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Portrait d’entreprise
Les bons plans de la SIAC

Olivier Féron n’hésite pas à s’afficher comme défenseur d’une pomme de terre au goût retrouvé. Il développe de nouvelles variétés exclusives.

Dix ans après les faits, Olivier Féron, dirigeant de la SIAC (Société industrielle et agricole du pays de Caux), a toujours la gorge nouée quand il retrace “son affaire”. Il est encore tout près de s’emporter une fois de plus contre cette véritable injustice qui a bien failli faire couler sa toute petite entreprise. La malchance a voulu en effet que le premier cas français de “Ralstonia solanacearum”, responsable de la pourriture brune, soit décelé chez lui en 2000. Le plant était hollandais et le dossier se jugea devant les tribunaux pendant plus de huit ans. Le petit patron de PME gagne son procès en appel pour finalement le perdre en cassation quelques années plus tard. C’était la lutte du pot de fer contre le pot de terre.
Une lutte bien inégale que déplore Olivier Féron, toujours persuadé de son bon droit. Aujourd’hui, il voit la justice d’une tout autre façon et veut tourner la page. A l’écouter s’enflammer sur le dossier, il doit encore le retourner dans sa tête le jour où les choses vont mal ou lors des nuits d’insomnie. Le procès lui aura coûté plus de 1,2 M€, dont 120 000 € de procédures. Rapportée à un chiffre d’affaires annuel d’un peu moins de 4 M€, on comprend très vite que son activité de production et de collecte de plants de pommes de terre a bien failli disparaître.
Mais Olivier Féron n’est pas homme à baisser les bras si facilement. Après des moments de doute, il a décidé courageusement de donner une nouvelle dimension à son entreprise. Il tient aujourd’hui les clés de sa réussite de demain.

Un tournant décisif
Implantée en plein cœur du Pays de Caux, la SIAC développe ses activités dans la vieille zone industrielle d’Yvetot (Seine-Maritime). Aux confins de cette cité de 10 000 habitants, s’est développée une zone industrielle comme on en rencontrait souvent dans l’immédiat après-guerre. A deux pas de la SIAC, une ancienne distillerie qui a probablement fermé à l’époque de Mendès France. Juste à côté, une ancienne tannerie construite de briques rouges transformée en recyclage de ferrailles. Tout juste en face, la Coopérative Agricole de Haute Normandie (CAHN) y a construit un silo de stockage ainsi que le plus gros sécheur de grains de la région. Au moment de la restructuration de la coopération régionale, Olivier s’en porte acquéreur « pour un très bon prix », ce qui lui permet d’augmenter ses installations de stockage. C’est sur cette petite zone industrielle longeant la route de Grémonville, que Roger Féron a créé son petit commerce de “grainetier-transporteur” dans l’immédiat après-guerre.
Le père d’Olivier y développe progressivement sa petite société familiale. « A l’époque, c’était déjà une grosse affaire de négoce », témoigne Marie-Hélène Quartier, présente depuis dix-huit ans dans l’entreprise et véritable mémoire collective de l’affaire.
Puis Roger Féron crée la SIAC en 1964, au moment où il débute la commercialisation de plants de pommes de terre. C’est le premier grand tournant de la société.
Il commence par louer des terres aux agriculteurs des alentours, fait appel à des entreprises de travaux extérieurs pour la culture et développe le négoce de plants. Il a sept salariés dès 1974. L’arrivée d’Olivier Féron en 1980 marque le deuxième tournant important de cette PME. Il investit dans de nouveaux matériels lui permettant de produire en culture et de commercialiser la production de plants.
« On remplissait des wagons de la STEF de plants de pommes de terre qui arrivaient dans la cour de la gare située à 700 m », se souvient Marie-Hélène. A Yvetot comme en Flandre, il y avait toujours un négociant en pommes de terre implanté non loin des voies ferrées !

Olivier Féron donne une réelle impulsion à l’activité “plants”
Aujourd’hui, la SIAC produit 110 ha de plants et collecte pour douze producteurs (87 ha) liés contractuellement pour une, deux ou trois variétés. Parmi les seize variétés, on recense Désiré, Spunta, Nicola, Ostara, Bea voire Bintje… Mais il y a aussi des variétés destinées à l’industrie (Opale pour les chips), Magnum pour McCain, Santana pour Van Rijn ou Perline pour Lunor Appro. Elle est aussi négociant toute variété et exportateur vers les pays du bassin méditerranéen. La SIAC y expédie essentiellement de la Spunta (2 000 t) vers des pays comme l’Egypte ou l’Arabie Saoudite, principalement en conteneurs à partir du Havre. « C’est une activité qui s’étale principalement de novembre à décembre et qui nous permet de lisser notre activité annuelle », explique Franck Hericher, responsable commercial. Dix-huit ans durant, il a arpenté les allées de la station de Bretteville du Grand Caux en tant que technicien. Depuis le 1er juin 2009, il a renforcé l’équipe d’Olivier Féron. C’est la troisième étape du développement de cette PME qui compte aujourd’hui neuf salariés et qui aborde son véritable virage stratégique.
Car même si Olivier Féron s’est interrogé à l’issue de son procès, il savait qu’au fond de lui-même il ne pouvait pas laisser tomber l’affaire familiale. Ne serait-ce que par amour-propre et surtout pour se prouver à lui, ainsi qu’aux autres, qu’on n’écrase pas aussi facilement beaucoup plus petit que soi. C’est la raison pour laquelle les deux hommes se tournent vers les variétés exclusives permettant à la SIAC de maîtriser sa production de plants. « L’avenir de la SIAC passe par là », plaident-ils. Quant à Olivier Féron, il insiste bien sur ce travail de long terme : « On s’est intéressé aux variétés exclusives dès 1995. C’est un long et coûteux investissement, d’autant qu’il y a eu des essais qui n’ont pas abouti. »

Il fonde beaucoup d’espoirs
« On s’est positionné sur des hybrides de la station de Bretteville. On paye les droits d’obtention à l’obtenteur, mais on décide nous-mêmes des surfaces de plantation », ajoute Franck Hericher. La SIAC dispose dès à présent de trois variétés exclusives. Il s’agit de Louisana (10 ha en 2010), d’Esmeralda (35 ha en 2010) et de la petite dernière en laquelle ils fondent énormément d’espoir : Nazca (10 ha en 2010). Inscrite en 2010, elle se situe dans le créneau des Monalisa et Victoria avec un rendement supérieur. « On devrait en entendre parler dans la filière et la retrouver très vite sur les étals », indique-t-il. « Si l’aspect rendement est important, la qualité culinaire l’est tout autant », précise Olivier Féron qui la considère comme une excellente pomme fritable pour la ménagère française. « Mais elle peut aussi être produite en Espagne pour le marché espagnol. »
Avec le rachat du silo voisin dans lequel il a aménagé trois cellules de stockage réfrigérées et ventilées, Olivier dispose de 5 000 t de capacité de stockage. Avec un chiffre d’affaires annuel de 3,76 M€ pour l’année 2009, il consacre 30 % de ses surfaces de production de plants à l’exportation (20 à 25 % du chiffre d’affaires). La SIAC prospecte de nouveaux pays sur la grande exportation au Moyen-Orient et au Maghreb. Avec une réactivité et un large choix variétal, la SIAC a de quoi oublier les turpitudes passées.

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