Retour de salon - Medfel
L’écotaxe poids lourds, tout le monde paiera en fin de compte...
L’écotaxe sur le transport routier de marchandises sera effective en juillet 2013. Elle pourrait impacter tous les maillons de la supply chain et certainement, en fin de course, le consommateur.

La fiscalité verte aura-t-elle raison du tout-routier ? C’est sous ce titre quelque peu provocateur que s’est déroulée la table ronde “logistique” organisée par Medfel.
Au centre des débats : la nouvelle écotaxe, qui va toucher les ensembles routiers de plus de 3,5 t circulant sur les routes nationales et départementales françaises (soit environ 15 000 km). Le risque de voir les prix du transport flamber est réel d’autant plus qu’en haute saison, il devient difficile, et donc cher, de trouver un poids lourd. Philippe Da Silva est directeur Exploitation chez Chartering Transport Service SA (CTS) à Perpignan, société de transport spécialisée dans le pré- et le post-acheminement des marchandises à partir de Port-Vendres et pose clairement les données du problème : « L’application de l’écotaxe représente 0,05 et 0,20 € au kilomètre en plus. Pour un trajet entre Port-Vendres et Perpignan, cela correspond pour nous à un renchérissement de 12 € du trajet. En fait, on veut faire payer à la filière un soi-disant usage gratuit des nationales et des départementales alors que nous nous acquittons déjà de la Tipp », explique-t-il.
Est-ce à dire que les opérateurs fruits et légumes vont se tourner vers des modes alternatifs de transport ? La solution n’est pas aussi simple. Certes, l’alternative maritime est à considérer comme l’a précisé Julien Garcia, responsable Reefer Afrique du Nord de CMA CGM mais « il n’est pas possible de se passer du transport routier même si les autoroutes de la mer se développent ; il est nécessaire pour le pré- et le post-acheminement des marchandises sur les ports. ». Pour Rafael Llerena, gérant d’Easyfresh (réseau d’opérateurs maritimes reefer), la solution doit venir des logisticiens, dans une optique régionale et pragmatique tout en reconnaissant que « la transformation du modèle actuel (de transport) est essentielle ».
Des difficultés apparaissent de plus en plus pour établir des prévisions
Basée à Cavaillon, JMC Fruits exporte des pommes sur l’Union européenne (80 %) et en Grand export (20 %). Pour sa responsable export, Anne Dupuy, responsable Export, face aux impératifs de la clientèle, il est difficile d’établir des prévisions, ce qui ne favorise pas une démarche de massification des volumes : « Nous sommes amenés à travailler au quotidien. La route représente 90 % de nos transports. Le ferroviaire n’est pas intéressant quand on doit livrer un client en Europe du jour A pour le jour B : contraintes de volumes, d’horaires... Les transporteurs routiers français préfèrent souvent les produits secs qui sont plus rémunérateurs que les fruits et légumes, dont le traitement est plus difficile. Du coup, nous travaillons de moins en moins avec eux au profit d’entreprises hollandaises ou allemandes qui sont spécialisés dans le transport de nos produits. » Sur ce point, pour Philippe Da Silva, la situation tient au fait que les transporteurs français peinent à trouver du fret retour : « Prenez le cas de la Grande-Bretagne, le marché est réservé aux entreprises locales. Constat similaire pour l’Est de l’Allemagne où ce sont les sociétés polonaises. Du coup, les Français doivent se contenter de micro-marchés régionaux. » Et pour tous les intervenants à la table, la mise en œuvre de l’Ecotaxe va compliquer les choses. « On la payera puisque c’est la loi », semblent dire de concert Philippe Da Silva et Anne Dupuy, conscients que les négociations seront rudes entre les parties. « Tout le monde devra mettre la main à la pâte », concède le directeur exploitation de CTS et si Anne Dupuy reconnaît que le climat est encore tendu sur le sujet, un terrain d’entente pourrait être trouvé. Mais, cela se fera sûrement au détriment des marges des uns et des autres et peut-être, in fine, au détriment du portefeuille du consommateur final...