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Pommes
Le voyage d'une pomme, du Maine-et-Loire à Dakar

Sélect Fruit exporte plusieurs variétés vers Dakar depuis cinq ans. Le transitaire Fauvéder en assure la logistique. Reportage.

« L'Afrique est un marché d'opportunités », résume Olivier Maugeais, directeur commercial de Pom'Evasion et de Sélect Fruit, l'entité spécialisée dans l'exportation de pommes et de poires. « Cela n'empêche pas que ce marché est intéressant, ajoute-t-il. Il devrait se développer dans les années à venir. »

Le commerce de la pomme vers le continent africain présente de nombreux atouts. Non cultivée là-bas en raison du climat, la pomme venue d'Europe ne fait pas concurrence aux producteurs africains.

Sélect Fruit ne traite pas en direct avec les distributeurs africains mais passe par des importateurs situés en France.

Réputée de bonne conservation, la pomme est l'un des rares fruits avec le kiwi, voire avec le raisin, à supporter un voyage maritime – en condition contrôlée – de dix à quinze jours. De plus, le produit est réputé pour son prix accessible. « Nous livrons des pommes de petits calibres qui, au final, seront vendues à l'unité sur les marchés de Dakar ou des pays africains francophones, détaille Olivier Maugeais. Nous commercialisons ainsi des catégories de pommes qui ne trouveraient pas preneurs en France ou en Europe. Les variétés le plus souvent demandées sont Golden, Gala, Granny ou Braeburn. Mais les variétés clubs ne sont pas concernées par ce marché. »

Une approche commerciale compliquée

Sélect Fruit ne traite pas en direct avec les distributeurs africains mais passe par des importateurs basés en France. Dans la majorité des cas, l'assurance-crédit ne fonctionne pas. « L'acheteur doit honorer sa facture, en euros, avant le départ en bateau », exige le directeur commercial. Et les prix semblent des plus fantaisistes. Il n'existe aucune règle. « Nous avons parfois d'agréables surprises puisqu'il est arrivé que le prix de la pomme soit plus cher qu'en France, à catégorie identique bien sûr », relève-t-il.

Un marché d'opportunités

Sélect Fruit confie la logistique de transport à Fauvéder, un organisateur de transport maritime, aérien, commissionnaire en douane sous la marque Philippe Fauvéder et Cie, ses deux autres spécialités étant le transport de conteneurs (marque Hinderland) et la manutention portuaire sur Montoir (Loire-Atlantique) et Brest (Finistère) sous la marque Manuport. « Depuis cinq ans, nous avons développé le commerce de pommes à destination de Dakar, explique Jocelyne Guery, commercial à l'agence de Rezé (Loire-Atlantique) et interlocuteur de Sélect Fruit. Sélect Fruit fait partie des huit opérateurs qui nous délèguent entièrement la logistique du transport, depuis le départ en station fruitière jusqu'au quai portuaire. » Spécialiste du reefer, l'objectif de ce transitaire est de développer ce secteur en agroalimentaire. La moitié de l'activité overseas, soit 15 000 TEU, concerne déjà cette filière. « Depuis cette année, nous travaillons la pomme de terre de Picardie en plus des kiwis du Sud-Ouest et des carottes des Landes, relève le chargé de commerce. Nous nous occupons de l'exportation vers une trentaine de pays, essentiellement vers les pays de l'Est, le Moyen-Orient, l'Asie du Sud-Est et l'Inde. » L'activité dépend de la campagne de pommes elle-même. « Il y a deux ans, la production a chuté suite aux dégâts de gel au moment de la floraison, note Jocelyne Guery. Nous n'avons donc expédié aucune pomme vers l'Afrique. Le commerce dépend aussi de la campagne européenne et de l'hémisphère Sud. Si les volumes expédiés vers l'Europe ont été importants, nous avons plus de chances d'exporter vers le continent africain. En réalité, ce marché est difficile à appréhender. Nous apprenons à être philosophes en suivant attentivement l'actualité. »

Une organisation bien rodée

La pomme est normalement embarquée de fin août à fin février, même si le trafic peut démarrer plus tôt et se terminer parfois jusqu'à fin juin. En revanche, les négociations commerciales avec les quatre ou cinq compagnies maritimes débutent tous les ans à partir de juin. Le prix dépend de nombreux facteurs, du cours du pétrole en passant par les impacts géopolitiques, de la capacité du navire, de la parité dollar/ euro pour les destinations autres que l'Afrique. La valeur de la pomme elle-même intervient pour une large part dans les négociations. Aussi Jocelyne Guery est en contact très régulier avec les exportateurs. Même si les prix sont bas, le fret représente 10 à 15 % de la valeur marchande du produit qui, pour le continent africain, se négocie en euros. Pour le transport des pommes, les contrats InCoTerms [conditions internationales de vente, ndlr] sont de type CFR, donc sans assurance, celle-ci étant à la charge de l'exportateur. Fauvéder fournit les conteneurs. Le transitaire s'engage à ce qu'ils soient conformes à l'hygiène exigée et à respecter la chaîne du froid. Le service régional du ministère de l'Agriculture aura inspecté les fruits dans le cadre du certificat d'exportation. Les pommes sont transportées de l'une des six stations de conditionnement de Pom'Evasion vers le port de Montoir. « Les départs de Montoir ne sont pas les plus fréquents, explique-t-il. Ils sont adaptés au commerce vers Dakar pour lequel il existe une ligne directe. Il serait trop coûteux d'utiliser des feeders pour rejoindre Le Havre où nous travaillons à hauteur de 70 %, le reste de notre activité se faisant avec Fos/Marseille. »

Les températures sont contrôlées informatiquement durant le voyage en bateau. Des alarmes signalent aux techniciens de bord si les conditions ne sont pas respectées.

Les calendriers de départ des navires lancent le compte à rebours. Pom'Evasion et les autres exportateurs sont tenus au courant dès que possible des dates d'appareillages. Pour CMA CGM, qui est l'une des compagnies avec laquelle travaille Fauvéder, les départs sont prévus tous les mercredis, et l'arrivée est programmée le samedi, après neuf jours de traversée. Les conteneurs, une fois réservés par le transitaire, sont acheminés en station, chargés puis redirigés vers le port par des transporteurs qui ont négocié avec Fauvéder. Chez CMA CGM, les conteneurs de pommes sont des 40'reefer. Selon la campagne, ils doivent être à quai 48 à 72 heures avant le départ. Les contrôles, même visuels en enlevant les scellés réalisés par la douane, sont très rares pour la pomme.

Bientôt un suivi informatisé

En pleine campagne, Jocelyne Guery est en contact permanent avec l'exportateur. « Parfois, le producteur souhaite reporter la date d'embarcation ou demande à modifier le lieu de chargement du conteneur et cela plusieurs fois. C'est rarement le cas avec Pom'Evasion qui a un nombre limité de stations de conditionnement. » Mais parfois le timing est des plus serrés au moment de l'empotage complet du conteneur et de la pose des scellés. « Nous devons respecter impérativement la date de clôture émise par la douane. » Chez CMA CGM, les conteneurs sont chargés sur des navires de 3 500 TEU. Les températures (0,5 à 1 °C) sont contrôlées informatiquement durant le voyage. Des alarmes signalent aux techniciens de bord si les conditions ne sont pas respectées. Les conteneurs les plus modernes contrôlent aussi l'humidité de l'air. Mais, apparemment, les exportateurs de pommes exigent seulement une ventilation qui permet par un système de clapets de renouveler l'air du conteneur. Bien équipé, le port de Dakar n'est pas sujet à des congestions comme d'autres ports, les conteneurs peuvent ainsi être débarqués et suivre les modalités de la douane sénégalaise sans délai. Avant l'arrivée du bateau, Fauvéder aura émis le bill of lading. Ce titre de propriété est donné à Sélect Fruit afin que ce dernier le remette avec le certificat phyto à son client, sans quoi le déchargement est impossible.

Depuis quelques mois, Fauvéder modernise son système informatique pour que, bientôt, l'exportateur puisse notamment suivre son chargement jusqu'à destination. Ainsi l'expéditeur surveillera son lot de pommes qui aura parcouru plus de 5 000 km.

Ventes de pommes vers l'Espagne

Des opérateurs du Val-de-Loire livrent des pommes vers la péninsule ibérique malgré une concurrence vive de la part des Italiens et des producteurs français (Sud-Ouest, Sud-Est et Limousin). Ces derniers commercent depuis longtemps avec les distributeurs espagnols. Les variétés standards y sont appréciées (Golden, Canada, Gala, Fuji) mais pas les clubs au prix plus élevé. « Le marché espagnol est une niche pour nous, affirme Olivier Maugeais, directeur commercial de Pom'Evasion et de Sélect Fruit. Nous sommes arrivés sur ce marché il y a cinq ans et nous vendons principalement à des importateurs. » P. V.

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