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Remboursement des aides conjoncturelles
La fin de non-recevoir des producteurs français

Lundi, la France agricole s’est réveillée un goût de cendres dans la bouche après l’interview de Bruno Le Maire accordée au Parisien et relayée par de nombreux médias. Cependant, il faut bien convenir qu’à part l’effet d’annonce médiatique, il n’y a rien de nouveau sous le soleil. La date butoir du 29 juillet ainsi que les demandes de Bruxelles étaient connues depuis longtemps tout comme l’appel en avril de Michel Barnier auprès de la Cour européenne de justice. Si Bruxelles réclame depuis janvier le remboursement de ces sommes octroyées aux producteurs français pendant dix ans via l’Oniflhor, c’est que la Commission considère qu’elles ont faussé la concurrence dans l’Union européenne. Le ministre de l’Agriculture semble désireux d’accélérer la procédure de remboursement des plans conjoncturels attribués à la France entre 1992 et 2002, mais tente néanmoins de négocier les montants réclamés par Bruxelles (lire également fld hebdo du 4 août). « La Commission européenne demande que les producteurs remboursent 330 millions d’euros plus les intérêts, soit environ 500 millions d’euros. Nous contestons une partie de cette somme, mais il est évident que nous devrons engager des procédures de restitution auprès des bénéficiaires, a déclaré le ministre à l’AFP. J’estime qu’il y a là-dedans des aides qui ne sont pas illégales. Nous ferons tout pour négocier le montant du remboursement, mais nous avons dû répondre à Bruxelles pour éviter des pénalités qui pourraient être exorbitantes. » Pour éviter cette hypothèse, Bruno Le Maire a envoyé le 29 juillet une lettre à la Commission pour lui annoncer que le processus compliqué de recouvrement des aides serait lancé dès le mois de septembre. La production ne l’entend évidemment pas de la même oreille et il est très probable que la réunion prévue cette après-midi au ministère de l’Agriculture se déroulera dans une ambiance tendue.

Des réactions en chaînes

François Lafitte, président de Fedecom : « Personne ne remboursera ces subventions. Nous n’en avons pas les moyens, sauf à saigner et faire disparaître les deux tiers de la filière ». Comme le gouvernement, Fedecom conteste le montant réclamé par Bruxelles et a déposé en juin un recours devant la Cour de justice. François Lafitte reproche aussi à l’Etat de s’être mis dans une “situation illégale” en ayant omis de notifier ces aides à la Commission. Selon lui, Bruxelles « était tout à fait au courant du mécanisme français » et a laissé faire « pour ne pas mettre le feu aux campagnes ». « Nous ne resterons pas les bras croisés », a promis François Lafitte.

Le président de la FNSEA, Jean-Michel Lemétayer, a jugé pour sa part qu’il était « impossible » de rembourser cette somme et a reproché au gouvernement de ne pas avoir réglé la question. « Comment imaginer un seul instant que les producteurs de fruits et légumes puissent rembourser aujourd’hui ? Qui plus est, un certain nombre d’entre eux, malheureusement, ont dû quitter le métier » (.) « Bruxelles devrait essayer de comprendre que cette façon de matraquer en permanence et ne pas vouloir faire face aux réelles situations économiques des producteurs est extrêmement dommageable pour ne pas dire insupportable ».

Bruno Dupont, président de la FNPF : « Concernant les plans de campagne, la FNPF et les producteurs de fruits tiennent à rappeler qu’il s’agissait d’un dispositif de crise cofinancé par les producteurs. Ce dispositif n’avait pas pour objectif de contribuer au développement d’entreprises fruitières bien portantes mais de se déclencher en cas de crise avérée afin d’aider les producteurs concernés à passer le cap. Face à une négligence des gouvernements successifs de l’époque, la FNPF et les producteurs de fruits refusent d’être les boucs émissaires. Nous ne sommes ni coupables, ni responsables, ni solvables. »

Raymond Girardi, secrétaire général du Modef : « Le Modef est ulcéré tant par l’ultra libéralisme de la Commission Européenne que par la complicité des gouvernements français qui se sont succédé depuis 15 ans. Non seulement, le Modef refuse quelque remboursement que ce soit par les producteurs, mais de plus, il somme le gouvernement français et son ministre de l’Agriculture de renvoyer la Commission Européenne à “ses chères études” comme l’avait exigé le peuple français lors du référendum sur le projet de traité constitutionnel européen. Bruxelles est plus préoccupé par l’orthodoxie d’un libre marché à l’origine de la crise économique que par le bien-être et l’avenir des citoyens d’une manière générale et celui des paysans en particulier. »

Confédération paysanne : Les producteurs de fruits et légumes n’ont pas à payer ! « Il est inadmissible que les producteurs de fruits et légumes soient pris pour responsables des erreurs de l’Etat français qui a indûment attribué des aides de 1992 à 2002. Les producteurs de fruits et légumes n’ont jamais eu le loisir de gérer les financements de l’Etat, ce n’est donc pas aux producteurs qu’il revient de réparer les pots cassés, d’autant plus que ces aides n’ont bénéficié qu’à une partie des producteurs, inscrits dans les organisations de producteurs. Le gouvernement a une capacité scandaleuse à mettre en place des mesures d’aide qu’il remet ensuite facilement en question, à la moindre interpellation de l’Europe. Le gouvernement doit assumer la décision qu’il a prise et dans laquelle il a impliqué des milliers de producteurs. La Confédération paysanne demande aux producteurs de ne pas rembourser ces aides qui sont déjà largement consommées. »

Jean Glavany : L’ancien ministre socialiste assume. Pour lui, il n’y a nul doute que Bruxelles était au courant de ce système d’aides alors accordées aux producteurs français de fruits et légumes : « Je suis sûr que Bruxelles connaissait l’existence de ces aides, versées par les Pouvoirs Publics. Le vrai problème, c’est de faire la différence entre l’aide d’urgence, et des subventions qui n’ont pas lieu d’exister. J’ai eu l’occasion d’intervenir dans certains cas pour stopper certains versements ». Jean Glavany enfonce le clou et va jusqu’à renvoyer la commission européenne dans les cordes en se disant « étonné » qu’elle « donne des leçons dans le secteur des fruits et légumes », « car l’action de Bruxelles est totalement défaillante dans ce domaine. » Et l’ancien ministre temporise en ajoutant, « il est clair » que le ministre de l’Agriculture Bruno Le Maire « s’est un peu précipité » en déclarant qu’il fallait rembourser ces aides et « qu’il aurait dû attendre le résultat du recours déposé par la France devant la cour de justice européenne pour prendre une décision ».

La Coordination Rurale considère « qu’il est hors de question que ces producteurs fassent les frais, même de manière partielle, des inconséquences des politiques agricoles française et européenne. Celles-ci sont incapables depuis des années d’organiser correctement la production et le marché des fruits et légumes et elles prétendent corriger cette incapacité par des palliatifs souvent coûteux et inefficaces qui ne permettent pas de maintenir un revenu décent pour les producteurs. Il est donc insupportable de voir maintenant réclamer sans gêne ni scrupules des sommes versées à des producteurs dont beaucoup ont disparu, victimes de la crise structurelle qui secoue sans cesse ces secteurs. »

Le syndicat national des importateurs/exportateurs de St Charles porte plainte contre les agriculteurs des Pyrénées-Orientales. Le syndicat national des importateurs/exportateurs a fait savoir son intention de porter plainte contre les agriculteurs des Pyrénées-Orientales. Par deux fois la semaine dernière, ceux-ci avaient procédé à des déversements de fruits et incendié des pneus sur des espaces privés du marché St Charles. Dans son communiqué le syndicat explique : « S’il est vrai que nous sommes tous solidaires des producteurs et agriculteurs, nous devons l’être pour ceux qui travaillent, qui recherchent des solutions, qui se fédèrent et non pour ceux qui détruisent. La patience a toujours une limite et les professionnels de Saint-Charles, patients par nature, ont aussi leurs limites. Tout simplement, ils en ont assez et disent “STOP”, aussi aujourd’hui et pour tout fait similaire à venir, le Syndicat se portera Partie Civile. »

Vaucluse : vente au déballage de raisin de table samedi. Le syndicat des producteurs de raisin de table de Vaucluse a obtenu les autorisations nécessaires pour organiser samedi une grande vente au déballage. Celle-ci aura lieu de 9 à 18h, sur un espace de 2 000 m2, dans la zone commerciale de la Christole et à proximité de nombreuses grandes enseignes. « Nous allons proposer du raisin en plateaux à des prix très attractifs pour le consommateur et rémunérateurs pour le producteur », souligne René Reynard. La raison de cette action est la difficulté du raisin français à être référencé dans les circuits commerciaux : « Nous avons du mal à écouler notre petite production. Quel que soit le circuit, on nous rétorque que ce n’est pas la saison. A ceux-là, je pose la question : Comment se fait-il alors que 60 % du linéaire raisin soit composé de produits d’importation ? Si ça n’était pas la saison, la présence de ce raisin n’aurait pas lieu d’être. Il y a sûrement une autre explication quelque part. » Et cette explication pourrait bien être au cœur des débats, demain, à l’occasion de la réunion téléphonique interprofessionnelle raisin de table.

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