en 2009, et celles de fruits, 274 M€ contre 333 M€ en 2009. Certaines lignes “historiques” de produits ont été en recul ou sont demeurées stagnantes : les pommes (33 000 t en 2010 contre 40 600 t en 2009), les poireaux (24 700 t contre 27 800 t), les laitues pommées (21 100 t contre 22 200 t) ou encore les fraises (7 600 t pour les deux années). D’autres sont orientées à la hausse. La France a ainsi absorbé 52 335 t de tomates (51 000 t en 2009), des endives (4 400 t en 2010 contre 3 193 t en 2009) ou encore des poires (27 600 t contre 25 000 t).
Située près de Lille, à Erquingheim-Lys, Fruidor Terroir Flandres-Artois traite chaque année environ 45 000 t de légumes pour un chiffre d’affaires de 25 M€. La part de la production locale nordiste est majoritaire, environ 32 000 t. Le produit belge représente presque 10 000 t par an. Proche de la frontière belge, l’entreprise entretient des relations étroites avec les criées d’outre-Quiévrain (Malines, Brava, BFV) et plus spécifiquement avec REO. « Nous sommes connectés on-line avec les criées belges, explique François Dalle, directeur de Fruidor Terroir Flandres-Artois. Mais nous conservons un acheteur directement sur place à Roulers. Sa présence permet une plus grande réactivité lors des ventes et il perçoit l’ambiance dans la salle, un élément plus intangible mais indispensable au moment de l’achat. D’autre part, nous avons voulu séparer la fonction d’achat de celle de la vente, hormis en ce qui concerne les produits lourds (pommes de terre, oignons, carottes) : la vitesse de passage des produits au cadran, spécialement pour la fraise, ne permet pas d’assurer les deux missions en même temps. » Les tonnages d’origine belge ont ainsi doublé en cinq ans passant de 5 500 t à près de 10 000 t avec en tête, la tomate (3 500 t) achetée pour moitié sur REO et sur Malines. Pour François Dalle, une des raisons à cette augmentation est l’amélioration de la relation avec les cadrans belges. « Il y a trois ans, un acheteur, ce n’était qu’un numéro, reconnaît-il. Avec la mise en place de responsables de marché, nous avons senti une plus forte implication des criées, surtout REO, dans le marché et dans les attentes des clients. » Malgré tout, on reconnaît quelques freins – « le manque de stabilité des cours, la difficulté de calcul du prix de revient, les produits étant vendus nus » – et surtout un obstacle à positionner l’origine : « En France, on ne peut pas placer la tomate belge en cœur de marché, et elle se retrouve plutôt dans le segment 1er prix ».
Cette difficulté, Valérie Braems, de PacBelimex, la connaît aussi : « la continuité de qualité apportée par le label Flandria est un avantage, reconnaît-elle. Mais le produit belge passe souvent second après les grandes marques nationales sur le marché français. De plus, l’offre des criées pour les collectivités n’est pas vraiment appropriée. Pour cette clientèle, le produit premium n’est pas requis. Une tomate de catégorie I pour nous, c’est une Extra déclassée pour la criée et il n’est alors pas possible de faire un prix. »

Proposer un choix de palettes multiples aux grossistes
Créée en 1986, PacBelimex (groupe Charlet) est installé dans le périmètre de la criée REO et achète aussi auprès de Hoogstraten et de Brava. Destinée originellement à approvisionner le groupe en production belge pour une clientèle de grossistes spécialistes haut de gamme, l’entreprise évolue aujourd’hui vers l’exportation comme le précise Valérie Braems : « Nous conservons une importante clientèle de grossistes, une des forces de l’entreprise étant de savoir leur proposer des palettes multiples. Cependant, l’exportation est en développement, que cela soit sur le Sud de l’Europe, Espagne, Italie et depuis la campagne 2009-2010, vers les pays de l’Europe de l’Est. Nous sommes aussi en prospection sur les destinations lointaines comme le Moyen-Orient ou les Antilles. Cette activité permet de lisser notre chiffre d’affaires – à savoir15 millions d’euros – sur l’année. » PacBelimex dispose d’un entrepôt pouvant stocker 300 palettes et de trois camions afin d’assurer la ramasse sur les criées de Malines et de Hoogstraten. Le poireau est un des produits phares de l’activité de l’entreprise qui mène un travail important sur la tomate grappe avec les équipes de REO. Et cela se concrétise par le lancement de la marque Delicious qui est commercialisée en conditionnement de 1 et 2 kg en barquettes de 250 g. Au passage, l’entreprise a opté pour un nouveau matériau pour ses caisses, le bois compressé.
On reconnaît dans les criées belges que des efforts sont encore à faire, pour autant, il n’est pas question de remettre en cause la réalité du cadran comme le souligne Paul Demyttenaere, directeur général REO Veiling : « Le cadran, c’est l’élément central de la coopérative mais, pendant longtemps, ce ne fut rien d’autre. En 2005, nous avons entamé une réflexion avec les producteurs sur l’avenir du cadran. Il en est sorti qu’il fallait peut-être être plus commerçant tout en gardant le cadran pour l’établissement du prix au quotidien. » Cette nouvelle approche s’est traduite par la désignation de responsables spécifiques aux marchés, qu’ils soient à l’extérieur ou en Belgique. La pression de la GMS n’y est pas pour rien, demandant des conditionnements et des calibres spécifiques pour lesquels la criée a dû trouver des moyens afin qu’ils puissent passer au cadran. « Prenons le cas de la courgette, explique Paul Demyttenaere. L’offre standard du cadran est en colis de 14 pièces, ce qui convient aux marchés Nord européens mais pas pour le Sud qui préfère un calibre plus petit. La production belge est capable de fournir ce produit mais comment établir un prix au cadran ? C’est pourquoi nous avons développé la prévente de colis de 6 ou 18 pièces. Nous avons pareillement adapté l’offre pour le chou rouge, pour être en phase avec la consommation, avec un colis de 8 pièces pour lequel nous avons mis en place une modulation du prix par rapport à celui du cadran. » Pour autant, il n’est pas question de se substituer aux exportateurs belges. « Distribuer sur le marché européen, c’est un autre métier que le nôtre », souligne Paul Demyttenaere. Techniquement, le responsable marché est à la tête d’une équipe de deux ou trois personnes qui font le relais avec la production pour voir les possibilités d’adaptation au niveau du champ ou de la serre. C’est une certaine forme de pilotage par l’aval, on ne le cache pas.

Promouvoir les criées auprès des nouveaux producteurs
Le son de cloche est similaire chez Lava et son directeur général, Maarten de Moor : « Le modèle du cadran est toujours valable. Cependant, il faut faire avec l’évolution du marché. On assiste, d’une part, à la concentration de la demande avec moins d’acheteurs et, d’autre part, les exploitations en Flandres ont tendance à grandir : le nombre de producteurs avec plus de 10 ha augmente. Aujourd’hui, promouvoir les criées auprès de ces producteurs est un défi. Je dirais qu’une criée, c’est un poste avancé vers les marchés : elle évite ainsi au producteur de s’y engager seul, là où la concurrence est plus dure. Nous devons de plus garder une question en tête : peut-on se permettre d’avoir un prix différent, pour un même produit, d’une criée à l’autre ? »
Les cadrans flamands agissent déjà pour y répondre. Ainsi, les fraises de la région de Malines sont cotées sur le cadran de Hoogstraten. Ce dernier échange avec REO dont les volumes de fraises sont en augmentation (cf. encadré). « Et si le marché français est bon, les salades de Malines ne pourraient-elles être cotées à REO ? Pourquoi pas ? », imagine Maarten de Moor. On n’y est pas encore mais les flux des diverses criées actuellement montrent comme une ébauche de spécialisation selon les destinations : Hoogstraten et le marché hollandais, Malines et le marché intérieur plus l’Allemagne, REO et la France.
L’évolution des cadrans flamands passe aussi par celle de sa représentation syndicale. Et en mars dernier, le VBT, le groupement des cadrans flamands, s’est ouvert aux autres coopératives de mise en marché de fruits et légumes créées à l’initiative de producteurs, en dehors des veilings classiques. L’exemple de ces nouvelles structures est GreenPartners. Créée en 2000, elle regroupe aujourd’hui 72 producteurs et agit comme « un veiling sans horloge » (un prix par semaine). Elle dispose d’un vaste entrepôt dans le périmètre de Malines, juste en face du siège social d’Univeg qui est, avec l’exportateur belge Vergro, son deuxième client. GreenPartners a vendu en 2010 plus de 41 500 t de légumes où les tomates se taillent la part du lion, rondes (8 700 t) ou grappes (11 600 t). Si jusqu’à présent la coopérative laissait à ses adhérents toute liberté en termes de culture, elle reconnaît qu’en 2012 elle pourrait orienter un peu plus les plantations vers des produits à valeur sûre, susceptibles de rencontrer la demande des clients. Comme quoi, sur ce point, cadrans traditionnels et groupements indépendants parlent la même langue.

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