Transport maritime
Le reefer conventionnel entame son chant du cygne
Les grands opérateurs du transport conventionnel se regroupent pour faire face à la concurrence du conteneur. Mais peut-il s’agir d’une stratégie à long terme ?


Drewry Shipping Consultants, un cabinet qui fait référence dans la profession, a publié au mois de septembre son analyse annuelle du secteur du transport maritime sous température dirigée (conteneurs et conventionnels). Le rapport souligne la baisse importante de la flotte de navires reefer conventionnels : à mi-2010, elle comptait 727 unités d’une capacité supérieure à 100 000 m3, soit une régression de 17 % sur la dernière décennie. De plus, le nombre de bateaux partant “à la casse” s’est élevé à trente-sept par an ces deux dernières années.
Pour donner un ordre d’idée, le simple nombre de nouveaux porte-conteneurs prévus pour les deux prochaines années dépasse la flotte reefer conventionnelle actuelle.
Un outil obsolète ?
« Il faut être conscient que le marché du reefer conventionnel est de plus en plus réduit, pour ne pas dire moribond, analyse Paul Tourret, directeur de l’Isemar (Institut supérieur d’économie maritime de Nantes-Saint-Nazaire). Des origines comme l’Afrique du Sud, le Chili ou la Nouvelle-Zélande font désormais appel majoritairement aux conteneurs. En fait, dans le cadre de la globalisation des flux de fruits et légumes, le reefer non conteneurisé apparaît comme un outil maritime obsolète face au déploiement du conteneur. Aujourd’hui, il n’existe plus que deux vrais marchés de niche pour ce type de transport : la banane et le marché russe. Et encore, pour ce dernier, il faudra voir son évolution logistique. Les opérateurs russes ont trouvé jusqu’à maintenant ce système plus pratique mais cela va-t-il durer ? La situation de la logistique en Arabie n’était peut-être pas meilleure mais celle-ci a fait, dès le début, le choix du conteneur. De plus, l’arrivée prégnante des distributeurs dans le secteur plaide pour une prédominance de la boîte. »
Une concurrence exacerbée
Pourtant ce transport maritime “historique” ne baisse pas les bras. L’annonce du rapprochement entre trois armateurs spécialisés du secteur apparaît comme une volonté de conserver ce qui peut l’être. Il s’agit du géant anversois Seatrade, d’Alpha Reefer Transport (agrégat de plusieurs compagnies dont le grec Laskaridis, le lithuanien Klaipeda et le letton Riga Transport) et du norvégien Green Reefers. A eux trois, ils représentent une flotte de 107 navires, d’une capacité allant de 140 000 à 356 000 m3, l’ensemble prenant le nom de Hamburg Reefer Pool. « Le but de cette nouvelle coopération est de faire des économies… et de maintenir la capacité des parties prenantes à offrir un service compétitif et commercialement attractif, en réponse à la concurrence du conteneur », expliquaient récemment les trois compagnies.
Il est vrai que les tarifs de fret en spot (court terme) ont largement baissé à cause d’une demande moins forte en fruits et légumes, y compris la banane, venant des pays d’Europe et de Russie. La concurrence s’est donc exacerbée avec les compagnies conteneurs, poussant à trouver de nouvelles synergies.
Cependant, rien n’assure que cette démarche puisse changer durablement la situation. Pour Paul Tourret, « les trois opérateurs tentent certainement d’organiser la résistance d’un secteur largement en perte de vitesse. En constituant ce pool, dans lequel le nom de Hambourg n’est là que pour l’accroche, ils vont pouvoir renforcer leur capacité pour offrir un service commun avec une offre commerciale. Les navires sont depuis longtemps amortis et les armateurs n’entendent pas investir dans de nouveaux bateaux : ce qui permet de proposer des taux de fret intéressants. C’est là que réside leur reste de compétitivité pour le moment. »