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Espagne
La guerre des prix aura-t-elle lieu ?

Alors que la campagne entre dans sa période cruciale de vente, les distributeurs mettent la pression sur les producteurs.

Selon les dernières estimations de production publiées par l’association européenne Freshfel (cf. "L’Italie fait son grand retour sur le marché"), la campagne d’agrumes espagnole est en baisse. Après une production pléthorique en 2008-2009 (6 743 011 tonnes), les volumes ne devraient pas dépasser les 5 400 746 tonnes cette saison. Soit une régression de 20 %. Il s’agit de l’une des plus importantes baisses de production agrumicole de la région méditerranéenne cette campagne.
Or, malgré cette baisse des volumes, les distributeurs auraient tendance à jouer sur les prix. « On y retourne dans cette guerre des prix. Alors que tous les éléments sont en notre faveur, se désole Jean-Luc Anglès, le directeur commercial d’Anecoop France. Et cette guerre des prix arrive dans une saison au cours de laquelle les producteurs n’en ont vraiment pas besoin. Nous ne pensons pas que ce soit nécessaire. Les producteurs sont extrêmement touchés par les aléas de la dernière campagne, et la baisse de volumes donnait une vision de campagne plus favorable. » Une tendance que le Syndicat agricole de la région de Valencia (Ava-Asaja) a dénoncée mi-octobre soulignant que les grandes chaînes de distribution agroalimentaires ont initié une féroce campagne de pression dirigée sur les producteurs d’agrumes espagnols, tant privés que coopératifs pour les forcer à négocier à la baisse des prix des fruits.

La situation est jugée insoutenable par les agrumiculteurs espagnols
« Les agriculteurs vont travailler en dessous des coûts de rentabilité, la situation devient insoutenable et les manœuvres que nous subissons de la part de la distribution sont inacceptables. Sinon qu’ils menacent les perspectives favorables que nous avons cette campagne », explique Cristobal Aguado, le président du Syndicat Ava-Asaja. Une lutte des prix qui se profile alors que l’Interprofession agrumes Intercitrus vient tout juste de signer un accord historique qui garantit le prix minimum au producteur. Cet accord, signé fin septembre, porte sur l’usage de contrats type homologués d’achat vente de mandarines, oranges en frais. De cette façon, il sera possible d’établir ce que les Espagnols appellent des “indices économiques de référence”, ce qui revient à garantir a priori des prix minimums à l’agriculteur. Intercitrus a ainsi remis au ministère de l’Agriculture une ébauche relative à cette demande dont le principal objectif consiste à promouvoir une rétribution juste pour tous les agents de la chaîne de production et de commercialisation des mandarines et oranges. L’accord définitif devait avoir lieu début octobre. Pour arriver à un tel accord, et qu’il soit conforme à la Commission nationale de la concurrence (CNC), Intercitrus annonçait qu’il avait été nécessaire d’organiser un nombre incalculable de réunions avec les pouvoirs publics.
Une régression que Jean-Luc Anglès explique pour deux raisons : « Ce sont des plantations qui alternent et pour rompre ces alternances on utilise des techniques culturales adaptées. Or, comme l’an dernier la campagne était pléthorique, les agrumiculteurs ont souffert plus que de coutume. Résultat, cette année, ils n’ont pas forcément eu les moyens d’appliquer ces techniques de culture. Ces années ne sont pas forcément une mauvaise chose, elles remettent de la normalité dans un marché qui en a manqué l’an passé par exemple pour les agriculteurs. Si les volumes sont plus faibles cette année, davantage seraient commercialisables. » Aussi, chez Anecoop, les prévisions sont presque similaires à ceux de l’Espagne. « Il y a un bon mois, les volumes étaient annoncés en baisse de 25 % par rapport à l’an passé. Maintenant que la campagne est bien avancée, la récolte serait un peu plus faiblement déficitaire de 18 à 20 %. »

La saison des tardives reste encore à dessiner chez Anecoop
Par voie de conséquence, la courbe des exportations espagnoles d’agrumes est en pleine mutation. « La campagne se focalise majoritairement sur les deux derniers mois de l’année (novembre et décembre). Et les conditions climatiques sont fondamentales pour la qualité des fruits. Nous avons besoin de suffisamment de températures hivernales pour les fruits, indiquait ainsi Juan Carlos Bolta Ivars, en charge de Bouquet Citrus chez Anecoop lors du VIe congrès Bouquet organisé fin avril à Valencia (Espagne). Il faut noter que nous progressons sur les clémentines précoces, mais il n’y a pas de réels changements importants dans le courant du mois d’octobre. Et quant aux clémentines de janvier et février, leurs volumes n’augmentent pas, ni ne satisfont. La saison des clémentines tardives reste encore à dessiner. Nous devons anticiper le futur avec des variétés type Nadorcott. »
De son côté, Jean-Luc Anglès annonçait, fin octobre, que le groupe Anecoop avait acheté une nouvelle variété de clémentine précoce, « il s’agit d’une fille d’Oronules qui se veut plus productive tout aussi gustative avec davantage de calibre. Et nous poursuivons nos recherches sur la deuxième partie de campagne, certains de nos concurrents auraient déjà quelques nouveautés intéressantes. » Ainsi pour être davantage présents sur le marché à l’export de clémentines, « Notre réelle opportunité, c’est d’augmenter notre production sur les mois de novembre et décembre, c’est encore plus vrai sur les nouvelles variétés hybrides. Si nous nous fixons comme objectif de dépasser les 25 % des exportations espagnoles d’hybrides, cela veut que nous devons prendre des risques », ajoutait Juan Carlos Bolta Ivars.

L’IGP Citricos Valencianos bénéficie d’un bon écho sur les marchés
De son côté, le Conseil régulateur des agrumes de Valencia, qui gère les IGP Citricos Valencianos, a annoncé une surface dédiée aux agrumes sous IGP en hausse de 30 %. Depuis la saison 2004-2005, les volumes sous IGP ont progressé de 6 166 tonnes à plus de 14 515 tonnes durant la campagne précédente, expliquait en quelques chiffres le dernier communiqué du Conseil régulateur. « Ces résultats sont le fruit d’une grande campagne de promotion menée depuis cinq ans. Aussi bien auprès du commerce national espagnol que la présence du conseil régulateur à de grands salons professionnels du secteur agroalimentaire ce qui a favorisé la diversification et l’augmentation des canaux de distribution. »
Comme conséquence, les vergers dédiés à l’IGP Citricos Valencianos s’étendent cette campagne sur une surface 12 382 hectares. Et les agrumiculteurs impliqués dans la démarche de qualité bénéficient au passage d’une aide additionnelle venant de la Chambre d’agriculture de Valencia.

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