Coopération
Le périmètre de l’Euro-Méditerranée ne fait pas l’unanimité
Dans une période, troublée mais porteuse d’espoir, le petit déjeuner organisé par Ipemed a souligné quelques divergences sur les relations entre blocs du pourtour méditerranéen.
L’Institut de prospective économique du monde méditerranéen (Ipemed) a convié, la semaine dernière, deux économistes de haute volée à débattre sur les économies du Maghreb face à la crise. Ou plutôt les crises, puisque les derniers événements dans la zone s’ajoutent aux retombées de l’agitation économique des derniers mois. Jacques Mistral, président de la Société d’économie politique, directeur des études économiques à l’Ifri (Institut français des relations internationales), souligna le « moment historique exceptionnel » que connaît la région et « le contraste entre une macroéconomie ayant bien résisté à la crise de 2008 et sa faiblesse globale face aux autres puissances émergentes. L’absence d’union économique maghrébine est aussi un symptôme du blocage économique dans la zone. Le choix d’une union euro-méditerranéenne vaste est une erreur stratégique qui ne peut que limiter les résultats. » Et de plaider pour le dialogue 5+5 (enceinte politique informel regroupant dix pays du bassin occidental de la Méditerranée : Algérie, Libye, Maroc, Mauritanie et Tunisie d’une part, Espagne, France, Italie, Malte et Portugal d’autre part). Ce dernier avis n’a pas été partagé par Mouhoud El Mouhoub, professeur d’économie à Paris Dauphine, directeur du Groupement de recherche international du CNRS DREEM (Développement des recherches économiques euro-méditerranéennes) : « Aujourd’hui, la donne a changé et l’intégration méditerranéenne passera par celle entre les pays du Sud et par celle entre ces derniers et ceux de l’Est de la Méditerranée. Il faut sortir de l’illusion de l’accord de libre-échange de Barcelone, accord asymétrique, puisque, par exemple, l’agriculture n’est pas concernée alors que c’est le secteur qui offrirait le rendement le plus rapide. » En tout cas, comme l’a souligné à cette occasion l’économiste Hassan Benabderrazik : « Si la relation Europe/Afrique du Nord recomposée n’arrive pas à créer une synergie politique, celle-ci se fera sous l’égide de puissances extérieures et au détriment des deux acteurs ». Dont acte.