La chronique
Flou de bio

Bio, local, Made in France, agriculture raisonnée, consommation durable… le choix des options est large, d’autant qu’il est souvent baigné dans un certain flou sémantique. Ceci pose des problèmes de fidélisation du consommateur bio et, du côté de l’offre, des problèmes de cohérence. D’autant qu’une des stratégies de la distribution consiste à brouiller les cartes, ou tout du moins à jouer sur plusieurs d’entre elles afin de bénéficier d’une demande globalement favorable à l’achat “responsable”. Plusieurs explications à cela.
Tout d’abord les motivations de consommation “autrement” sont hétérogènes. Les préoccupations de santé, le souci de protection de l’environnement, la réduction de l’empreinte carbone côtoient des aspects militants de plusieurs natures (soutenir l’économie locale, lutte anti-OGM…). Difficile de répondre à ces myriades de motivations sans hypersegmenter l’offre. Ce qui, d’un point de vue économique, n’est pas très viable. La sémantique “responsable” ici vient au secours d’une offre plus large.
Ensuite, ces motivations ne sont pas investies de façon identique : il y a plusieurs degrés, voire des mondes, entre l’acte individuel de consommation et l’action militante qui désire changer la société toute entière, voire sortir de l’économie. L’offre “responsable” ne trompe pas les plus militants. En revanche elle peut séduire un grand nombre de consommateurs, surtout si elle s’accompagne d’une politique de prix adaptée.
Ces valeurs seraient elles interchangeables ? Négociables ? Arbitrables ?
Pour de plus en plus de consommateurs, le flou de l’offre génère une réelle perte de confiance. Il devient nécessaire de rassurer en proposant des catégories plus lisibles.
Près d’un tiers de l’offre bio est importé. Pour le consommateur puriste en attente de produits issus d’une production de proximité c’est donc le doublet “Bio-Made in France” ou “Bio-Local” qui est proposé. Gageons qu’il va prendre de la valeur.
Bio ne signifie pas forcément écologique ou durable. L’agriculture raisonnée, respectueuse de l’environnement est, elle, une préoccupation montante. De fait, certaines offres “parallèles” au bio se développent. Le label Agri-Confiance par exemple, créé par Coop de France, commence à se distinguer. Ainsi Système U a signé un accord avec le groupe coopératif Triskalia pour une production qui suit les principes de l’agriculture raisonnée. Selon l’étude Xerfi, ce type d’offre va gagner en importance : il répond aux attentes de consommateurs à la fois soucieux de leur santé et de leur environnement.
Les thématiques d’équilibre alimentaire, de consommation plus saine pour la santé ou de proximité sont des univers de valeurs associés au bio… mais pas seulement. Ces thématiques concernent aujourd’hui d’autres formes de production. Celles-ci gagnent en clarté d’information, en visibilité. La reconfiguration du marché bio ne semble pas prête de s’achever sur soi-même dans un monde en mutation.