Le circuit court, bête noire du commerçant

D’ordinaire jovial et optimiste, François Bravo, commerçant non sédentaire depuis treize ans, a le moral dans les talons. Un début de campagne difficile, une mauvaise presse pour les fruits et légumes, la multiplication des points de vente directe, l’apparition de “nouveaux commerçants” peu scrupuleux sur la qualité de la marchandise, ont participé à ce gros coup de blues. « Je suis dépassé par les événements. Les gens ne voient plus que le prix, alors qu’auparavant ils recherchaient la qualité. Ils ont perdu leurs repères. Comment voulez-vous que notre profession puisse résister ? Personnellement, je paie le melon au producteur 0,90 e/kg alors qu’il est vendu à 1 € en GMS. Regardez plus bas le monde qu’il y a chez ce vendeur de melons en pallox, des melons venus d’on ne sait où et qui auraient dû être jetés ! Face à cela, quand j’annonce un prix, on me traite presque de voyou. » François Bravo et son épouse sont tous les jours sur les marchés de Vaison-la-Romaine, Apt, Salon et L’Isle-sur-la-Sorgue deux fois par semaine. « J’essaie au maximum de me fournir en direct chez les producteurs locaux, pour la fraîcheur, car la région est riche en produits du terroir. Mais pour certains, je dois passer par le Min de Cavaillon. » Si François Bravo apprécie le monde agricole, il en vient à déplorer les nouveaux circuits courts qui se mettent en place : « Entre les points de vente au détail, à la ferme, les déballages sur les parkings qui sont une honte, ou certains marchés paysans qui ne devraient pas avoir le droit de pratiquer, notre profession n’a plus lieu d’exister. Chacun devrait rester dans le domaine qui est le sien. Nous ressentons aussi le poids des charges et, comme les agriculteurs, nous ne nous en sortons plus non plus. Nous ne travaillons que l’été et notre présence sur les marchés en hiver ne sert qu’à tenir la place. » Pourtant, en dépit de la conjoncture, François Bravo aime son travail : « Nous avons des clients très fidèles, des touristes qui reviennent régulièrement l’été et des clients locaux qui sont sur le marché en hiver. C’est le plus de notre métier : le contact avec les gens. »