Benoist Leforestier, président du CNIPT
« Il n’y aucun désintérêt pour notre produit »

Fld : Comment expliquez-vous la forte baisse de consommation constatée depuis les deux dernières campagnes ?
Benoist Leforestier : La pomme de terre ne fait pas exception à la baisse de consommation observée dans les f&l. Il n’y a cependant pas eu de transfert de la pomme de terre vers d’autres produits, ce qui est rassurant. Il n’y a pas de désintérêt pour notre produit. En revanche, toutes les tranches d’âge sont concernées, notamment les familles avec adolescents. Les moins concernés sont les ménages de moins de 35 ans. C’était la cible privilégiée de nos dernières campagnes de publicité. Il est certain que notre segmentation est devenue très complexe et qu’il faut la faire évoluer. C’était l’objectif de l’étude réalisée par le cabinet Adrien Stratégie en 2007.
Fld : Pourquoi ses préconisations sont-elles restées au stade des études et n’ont pas abouti ?
B. L. : Il fallait obtenir le consensus de l’ensemble des familles pour aller plus loin. Il s’avère par exemple que les représentants de la grande distribution [la FCD, N.D.L.R.] se sont faits de plus en plus rares à la table des discussions. Je note cependant que nous avons renoué le dialogue ces derniers mois et qu’un de leurs représentants assiste de nouveau à nos réunions (1). Il fallait aussi que tous les opérateurs soient une force de propositions et aillent de l’avant. On n’a pas senti du côté des conditionneurs une vraie volonté d’avancer, à l’image de celle que l’on a pu observer chez les producteurs.
Fld : La campagne a débuté une nouvelle fois avec une série de promotions que vous avez dénoncées. Comment peut-on empêcher que le phénomène ne se reproduise ?
B. L. : Ces promotions de début de campagne qui interviennent le plus souvent dans le Nord de la France sont néfastes à la filière. Quand un distributeur vend à un prix 4 à 5 fois inférieur au prix habituellement pratiqué, le consommateur perd ses repères. Nous sommes aujourd’hui dans un rapport de force entre neuf acheteurs et plus de 200 fournisseurs qui contraint le fournisseur à souvent accepter les conditions qui lui sont offertes. Nous avions un accord interprofessionnel qui encadrait les promotions. Il n’a pas été renouvelé cette année. Et si les Pouvoirs publics ne veulent pas nous aider, nous aurons beaucoup de mal à régler le problème entre nous.
Fld : Le négoce doit prendre la présidence de l’interprofession en décembre prochain. Selon vous, quelles seront les priorités pour 2011 ?
B. L. : Nous aurons à travailler sur la pérennisation et la diversification de nos marchés export. Nous ne pourrons plus nous contenter du seul débouché espagnol, de plus en plus fragilisé par la crise économique. Concernant l’Est, il faudra passer des marchés d’opportunité à des flux beaucoup plus réguliers. Il faudra aussi travailler l’après-segmentation. Il existe des pistes, que ce soit en matière de conditionnements, d’une plus grande adaptation de l’offre aux bassins de consommation français, voire à des opérations comme celle que nous avons menée avec Seb en novembre 2009 à Tours. Enfin, le CNIPT lancera sa nouvelle campagne de communication début 2011 qui sera ciblée sur les 25-49 ans.
(1) Il s’agit d’Eric Poisson, acheteur Casino [N.D.L.R.]
(2) La nouvelle campagne de communication du CNIPT qui devrait être opérationnelle dès le début 2011 a été confiée à l’agence LEG. Elle visera à « donner envie aux consommateurs de cuisiner des pommes de terre ». Cette filiale d’Havas vient notamment de remporter le budget publicitaire de Nike France.