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Labels et certifications
Du bio à l'équitable, le marché GMS se cherche

Si le bio se montre stable, le marché de l'équitable semble en plein essor. C'est désormais un souci de communication des enseignes.

Pas de grande nouveauté sur le marché du bio pour la banane. C'est désormais un marché mature, qui représente, en fonction des enseignes, 10 à 15 % de l'univers global banane en France. La banane bio a désormais une longue histoire. « Elle est sortie de sa niche de vente, les magasins spécialisés, pour aller en grandes surfaces il y a une douzaine d'années, à la fin des années 1990, rappelle Philippe Pons, président-directeur général de AZ France. Carrefour a été pionnier en mettant en place une gamme bio permanente, d'abord en hyper puis en super. Les autres enseignes ont suivi le modèle avec du bio pour la segmentation. »

Depuis sept-huit ans, le bio est utilisé comme un vecteur de communication, les enseignes lançant chacune leur MDD bio (Carrefour Bio, Leclerc avec Bio Village, etc.). « En GMS, la banane bio est systématiquement ensachée (flowpack en polypropylène) pour la distinguer de la conventionnelle et bénéficier d'un support physique de communication », précise Philippe Pons. En termes d'origines, la République dominicaine, bénéficiant de conditions agroclimatiques favorables, reste le plus gros pourvoyeur. Suivent l'Equateur et le Pérou, mais ces bananes de la zone “dollar”, quoique visuellement plus présentables, doivent acquitter des droits de douane, ce qui les rend plus onéreurses à l'achat. Loin derrière, on trouve l'Afrique de l'Ouest (le Ghana et un peu la Côte d'Ivoire).

Des origines dépendantes du dollar

Le volume proposé par ces origines est pour le moment stable depuis trois-quatre ans. « On peut aussi citer le Mexique, qui envoie surtout aux Etats-Unis, mais les volumes vers l'Europe pourraient progresser », précise Philippe Pons. Chez AZ, 8 000 t de bananes bio sont commercialisées, intégralement pour le marché français. Elles proviennent de République dominicaine, d'Equateur (le Mexique étant travaillé en spot).

Pourrait-on voir un développement de certaines origines, comme le Pérou ? « Il ne faut pas oublier que les bananes bio sont issues de pays dont l'économie est majoritairement basée sur le dollar », analyse Philippe Pons. La baisse des droits de douane programmée est très progressive, de 3 à 5 % par an (droit de douanes 2016 de 103 €/t) tandis qu'on a perdu 15 % sur la parité euro-dollar entre 2014 et 2015. La République dominicaine est un pays ACP, donc ne s'acquitte pas de droits de douane. En outre, le temps de transport est de dix-douze jours. Au contraire, des pays comme l'Equateur ou le Pérou (banane dollar) doivent supporter un trajet plus long.

L'équitable, un bon écho

« Après une période stable en positionnement comme en volume, les perspectives d'évolution existent, mais pas de révolution à attendre », estime Philippe Pons à propos du marché bio en France. En revanche, ces dernières années, par souci de communication, les enseignes se sont lancées dans le Fairtrade. Environ deux tiers du total des volumes bio vendus le sont en étant également labélisés Fairtrade. Philippe Ruelle, directeur général de l'UGPBAN, approuve : « Le marché du bio représente 10 % des volumes, c'est beaucoup. Actuellement, il y a un transfert du bio vers le bio Fairtrade, c'est un mouvement de fond. Cela a été le cas en Allemagne et au Royaume-Uni. Le côté équitable a un bon écho. »

Les chiffres 2015 du commerce équitable en France ne sont pas encore disponibles mais les responsables de Max Havelaar France s'attendent à une très bonne année. « 2015 aura très certainement vu une croissance à deux chiffres pour la banane, précise Nicolas Léger, responsable développement marchés produits frais chez Max Havelaar France. 2014 avait été une année exceptionnelle, avec un bond sur un an de 141 % avec 19 000 t. » Monoprix, dès 1998, a été la première enseigne généraliste à proposer des bananes bio équitables. La plupart des enseignes sont désormais engagées et les chiffres 2015 devraient refléter plusieurs faits : au deuxième trimestre 2014, Carrefour a remplacé toutes ses bananes bio par de la bio équitable (9 000 t de bananes bio équitables ont été vendues par Carrefour, soit 50 % des volumes vendus en France, avait rapporté l'enseigne), puis, fin 2014, Intermarché a fait de même. En 2015, Auchan a fait un choix plutôt audacieux : remplacer ses bananes cœur de gamme vrac par des bananes équitables conventionnelles de la Compagnie Fruitière, origines Ghana et Cameroun (cf. fld hebdo du 13 mai 2015).

Le Fairtrade, jamais sans le bio ?

Une large part des plantations de la Compagnie Fruitière dans ces pays était déjà certifiée Fairtrade/Max Havelaar (depuis 2012), mais les bananes étaient vendues sur les marchés d'Europe du Nord car le consommateur français n'était pas prêt pour de l'équitable non bio. En France, être Fairtrade ne suffit pas, il faut aussi être bio. Il existe encore une certaine confusion chez le consommateur français qui n'a pas forcément conscience de la démarche environnementale du label. De plus, la banane équitable conventionnelle est vendue en vrac, donc ne peut profiter d'un emballage pour communiquer.

« Le bio et Fairtrade, l'un ne remplace pas l'autre. Le bio nous a permis de croître », souligne Nicolas Léger. La part de marché de la banane Fairtrade Max Havelaar est passée de 1,5 % à 3,4 % en 2014. Sur le segment bio, c'est plus d'un tiers du volume total commercialisé qui était aussi certifié Fairtrade/Max Havelaar. « Le bio représente 10 % du marché et jusqu'ici le Fairtrade ne touchait pas les 90 % restant, précise-t-il. Aujourd'hui, l'initiative de Auchan avec la Compagnie Fruitière nous permet de toucher le conventionnel avec un côté plus premium. C'est un développement intéressant pour nous. »

En Europe, certains marchés déclinent

la banane autour du Fairtrade Un développement du Fairtrade qui n'empêche pas la Compagnie Fruitière de tenter l'aventure du bio. Le groupe a l'intention de lancer un projet de culture de bananes bio au Ghana mais aussi en Côte d'Ivoire. Selon l'Agence Ecofin, 400 ha au nord et au sud de la Côte d'Ivoire sont envisagés, avec un investissement potentiel de 7 MdFCFA (10,6 M€), financé en partie par l'UE.

Les autres marchés européens (surtout Royaume-Uni et Scandinavie) sont segmentés différemment du marché français. Le “modèle” allemand se rapproche plus du français, en termes de présentation du bio, même si les origines “dollar” prédominent. Le Royaume-Uni décline la banane Fairtrade comme une catégorie : Fairtrade conventionnelle, Fairtrade bio (comme chez Tesco), ou bio qui peut être l'une ou l'autre. « En France une telle segmentation serait difficile, en termes d'espace », estime Philippe Pons. La Scandinavie met le Fairtrade en avant, de même que d'autres labels environnementaux (Rain Forest Alliance). « Sur les marchés européens, la croissance se poursuit en bio équitable, en Allemagne, en Scandinavie, poursuit Nicolas Léger. En Suisse ou au Royaume-Uni, le marché est mature, il est toujours en croissance mais celle-ci est plus modeste. »

« La consommation française de bananes bio est aujourd'hui stable. Si des enseignes distinguaient le bio du Fairtrade, une telle initiative pourrait générer des changements », conclut Philippe Pons.

Et en production, comment ça se passe ?

La banane bio est globalement moins productive que la conventionnelle, nous explique Philippe Pons. La culture n'est pas possible sous tous les climats, notamment ceux très humides comme aux Antilles, lorsque la pression phytosanitaire est trop forte. Les organismes certificateurs sont les mêmes qu'en Europe, les protocoles de production aussi : seuls les produits d'origine minérale sont autorisés (cuivre, soufre). En mûrissage, tant qu'il n'y a pas de contact entre les bananes conventionnelles et bio, il n'y a pas de restriction pour les faire mûrir dans la même chambre. Le protocole est globalement similaire, même s'il convient d'être plus vigilant sur la banane bio quant à d'éventuelles évolutions du fruit. J. C.

Royaume-Uni : la guerre des prix vaut aussi en Fairtrade

Est-ce que proposer de la banane (bio) équitable est un moyen pour les distributeurs de segmenter par le haut leur offre et d'atténuer ainsi les effets de la guerre des prix ? Pas si sûr, si l'on regarde du côté du Royaume-Uni. Le pays est le leader mondial de la banane équitable. Le démarrage y a été plus tardif qu'en Allemagne ou en Suisse mais ce produit a connu un essor rapide dès le milieu des années 2000. Selon le Cirad, en 2014, la banane équitable (dont bio équitable) représentait 225 000 t, soit près d'un quart du marché. Sur ces volumes, “seules” 30 000 t seraient aussi bio. Et sur l'ensemble du marché, la banane bio occuperait moins de 10 %. Mais le secteur du bio montre une certaine reprise depuis 2013. Par ailleurs, le Royaume-Uni se distingue par un modèle de distribution très concentré et la guerre des prix fait rage. Elle se répercute sur les différents stades de la filière, qu'elle soit équitable ou non. « L'utilisation de la banane comme produit d'appel dans la guerre des prix des supermarchés britanniques a exercé une pression à la baisse sur les fournisseurs du commerce équitable en réduisant les niveaux globaux des prix de la banane, écrit Fruitrop (septembre 2015). (…) L'année 2015 a vu à nouveau le prix de la banane équitable s'aligner chez tous les distributeurs à 0,68 £/kg (0,89 €/kg). Selon certains observateurs, à 0,79 £/kg (1,04 €/kg), la banane équitable se vend à marge nulle, à 0,68 £/kg elle se vend à perte. La banane bio équitable commence à subir la guerre des prix alors que la banane bio semble encore résister. (…) Bien que le prix minimum et la prime au producteur soient toujours assurés, les opérateurs ne paient plus depuis deux ans un prix supérieur au prix minimum fixé alors qu'historiquement c'était le cas. » Face à cela, la Faitrade Foundation a mené en 2014 une campagne à destination du public pour présenter une analyse du problème, réclamant une intervention du gouvernement et une mobilisation des distributeurs. J. C. avec Fruitrop

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