Il faudra “faire avec” la pénurie d'olives
Les oléiculteurs subissent d'énormes pertes. Le ministère de l'Agriculture se dit prêt à les rencontrer avant la fin de l'année.

Si la crise oléicole a été largement médiatisée, les dégâts collatéraux ont été négligés. Ils ne portent pas seulement sur les conséquences sur les prix à la consommation, mais aussi sur l'organisation de la filière. Le premier résultat affecte directement le financement des structures. « Les grandes familles oléicoles vont subir l'insuffisance des rentrées de cotisations, indique Olivier Nasles, président de l'Afidol. Qu'il s'agisse de l'interprofession, des syndicats de défense des AOC ou des ODG, le montant des pertes est estimé à 1 M€. » Sénatrice de la Drôme, Marie-Pierre Monier a récemment interrogé Stéphane Le Foll sur ces circonstances assez exceptionnelles. Le ministre de l'Agriculture lui a répondu en ces termes : « La mouche de l'olive a sévi avec une acuité beaucoup plus grande que d'ordinaire. Cet insecte n'étant malheureusement pas répertorié dans la catégorie des nuisibles, il n'est pas possible de mobiliser le FMSE (.) Pour répondre aux difficultés économiques, les directions départementales sont mobilisées, au titre du Fonds d'allégement des charges financières et des demandes d'exonération de taxe foncière sur le non-bâti. Nous pouvons réfléchir aux meilleurs moyens de s'organiser pour lutter et préparer l'avenir. Mes services seront disponibles pour rencontrer les producteurs. »
Des estimations établies par l'Afidol« Une perte de 50 % dans la Vallée des Baux, de 70 % sur Aix et dans les Alpes-de-Haute-Provence, et quasiment rien à Nice, indique Olivier Nasles. Un questionnaire a été adressé aux structures, privées et coopératives, afin de dresser un état des lieux des dégâts. Nous le présenterons au ministre de l'Agriculture qui s'est engagé à nous recevoir avant la fin de l'année. » D'ici là, il faudra “faire avec” une année de pénurie. « Nous avons terminé la campagne dernière avec des stocks à zéro, indique Jean-Benoît Hugues du Moulin de Castelas aux Baux de Provence. Nous avons dû compléter notre production avec des achats onéreux d'olives à des producteurs installés en quasi-totalité dans la Vallée des Baux. Mais nous avons été pénalisés par les faibles rendements en huile. Et nous savons déjà que nous serons contraints à des arbitrages pour satisfaire les demandes. Faut-il revoir la gamme de contenants ? Faut-il équilibrer différemment nos circuits commerciaux ? Tout doit être repensé pour satisfaire des demandes plus importantes qu'à l'ordinaire. » Jean-Benoît Hugues n'imagine pourtant pas une inflation des prix. « Les marges se déplacent en amont au détriment des transformateurs. Cela va pénaliser les investissements. Je ne pense pas qu'il soit possible d'augmenter le prix de l'huile. » Reste que certaines structures vont devoir faire appel aux importations d'olive.
« Les importations doivent être organisées et très encadrées. La provenance devra être strictement indiquée sur les étiquettes. Le consommateur devra être vigilant et doit savoir qu'il y aura moins d'huile sous AOP qu'à l'habitude. »
Pour les coopératives oléicoles, deux cas se dessinent. « Les coopératives dont les adhérents ne sont pas en apport total font de gros efforts de fidélisation via la contractualisation avec leurs apporteurs, indique Sophie Denis, directrice du Moulin Jean-Marie Cornille à Maussane. Nous contractualisons avec chacun sur une moyenne annuelle de volumes. Cette année, certains oléiculteurs seront tentés de spéculer en proposant leurs olives à différents moulins. Mais ce n'est qu'une part minoritaire, la plupart des oléiculteurs ont une vision à plus long terme. » Une hausse des prix est inéluctable. « Dans notre cas, il s'agit d'une hausse de 8 à 10 % qui ne reflète pas l'augmentation des prix payés producteurs. Mais il ne faut pas effrayer le consommateur. Notre politique sera de servir un maximum de clients en fractionnant dans de petits contenants et en réduisant les volumes pour certains clients. »