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Des serres high-tech pour le concombre

Boostée par un marché porteur, la production de concombre se développe en France. Des serres high-tech se mettent en place pour répondre aux attentes en concombre français sans résidu de pesticide.

Au moins 5 ha de serres de concombre sont aujourd’hui équipés d’éclairage Led.
© Cheminant Groupe

Sain, facile et rapide à utiliser, peu calorique, coloré et croquant avec un goût neutre, le concombre est plébiscité par les consommateurs, y compris les jeunes. S’y ajoutent des attentes croissantes pour du concombre produit en France et aujourd’hui sans résidu de pesticide. Résultat : des prix plutôt bons ces dernières années, qui incitent les producteurs à investir pour produire du concombre et pouvoir garantir l’absence de résidu de pesticide. Alors qu’il y a quelques années, les nouvelles serres étaient plutôt destinées à la tomate, les serristes aujourd’hui n’hésitent plus à créer des serres high-tech spécifiquement pour le concombre. Depuis trois ans, et encore plus en 2018 et 2019, des serres de 6,50-7 m sous chéneaux, semi-fermées ou AVS, se construisent pour le concombre. « Parce qu’elles permettent un meilleur contrôle du climat et donc des bioagresseurs et qu’elles sont en surpression et équipées de filets insect-proof, ces serres permettent une qualité sanitaire irréprochable et la production de concombre “zéro résidu de pesticide” », commente Vincent Truffault, référent concombre au CTIFL de Carquefou. Leur développement s’accompagne d’une évolution vers la conduite sur fil haut qui consiste à ne garder qu’une tige productive et à la palisser sur un fil, verticalement puis horizontalement, en enlevant régulièrement les vieilles feuilles. « C’est la meilleure façon de produire du concombre “zéro résidu de pesticide”, analyse Vincent Truffault. Comme la plante est plus aérée, la détection et le contrôle des ravageurs et maladies sont plus faciles que dans l’enchevêtrement des feuilles des conduites en V ou en parapluie. La protection biologique intégrée fonctionne très bien. Et comme on enlève environ six feuilles par semaine et que les vieilles feuilles sont une voie d’entrée privilégiée des pathogènes, la plante, qui en produit toujours de nouvelles, reste plus active et plus saine. »

Intensification de la production

Une autre évolution est l’intensification de la production avec le développement de l’éclairage Led qui permet de produire toute l’année des fruits de qualité. Au moins 5 ha de serres de concombre sont aujourd’hui équipés d’éclairage Led et des travaux sont menés au CTIFL sur ce sujet. « L’objectif est d’aller encore plus loin en adaptant l’éclairage au concombre, précise Vincent Truffault. La technique a été développée surtout pour la tomate. Or, même si elle fonctionne bien globalement en concombre, il ne réagit pas tout à fait comme la tomate. Nous devons adapter les conduites et les longueurs d’onde utilisées. » Un autre changement se situe au niveau des variétés, avec la nécessité de variétés adaptées à la culture sur fil haut, régulières et équilibrées, mais aussi plus résistantes aux bioagresseurs, en particulier à l’oïdium et aux virus. La production s’intensifiant et la conduite sur fil haut impliquant plus d’interventions sur les plantes et donc plus de risques de transmission des pathogènes, la résistance aux virus, notamment au CGMMV (Cucumber Green Mottle Mosaïc Virus), devient primordiale. Et d’autres technologies commencent à se développer. Les études sur la relocalisation des tuyaux de chauffage et le pilotage du climat de la serre à partir de la température du méristème conduisent ainsi des producteurs à installer un tuyau Forcas au-dessus des têtes des plantes. « Il y a un vrai intérêt à chauffer la tête le matin, quand on ouvre l’écran thermique, car il y a alors une baisse de la température de la tête des plantes. En journée, le pilotage du climat à partir de la température du méristème s’avère plus compliqué. » Une autre piste au niveau de la recherche-expérimentation est la modélisation de la croissance des plantes selon la température et la luminosité (projet Conserfilo, CTIFL de Carquefou-IRHS-Arelpal-CDDM). « La modélisation mathématique de la croissance des plantes pourra permettre de tester des scénarios plus compliqués à étudier sur le terrain », souligne Vincent Truffault.

Antoine Cheminant, producteur en Loire-Atlantique

« Du concombre français toute l’année »

« En 2018, nous avons mis en place 2 ha de serre semi-fermée avec éclairage led, verre diffus et conduite sur fil haut. Le but avec ce « package » est de produire toute l’année. De novembre à mars, 40 000 t de concombre sont importées d’Espagne. Mais les consommateurs sont aujourd’hui demandeurs de produits « made in France » et les distributeurs sont intéressés par du concombre français. La conduite sur fil haut entraîne une meilleure qualité de fruit et plus de rendement. Nous avons 100 % de fruits en catégorie 1. L’éclairage permet de produire en hiver et optimise les périodes intermédiaires du printemps et de l’automne. La serre semi-fermée permet une meilleure gestion du climat en hiver et en été et entraîne des économies de chauffage et de CO2. Avec tout cela, il faut aussi des variétés plus résistantes car la plante produit plus et nous la travaillons plus, ce qui accroît les risques sanitaires. »

Frédéric Transon, producteur dans le Loiret

« Produire en “zéro résidu de pesticide” »

« Je produis du concombre sous 3 ha de serres. Depuis peu, dans le cadre de la structure de commercialisation Kultive, je me suis engagé dans la production de concombre “zéro résidu de pesticide”. Je n’ai pas trop de problèmes de maladies, seulement un peu d’oïdium, mais qui ne m’oblige pas à traiter. Je suis plus embêté par les ravageurs, notamment les punaises Lygus et Nezara. Même si je fais de la lutte biologique depuis longtemps, produire en “zéro résidu de pesticide” entraîne certains changements. Je suis ainsi en train de basculer d’un système deux cultures par an à un système trois cultures par an pour limiter les risques sanitaires, pour le “zéro résidu de pesticide” et pour la qualité. Cela implique de tout mettre en œuvre pour aller plus vite, de bien chauffer, car les cultures sont plus courtes. »

Belgin Cukadar, sélectionneuse De Ruiter

« Des variétés productives et résistantes »

« La sélection est un processus complexe qui implique l’amélioration de plusieurs caractères en même temps. Notre programme de sélection concombre se focalise d’abord sur le potentiel de rendement (en nombre de fruits et poids moyen par m²). Cependant, le rendement seul ne suffit pas. Nous devons aussi nous concentrer sur des caractéristiques de qualité de plante et de fruits et sur les résistances à certains pathogènes. Dans certains cas, par exemple pour l’oïdium, il y a une corrélation négative entre rendement et résistance élevée, ce qui complique d’autant plus la sélection. Pour la France, c’est important d’avoir des variétés avec une résistance à l’oïdium et au CGMMV. Depuis 2008, le CGMMV est devenu un problème dans plusieurs parties du monde. C’est un virus très infectieux, qui peut induire une perte de rendement jusqu’à 20-30 % si le virus survient très tôt dans le cycle de culture. Le manque de main-d’œuvre est aussi une grande préoccupation des producteurs et nous essayons de développer des variétés qui nécessitent peu de main-d’œuvre. »

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