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La France séduit de plus en plus les légumiers flamands

Le nord de la France séduit de plus en plus les opérateurs belges qui y trouvent des terres “vierges de légumes” et l'opportunité de se développer sur le marché français.

Les Belges ont accéléré le mouvement des locations de terre développé en Flandre française avant d'étendre leur appétit d'hectares jusqu'au nord de Paris. De tels mouvements ont aussi impacté la filière pommes de terre, provoquant parfois des réactions des producteurs français. On évalue à 8 000 ha les surfaces en pois et haricots (sans compter celles emblavées en choux, carottes et oignons) destinées aux industriels belges de la conserve et du surgelé. Une fois leur ancrage agricole assuré en France, les transformateurs belges ont multiplié implantations et acquisitions sur le sol français.

Conquête de terres agricoles et nouvelles implantations (passant parfois par le rachat d'outils existants) se sont faites de manière progressive, mais se sont accélérées depuis que les industriels belges ont pris

conscience que, pour accroître leur présence sur le marché français, il leur fallait de plus en plus commercialiser des légumes produits en France.

Le “made in France”, une origine recherchée

« En Belgique, les producteurs sont contraints à des rotations de cultures beaucoup plus rapides qu'en France », relève Paul Demyttenaere, directeur général de la criée REO* de Roeselare (Belgique) . C'est notamment le cas pour les choux (choux de Bruxelles et choux-fleurs). C'est une des raisons pour laquelle les Belges, faute de superficies disponibles chez eux, recherchent des terres “vierges de légumes” pour répondre à la demande industrielle tout comme celle des opérateurs commerciaux de f&l frais comme le veiling de REO de Roeselare. Le phénomène de l'origine France est en revanche beaucoup plus récent. Face à cet élan de patriotisme qui touche une grande partie des consommateurs français, les industriels belges désireux de se développer sur le marché national, se voient donc contraints de faire produire sur le sol français ! « Néanmoins, baptiser des légumes belges sous des marques françaises n'aurait aucun sens. C'est hors de question, et d'ailleurs nous n'en retirerions aucun avantage ! », tient à préciser le directeur général de REO qui dit « vouloir préférer travailler sur le long terme ».

C'est une des raisons qui le pousse à multiplier les initiatives sur le sol français. REO a scellé des accords avec l'UGPBAN (le principal producteur de bananes antillaises) via sa filiale Fruidor Terroirs en janvier 2014.

Des demandes de calibre différentes suivant les pays

Il veut également développer les choux de Bruxelles sur le marché français à partir d'une production française. « REO a la volonté de se développer sur ce marché. Nous avons pris contact avec les fraudes françaises pour qu'elles examinent la traçabilité de nos choux de Bruxelles sur la période 2014-2015 ! », confie le directeur de REO. Car la culture du chou de Bruxelles est loin d'être négligeable en Flandre belge (3 000 ha emblavés). Les industriels belges du surgelé utilisent les choux de Bruxelles de calibre inférieur à 33 mm. Quant aux calibres supérieurs, ils sont destinés à des opérateurs commerciaux hollandais qui, après reconditionnement, les destinent au marché européen et français. Pour le directeur de REO, il y a des places à prendre sur le marché français du chou de Bruxelles frais, notamment en améliorant ces flux logistiques. « On peut gagner deux jours de fraîcheur supplémentaires en proposant des produits plus qualitatifs », ajoute-t-il. C'est pour cette raison que, depuis la campagne dernière, REO a entamé une production de choux de Bruxelles à destination du marché du frais avec deux producteurs français. Et ce que le veiling de Roeselare a initié avec ces deux producteurs français, il compte bien le démultiplier dans des productions comme l'endive ou le chou-fleur ! « Il y a tellement de choses à explorer et à entreprendre dans le nord de la France », soupire-t-il. Pour lui, les coopératives du nord de la France doivent dépasser leur vision locale en ce qui concerne le marché du poireau. « C'est un produit qui demande à être segmenté beaucoup plus qu'il ne l'est actuellement si on veut s'ouvrir de nouveaux marchés », explique-t-il.

C'est en Flandre-Occidentale que se situe l'un des principaux bassins de production de légumes du nord de l'Europe cultivés aussi bien sous serre qu'en plein champ.

Le directeur de REO défend ainsi une segmentation du poireau plus poussée. « Le marché espagnol est différent des marchés du sud de la France qui exigent des poireaux de 20 à 30 mm de diamètre ou de ceux du nord qui apprécient les poireaux de diamètre allant de 30 à 40 mm ! » Selon lui, le nord est bien placé pour développer sa production de tomates. « Il est aussi bien placé que la Bretagne ou la Flandre belge », souligne-t-il. C'est la raison pour laquelle REO défend avec Fruidor Terroirs – mais avec quelques difficultés –, l'installation de serres verres de deux jeunes producteurs belges sur un terrain de 10 ha à côté de Saint-Omer (un dossier qui prend du retard sur le planning initial).

Quelques exemples de sociétés étrangères installées en France

• Le groupe Ardo, fondé en 1977, a montré la voie en s'implantant à Violaines (Pas-de-Calais) pour y surgeler des choux-fleurs, des oignons, des petits pois… (il va investir 37 millions d'euros à Gourin (Morbihan), ce qui lui permettra de doubler sa capacité de production en passant de 80 000 à 160 000 t/ an). Le groupe belge possède cinq usines en France (deux en Bretagne, une en Nord-Picardie, une dans les Landes et une dans la vallée du Rhône).

• Dès 2009, Daniel Verduyn, le dirigeant de l'entreprise éponyme de Kortemark (Belgique), avait déjà établi une première joint-venture avec le français Expandis avant de s'installer un an plus tard sur la zone industrielle d'Arras (Pas-de-Calais). Spécialisé dans le conditionnement de légumes à destination de l'industrie et de la GMS, Verduyn ne cesse de grandir. Il a doublé ses bâtiments en 2011, poursuit son développement et recherche en permanence de nouvelles surfaces (carottes notamment). Il a commencé avec 150 ha et dépasse aujourd'hui les 500 ha de contrats. Il réalise plus de 15 millions d'euros de chiffre d'affaires en France. La société a manifesté récemment auprès d'un élu agricole du Nord-Pas-de-Calais son désir de voir ses produits portés la marque Saveurs en'Or.

• Greenyard Foods, implanté à Westrozebeke et racheté en 2011 par Hein Deprez, est implanté dans le Nord (Comines), en Bretagne (Moréac) et en Aquitaines (Ychoux). Propriété de la Cecab depuis 1981, le site de Comines avait été quelque peu délaissé par son propriétaire coopératif. Greenyard Foods vient d'y investir 9 millions d'euros dans une ligne de surgélation de légumes d'une capacité horaire de 15 t/heure (équivalent petit pois) mise en service en novembre 2014. Le site de Comines est passé en deux ans de 30 000 à 35 000 t/an et vise à court terme les 45 000 t/an.

• A Arras, les nouvelles lignes de production de salades et crudités prêtes à l'emploi d'Agrafresh devraient commencer à tourner en 2016. En 2001, Yan Demarez avait créé une première ligne de salades prêtes à l'emploi sous barquettes à Pittem (Belgique). Agrafresh a commencé à travailler presque exclusivement sous marque de distributeur. « Mais on regardait déjà le marché français ! », lance-t-il. Système U sera son premier client français en barquettes et en sachets sous la marque “Bien Vu” et aborde le marché de la RHF en 2003-2004. Quelques années plus tard, Agrafresh étend sa gamme aux légumes frais cuits pasteurisés. Son chiffre d'affaires (10,3 millions d'euros) se répartit entre grande distribution (45 %), restauration hors domicile (30 %), et industrie (10 %) et le reste avec des Cash & Carry comme Metro.

* REO a scellé une coopération avec Fruidor Terroirs en janvier 2014 (cf. fld hebdo du 4 novembre 2015) et s'est alliée avec l'OP France Endives.

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