L'offre “Origine France”
Le raisin français attend toujours ses nouvelles variétés
La diversité de l'offre hexagonale permet de se démarquer. Nouvelles variétés et évolution des normes commerciales restent dans sa ligne de mire.
La production de raisin français devrait, en 2014, être plus importante que l'an passé où la profession avait vu son potentiel amputé d'environ 30 %. Mais, elle restera dans la moyenne, entre 45 000 et 50 000 t : si les professionnels ont connu une belle sortie en grappe, les épisodes de pluies et de grêles dans le Sud-Est ont impacté le produit précoce ainsi que le Muscat (cf. fld hebdo du 13 août 2014). Cela a entraîné des pertes de volumes (non-récolte). En 2013, sur la semaine 34, 50 % des apports étaient constitués par la variété précoce Prima alors que cette année, ils sont plus équilibrés avec un tiers de Muscat et un tiers de Danlas.
Dans les derniers raisins arrivés sur le marché français, Centennial s'est ajouté au portefeuille des producteurs suite à une demande de la distribution.
Sur le marché français, c'est l'origine italienne qui demeure le principal concurrent en linéaire. Encore que la concurrence n'est pas frontale comme l'explique Alexandra Lacoste, directrice de l'AOPn Raisin de table : « Nous n'avons pas l'intention de bouter le premier producteur européen hors de France. Les conditions de rendement et les coûts de production ne sont de toute façon pas les mêmes. Dans un linéaire parfois limité en place, l'AOPn souligne la typicité de l'offre française dont les différentes variétés répondent à toutes les envies, à tous les moments. Les variétés noires comme le Muscat ou le Prima, qui a su aujourd'hui trouver sa place, n'entrent pas en opposition avec l'offre italienne, centrée sur le blanc. Et puis nous disposons aussi de nos deux AOC – Muscat du Ventoux et Chasselas – pour nous démarquer. Cela, les enseignes françaises l'ont bien compris et jouent le jeu. » L'Espagne n'est présente qu'en fin de saison. Cette année, le tout début de campagne a vu la présence de raisins très précoces du Maroc, une tendance suivie par la filière.
Attente de nouvelles variétésAvec une telle stratégie, l'introduction de nouveaux raisins est un sujet primordial pour la filière. Dans les derniers raisins arrivés sur le marché français, Centennial s'est ajouté au portefeuille des producteurs suite à une demande de la distribution. La variété présente la caractéristique d'être à la fois apyrène et gustative, mais avec des grains plus petits que les autres. « L'aspect visuel prend une forte importance pour le consommateur français. Or, celui-ci privilégie le gros grain. La caractéristique apyrène n'est pas suffisante pour emporter son choix », précise Alexandra Lacoste. La variété Centennial, qui demeure cultivée sur de petites surfaces, se place comme un complément de gamme. « Le renouvellement variétal n'est pas suffisant, la filière reste sur des variétés traditionnelles qui font leurs preuves, souligne Alexandra Lacoste. Il est inutile de cultiver des variétés qui n'apporteraient rien de plus. Nous sommes néanmoins en attente de nouvelles propositions, particulièrement en matière de variétés résistantes au mildiou et à l'oïdium. L'INRA travaille sur le dossier. » Le 4 novembre, l'AOPn Raisin de table organise une journée technique qui présentera le plan stratégique pour la filière. A cette occasion, seront présentés les derniers développements en matière de variété résistante.
Embargo russe et libre-échangeLa filière n'est pas exposée directement par l'embargo russe mis en place le 7 août, dans la mesure où le raisin français est essentiellement destiné au marché national (seulement 10 % des tonnages environ sont exportés). En revanche, ce sont les reports d'autres pays producteurs sur le marché européen qui sont une préoccupation et en premier lieu, évidemment, la situation de l'Italie. « Il y a quelques années, un embargo similaire avait vu des camions de raisins italiens bloqués à la frontière atterrirent sur le marché de Rungis, se souvient Alexandra Lacoste. C'est ce que nous craignons cette année avec la décision russe. Dans ces conditions, les effets d'aubaine peuvent entraîner une forte déstabilisation du marché. »
Les producteurs ne sont pas directement touchés par les grands accords de libre-échange. Mais le raisin est lié au monde viticole et, dans ce contexte, ce sont les normes internationales de commercialisation, et leur évolution, qui peuvent avoir un impact. Exemple concret : en ce qui concerne la taille des baies de raisin. L'Inde milite pour un raisin à très gros grain, correspondant aux conditions pédoclimatiques de production dans ce pays. Si sa proposition passait au niveau international, cela éliminerait un certain nombre d'autres pays producteurs, y compris l'Italie. « Cela peut aller très vite, reconnaît Alexandra Lacoste. C'est pourquoi il nous est nécessaire d'avoir une information continue et des contacts réguliers avec les autorités françaises pour suivre le dossier et être une vraie force réactive. Simplement pour ne pas se retrouver rayer d'un coup des échanges internationaux. »